20 octobre 2023, 19:11

KARRAS

Interview Diego Janson


A l’avant-veille de sa prestation au Tyrant Fest, et quelques jours après la sortie de son deuxième album « We Poison Their Young », KARRAS a une actualité chargée. Le bassiste et chanteur Diego Janson vous parle de ce groupe qui assène un death/crust irrésistible...


Peux-tu revenir sur la naissance de KARRAS ?
J’ai rencontré Étienne (batterie, ex-AqME, DELIVERANCE) par l’intermédiaire d’un ami commun... avant je ne le connaissais qu’à travers ses interviews dans les magazines. J’avais des idées de riffs, je les lui ai montrées et il a posé des parties de batterie dessus. Ce fut un déclic : ça nous paraissait solide. Nous avons donc composé à deux, d’abord des morceaux puis un album. Je tenais alors la guitare... et nous avons cherché un chanteur. Finalement, Étienne m’a dit : « vas-y ! ». J’avais déjà fait des chœurs, j’étais capable de growler… mais pas longtemps ! J’ai pris des cours de chant, enfin plutôt de respiration. Ce n’était ni trop technique, ni trop intimidant. Les textes sont venus naturellement en studio.

Et la guitare ?
Comme je devais aussi chanter, j’ai préféré opter pour la basse. Nous avons donc cherché un guitariste. Je connaissais Yann (MASS HYSTERIA), avec qui j’avais une idée de projet, un peu dans le genre de KARRAS d’ailleurs. L’album était prêt, il l’a écouté et a eu un coup de cœur.

S’est-il impliqué dans votre deuxième album ?
Oui, il a été dans le processus d’écriture. Nous ne voulions pas être un projet à deux, mais un vrai groupe, à trois. Un trio, avec une seule guitare, c’est parfait pour notre style de musique. Les planètes se sont parfaitement alignées musicalement comme humainement.


Comment avez-vous composé « We Poison Their Young » ?
Nous ne maquettons pas. Chacun arrive avec ses riffs, ses idées. Ensuite, nous les travaillons, les remodelons ensemble en répétitions. C’est un processus très instinctif. Nous pouvons écarter un morceau qui ne convient pas. Sur « We Poison Their Young » nous avons signé chacun quatre chansons, avec notre façon de composer personnelle. Un fan de metal peut d’ailleurs savoir qui a écrit quoi ! L’album forme malgré tout un bloc avec des titres qui se marient très bien. Au final, il y avait 12 pistes mais Étienne trouvait que 13 c’était mieux que 12. Il a donc ajouté ce fameux "Demons Got Rythm" qui dure 8 secondes !

Peux-tu dire quelques mots sur ce "Negative Life" plus doomy qui clôture l’album ?
Bien sûr d’autant plus que c’est moi qui l’ai écrit. Je voulais un morceau différent, plus lent, mid-tempo, dans une veine noise, rock couillu, si je peux dire...

Oui, oui, tu peux !
...Limite hardcore, UNSANE. Les autres ont adhéré. Je l’aurais bien vu en milieu de disque, comme un interlude mais, au final, nous l’avons placé à la fin pour faire retomber la pression.

Quelle évolution notes-tu entre vos deux albums ?
Il y a une continuité mais « We Poison Their Young » est à la fois plus violent et plus abouti. Yann a apporté un côté plus grindcore, plus énervé. Notre propos s’est durci, avec des morceaux plus courts. Au chant, je suis plus à l’aise, plus libéré. J’ai de nouveaux repères... mais encore une belle marge de progression.

Comment parvenez-vous à concilier vos emplois du temps ?
Nous habitons tous les trois près de notre local. Nous répétons une fois par semaine pour garder une certaine routine. Nous jonglons avec nos créneaux. Parfois Yann nous prévient le jour même qu’il a une heure disponible et nous y allons ! Pour les concerts, KARRAS est ma priorité. Etienne, lui, met KARRAS et DELIVERANCE sur un pied d’égalité, il jongle entre les deux. Le premier booké est le premier servi ! Quant à Yann, quand il y a doublon avec MASS HYSTERIA, il accepte de céder sa place. Nico, de GRIST, le remplace alors.

Quel est votre programme de concerts ?
Nous avons tourné en 2022 avec BLOCKHEADS et nous devions repartir avec eux en 2023... mais nous n’avons plus eu de nouvelles du tourneur ! Il était trop tard pour relancer autre chose. Il faut six mois pour monter une tournée. Ce sera donc pour mars/avril 2024. Nous sommes frustrés de ne pas pouvoir promouvoir l’album même si nous allons donner des concerts ponctuels, comme au Tyrant Fest ou à Paris au Glazart le 7 décembre.


Vous êtes désormais chez M-Theory Audio, un label américain...
Notre premier album est sorti chez Verycords, le label de MASS HYSTERIA. Notre musique n’était pas trop leur style mais ils l’ont pris pour nous dépanner. La COVID est arrivée et notre disque a fait un peu chou blanc. Même si nous avions signé pour deux disques, Verycords n’a pas voulu continuer. J’ai donc cherché des labels sur Internet, j’ai écouté leurs groupes pour voir qui pourrait être intéressé par KARRAS. J’ai envoyé entre 50 et 60 mails, personnalisés, avec du son... et j’ai obtenu 5% de réponses, dont une positive de M-Theory Audio... Je me suis renseigné sur cette structure. Elle est gérée par Marco Barbieri dans un but non lucratif, avec des groupes comme GOD FORBID’S ou STINKY. Le gars, ce n’est pas un manchot ! C’est un ancien de Metal Blade Records puis il a lancé Nuclear Blast US et Century Media US. Nous avons fait une visio tous ensemble, avec le groupe et son assistant. Nous ne sommes pas déçus : il nous donne des conseils tout en nous laissant indépendants. Nous sommes super contents du contrat, des moyens qu’il met pour KARRAS. Aux USA, le metal est pris au sérieux. Je gère moi-même les envois de t-shirts, CD, vinyles pour la France, qui représente 80% de nos ventes, et le reste du monde à l’exception des États-Unis. Nous avons des demandes de l’étranger, là je viens d’en avoir une d’Australie !

L’esthétique de KARRAS est forte, notamment avec l’utilisation du noir et blanc pour les pochettes et les clips...
Je suis fan de l’esthétique des fanzines des années 90, ces montages à la photocopieuse en noir et blanc. Il y a un côté démo, assez naïf, un esprit punk/crust. Je pense aussi aux pochettes de DISCHARGE, du « Uprising » d'ENTOMBED, de CELTIC FROST. Il y a un réel impact au niveau visuel. C’est la même chose pour nos clips. Une continuité se crée, ce parti-pris colle bien à notre musique.

A propos de clip, celui de "Roland Doe" a été tourné dans les Catacombes...
Nous l’avons tourné en deux fois. Les scènes avec l’enfant ont été réalisées dans les Catacombes, dans une partie interdite au public. Notre réalisatrice est catophile, elle connaissait ! L’enfant a adoré, il a pris son pied. Bon, ses parents étaient inquiets mais je les connais bien ! Il était impossible de faire descendre nos instruments dans les Catacombes. Nous sommes donc allés dans les carrières de Carrières-sur-Seine, un site incroyable que l’on peut louer pour des fêtes, des anniversaires... mais avec aussi plus de 200 km de dédales ! Nous nous sommes donc enfoncés dans ce lieu pour trouver le spot idéal. Nous avons installé un groupe électrogène, quelques lumières et nous avons joué.

Pourrais-tu nous donner tes trois films d’horreur préférés, étant donné que KARRAS puise une partie de son inspiration dans ce genre ?
L’Exorciste, de Williman Friedkin ! Je l’ai vu trop jeune, avec mon frère, à une époque où l’on ne parlait pas trop de contrôle parental. Il m’a traumatisé ! Il m’inspire toujours avec ce scénario assez lent avant que tout ne s’accélère dans les 20 dernières minutes. Ensuite il y a The Omen. Comment s'appelle l'enfant, déjà ? Ah oui, Damien. On peut entendre un extrait de ce film sur l’album. Pour « We Poison Their Young », qui tourne autour de l’histoire d’un gamin possédé, j’ai aussi regardé The Bad Seed, un film qui date des années 50 mais, en troisième je mets plutôt Children Of The Corn, tiré d’un texte de Stephen King. Ce sont des enfants qui prennent le pouvoir dans une ville perdue des Etats-Unis. Voilà mon top 3... valable pour 2023 !

Enfin, peux-tu nous dire de quoi KARRAS vous exorcise-t-il ?
Le groupe est effectivement un exutoire. La musique nous permet d’évacuer beaucoup de choses. D’ailleurs après un concert ou des répétitions nous sommes vidés. La musique est notre passion commune à tous les trois. Nous en parlons tout le temps, même si nous ne sommes pas toujours d’accord...

Y a-t-il quand même un groupe qui vous rassemble, sur lequel vous vous retrouvez ?
SLAYER ! Là, nous sommes d’accord tous les trois... même si nous n’avons pas les mêmes albums préférés. Pour Yann, c’est « Reign In Blood », pour moi c’est « Seasons In The Abyss », le premier album du groupe que j’ai découvert. Tout en lui me fascine, dès la pochette. Quant à Étienne, je ne sais pas quel est son SLAYER préféré.
 

Blogger : Christophe Grès
Au sujet de l'auteur
Christophe Grès
Christophe a plongé dans l’univers du hard rock et du metal à la fin de l’adolescence, au tout début des années 90, avec Guns N’ Roses, Iron Maiden – des heures passées à écouter "Live after Death", les yeux plongés dans la mythique illustration du disque ! – et Motörhead. Très vite, cette musique devient une passion de plus en plus envahissante… Une multitude de nouveaux groupes a envahi sa vie, d’Obituary à Dark Throne en passant par Loudblast, Immortal, Paradise Lost... Les Grands Anciens – Black Sabbath, Led Zep, Deep Purple… – sont devenus ses références, comme de sages grands-pères, quand de jeunes furieux sont devenus les rejetons turbulents de la famille. Adorant écrire, il a créé et mené le fanzine A Rebours durant quelques années. Collectionneur dans l’âme, il accumule les set-lists, les vinyles, les CDs, les flyers… au grand désarroi de sa compagne, rétive à l’art métallique.
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