15 mars 2022, 18:30

VIO-LENCE

"Let The World Burn"

Album : Let The World Burn

VIO-LENCE. Violence. Un mot qui résume bien le mantra (et le nom) de ce groupe culte s’il en est, ayant vu le jour dans la célèbre Bay Area de San Francisco au milieu des années 80, « Il y a une éternité, il y a un siècle, il y a un an… » si l’on utilise la mesure du temps selon Joe Dassin. Pour les amateurs de thrash, je ne ferai pas bien entendu l’affront de citer le nom des groupes légendaires du genre qui sont issus du creuset local. Culte se veut parfois un terme galvaudé, du moins utilisé trop souvent à tort et à travers pour qualifier des choses appartenant à un autre siècle, mais je peux vous assurer qu’il n’est ici nullement usurpé. Les aventures pacifistes du groupe commencent, discographiquement parlant et hors démos, en avril 1988 avec « Eternal Nightmare », album dont la superbe illustration rappelle le sarlacc (créature que l’on a découverte dans la saga Star Wars). Ce disque est passé à la postérité depuis par le biais de plusieurs facteurs. D’une, sa qualité intrinsèque, brutale et pleine de verve propre à la jeunesse de ces fauteurs de trouble à l’époque et d’autre part, dans le fait que deux des membres d’alors soient partis ensuite fonder MACHINE HEAD, j’ai nommé les bretteurs Phil Demmel et Robb Flynn. On comptait également parmi les tous premiers musiciens à avoir contribué au lancement du groupe le bassiste Eddie Billy, frère de Chuck Billy, frontman de TESTAMENT. Enfin bon, on ne va pas vous refaire tout le film, on n’aurait pas fini même si l’histoire a tourné court après trois bons albums entrecoupés d’un EP d’inédits et vieilles démos sur une période de cinq ans. Et pour ceux qui n’auraient pas vu passer l’information, est sorti entretemps en 2006 un excellent documentaire sur l’histoire de la formation en DVD intitulé « Blood And Dirt ».

J’aime aussi me remémorer cette époque insouciante avec délectation pour l’existence du single promo "Eternal Nightmare"/"Phobophobia" et sa pochette en plastique renfermant du faux vomi. En fait, un mélange de soupe de légumes et de vinaigre qui n’a pas passé l’épreuve du temps et dont les heureux possesseurs actuels indiquent que le tout s’est déshydraté, rendu à l’état de plaque sèche. Une délicieuse initiative reprise plus tard par SLAYER et sa pochette avec du faux sang pour le single "Seasons In The Abyss" ou REVOLTING COCKS, l’un des groupes du leader de MINISTRY Al Jourgensen, qui avait opté pour du faux sperme. Amis du bon goût, bonjour...

Et 29 ans plus tard, après « Nothing To Gain », voilà donc que (re)débarque le groupe avec un nouvel EP, « Let The World Burn ». On pourrait presque dire qu’il est inespéré bien qu’on ait eu vent il y a quelque temps déjà des velléités de Phil Demmel d’en découdre à nouveau avec ses anciens camarades. Et franchement, on n’allait pas s’en plaindre, cette nouvelle ayant fait du bruit dans le Landerneau des amateurs de thrash old-school que nous sommes. Et à l’écoute de cet EP, nos attentes sont on ne peut plus comblées. Les sessions d’enregistrement ont eu lieu aux studios Trident sis à Pacheco, Californie, en compagnie du producteur Juan Urteaga, pas le premier péquin venu, lui qui a déjà travaillé avec TESTAMENT, MACHINE HEAD et EXODUS, entre autres et qui succède à d’illustres noms de la profession (John Cuniberti, Alex Perialas et Michael Rosen). Donc niveau production, c’est du massif et aux normes de son 2022, ce qui sert parfaitement le propos présent. Tant mieux je dirais car l’option de sonner à l’ancienne aurait fait l’effet d’un pétard mouillé au vu de la moindre des productions actuelles de n’importe quel groupe amateur possédant ProTools et quelques plugs bien sentis.

Cinq titres seulement donc mais quelle dérouillée mes amis ! Less is more comme ils disent dans la langue de Shakespeare et effectivement, le côté ramassé d’un tel disque permet de concentrer toute la force de frappe dont la formation dispose et ce, en peu de temps, de façon précise et chirurgicale, ce que VIO-LENCE s’attache à faire ici en 25mn. Côté personnel en place, on retrouve le chanteur Sean Killian ainsi que Phil Demmel à la guitare et Perry Strickland à la batterie, voilà en ce qui concerne les anciens. Les nouveaux, si tant est que l’on puisse les qualifier ainsi vu que ce sont eux-aussi des "vieux de la vieille", se nomment Bobby Gustafson (ex-OVERKILL) au poste de second guitariste et Christian Olde Wolbers à la basse, actuellement en poste avec POWERFLO et ancien membre de FEAR FACTORY.

Après ce long préambule, attaquons-nous si vous le voulez bien à la substantifique moelle de ce "nonosse" que l’on nous donne à ronger. D’entrée de jeu, "Flesh From Bone" racle la chair jusqu’à l’os justement et confirme les espoirs mis dans cette résurrection avant d’enchaîner sans plus de cérémonie sur la hurlée "Screaming Always". Vegans et autres sensibles de la feuille, circulez ! Ça gratte (très) vite et bien, que ce soit en ryhtmique ou lors des soli, et l’on retrouve avec plaisir ce chant si caractéristique de Sean Killian qui rappellera par moments aux plus jeunes le phrasé dont se sont très certainement inspirés Jamey Jasta (HATEBREED) ou le regretté Riley Gale (POWER TRIP). Les années passées vont bien au timbre du chanteur, qui se veut plus rauque et grave que celui que l’on entend sur les albums parus il y a 30 ans et plus, une sorte de patine au papier de verre allons-nous figurer. Les autres compositions que l’on découvre ont été vieillies en fûts de chêne et où "Gato Negro" incarne la chanson qui colle le plus au cahier des charges de ce thrash old-school dont je parlais plus haut quand "Upon Their Cross" est celle où la rythmique est un pilonnage auditif en règle comme on les aime.

VIO-LENCE n’est pas revenu pour enfiler des perles et le fait savoir. Avec un break parlé en son milieu avant que la charge reparte de plus belle, la chanson-titre "Let The World Burn" referme cette (trop) courte parenthèse et ces retrouvailles avec un public qui n’avait jamais oublié VIO-LENCE et qui, en ces temps ô combien troublés de 2022, sait qu’il doit profiter de ce que l’on peut lui offrir. Ce « Let The World Burn » au titre philosophique sur lequel on vous laissera méditer est, je trouve, un bien beau cadeau que le groupe vient de nous faire. Merci messieurs, carpe diem bordel !

Blogger : Jérôme Sérignac
Au sujet de l'auteur
Jérôme Sérignac
D’IRON MAIDEN (Up The Irons!) à CARCASS, de KING’S X à SLAYER, de LIVING COLOUR à MAYHEM, c’est simple, il n’est pas une chapelle du metal qu'il ne visite, sans compter sur son amour immodéré pour la musique au sens le plus large possible, englobant à 360° la (quasi) totalité des styles existants. Ainsi, il n’est pas rare qu’il pose aussi sur sa platine un disque de THE DOORS, d' ISRAEL VIBRATION, de NTM, de James BROWN, un vieux Jean-Michel JARRE, Elvis PRESLEY, THE EASYBEATS, les SEX PISTOLS, Hubert-Félix THIÉFAINE ou SUPERTRAMP, de WAGNER avec tous les groupes metal susnommés et ce, de la façon la plus aléatoire possible. Il rejoint l’équipe en février 2016, ce qui lui a permis depuis de coucher par écrit ses impressions, son ressenti, bref d’exprimer tout le bien (ou le mal parfois) qu’il éprouve au fil des écoutes d'albums et des concerts qu’il chronique pour HARD FORCE.
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