28 mai 2021, 18:20

THE SMASHING PUMPKINS

"Gish" (1991 - Rétro-chronique)

Album : Gish

Nous sommes (déjà) en 2021 et cet album fête ses... 30 ans !

S’il est un groupe qui a divisé le public dit metal à sa création et ce, jusqu’en Europe, on peut citer en tête de liste le cas THE SMASHING PUMPKINS, qui s’est formé en 1988 dans la ville d’adoption du criminel Al Capone, Chicago. C’est à la suite de la séparation de sa formation de gothic-rock, THE MARKED, que le chanteur-guitariste Billy Corgan fonde le groupe qui, nous allons nous en rendre très vite compte, se voit influencé par des noms aussi cultes que THE CURE ou NEW ORDER, des figures de la new-wave et du mouvement gothique d’alors. Pour payer ses factures, il se fait engager dans un magasin de disques, et c’est précisément là qu’il va rencontrer celui qui va devenir l’autre guitariste que l’on connait, James Iha. Dans l’attente de compléter ce line-up, le duo évolue avec une simple boîte à rythmes. A l’issue d’un concert de DAN REED NETWORK, Billy fait la connaissance de la bassiste D’Arcy Wretzky, à qui il propose d’intégrer son groupe. Quant au batteur Jimmy Chamberlin, c’est sur les conseils d’un patron de bar que fréquente Billy, qu’il se fait embaucher. Tout ce petit monde embarque à la fin de l’année 1990 en direction des Smart Studios dans le Wisconsin, appartenant à un producteur alors peu connu, Butch Vig, futur producteur du « Nevermind » de NIRVANA mais connu également en tant que batteur et co-producteur de GARBAGE.

Vig a alors pour habitude de bâcler le travail, non pas en raison d’une éthique douteuse, mais pour des raisons financières, car les groupes qu’il enregistre à cette époque n’ont souvent que peu de moyens et doivent se contenter de trois-quatre jours en studio. Ce qui n’est, en revanche, pas le cas pour THE SMASHING PUMPKINS et leur premier album, « Gish », nommé ainsi en référence à une icône du cinéma muet, Lilian Gish. Le producteur s’en rappelle d’ailleurs en ces termes : « Billy fut un don du ciel pour moi en tant que producteur car je n’avais pas l’habitude de travailler ainsi jusqu’ici. Il voulait que tout sonne de manière exceptionnelle et s’en donnait les moyens, un terme fort à propos par ailleurs. Avoir le luxe – car c’en est un – de passer des heures sur une tonalité de guitare ou d’accorder la batterie, de travailler sur les harmonies et les textures sonores, j’en étais aux anges d’avoir pu trouver un compagnon d’armes qui me poussait à me dépasser et qui attendait la même chose de ma part envers lui. » En studio, c’est Corgan qui se charge non seulement du chant bien entendu mais aussi d’une large proportion des parties de guitare... et de basse ! D’aucuns le traiteront plus tard de despote, quelques départs houleux de musiciens par la suite et un caractère disons bien trempé n’amenant pas d’eau à son moulin, il sait en tout cas parfaitement ce qu’il veut, comment il veut que ça sonne et ce qu’il veut faire ressentir à l’auditeur. Couplé à un manque d’expérience en studio, tout ceci provoquera de lourdes dissensions internes selon la bassiste D’Arcy (« Je ne sais pas comment le groupe a pu survivre à l’enregistrement de ce disque ! ») et a amené Corgan à faire une dépression nerveuse. Pour un début, c’est pas gagné mais les efforts sont souvent récompensés...


« Ce disque parle de douleur et d’ascension spirituelle et c’aurait pu être un album instrumental. Je ne savais pas que j’étais capable de mettre des mots sur mes émotions et c’est presque un hasard qu’il y ait des paroles, j’avais fait en sorte de tout dire de façon musicale » déclarera-t-il à la presse. Grand bien lui en a pris car le timbre de voix si particulier de Corgan est reconnaissable entre mille, sans parler d’un son de guitare tout aussi unique, conférant de suite au groupe une identité sonore qui lui est propre. Combinés à un vrai talent d’écriture, on obtient alors sur « Gish » la combinaison gagnante. A la différence près que le public ne suit pas vraiment à sa sortie le 28 mai 1991 tandis que les critiques accueillent bien le disque au vu des retours dans les magazines. Beaucoup d’articles et chroniques en ce sens referont d’ailleurs surface à la sortie du deuxième album. D’une infinie délicatesse comme sur "Crush" ou "Daydream" qui est chantée par D’Arcy Wretzky, on passe sans transition – ou presque – vers un rock lascif et cotonneux, à l’instar de "Rhinoceros", qui se veut une démo datant de 1989 réenregistrée pour l’occasion. On citera également "Siva", premier single et un nom qu’envisageait Corgan pour le groupe. En 46 minutes et dix compositions marquantes (quelle ouverture vers le monde que cette "I Am One"), l’auditeur navigue constamment entre agressivité et douceur, chahuté et malmené par le son comme a pu l’être Billy Corgan en composant ces chansons. Paradoxalement, bien qu’il ne se soit classé aux Etats-Unis qu’à la 195e place du Billboard Top 200, il finira par s’en écouler plus d’un million d’exemplaires, ceci étant dû en partie au succès que va bientôt rencontrer le groupe deux ans plus tard avec l’exceptionnel « Siamese Dream », mais surtout en 1995 avec le double « Mellon Collie And The Infinite Sadness », une grosse prise de risque artistique pour un résultat qui s’avérera payant au-delà de toutes les attentes. Mais ceci est une autre histoire...

Pour aller plus loin :

« Siamese Dream » (1993) : leur meilleur album, et de loin ! Oui, ceci est un avis très personnel et hautement subjectif, j’assume.
« Mellon Collie And The Infinite Sadness » (1995) : LE plus gros succès commercial du groupe. 1er au Billboard et plus de 12 millions d’exemplaires vendus dans le monde à ce jour.


Blogger : Jérôme Sérignac
Au sujet de l'auteur
Jérôme Sérignac
D’IRON MAIDEN (Up The Irons!) à CARCASS, de KING’S X à SLAYER, de LIVING COLOUR à MAYHEM, c’est simple, il n’est pas une chapelle du metal qu'il ne visite, sans compter sur son amour immodéré pour la musique au sens le plus large possible, englobant à 360° la (quasi) totalité des styles existants. Ainsi, il n’est pas rare qu’il pose aussi sur sa platine un disque de THE DOORS, d' ISRAEL VIBRATION, de NTM, de James BROWN, un vieux Jean-Michel JARRE, Elvis PRESLEY, THE EASYBEATS, les SEX PISTOLS, Hubert-Félix THIÉFAINE ou SUPERTRAMP, de WAGNER avec tous les groupes metal susnommés et ce, de la façon la plus aléatoire possible. Il rejoint l’équipe en février 2016, ce qui lui a permis depuis de coucher par écrit ses impressions, son ressenti, bref d’exprimer tout le bien (ou le mal parfois) qu’il éprouve au fil des écoutes d'albums et des concerts qu’il chronique pour HARD FORCE.
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