11 septembre 2024, 18:29

ANTECHAOS

Interview Laurent Fabisz & Nicolas Pélissier


Si le premier album des Lorrains ANTECHAOS a été chaleureusement accueilli par un public conquis autant par la musique que par l’énergie du groupe, il est fort à parier que le nouveau « Dystopies » lui permettra de poursuivre son ascension. Avec toujours autant de punch et surtout une réelle touche originale et unique, la formation ravit les fans de hard rock, de metal mais fédère également des auditeurs de tout bord. Le chanteur Laurent Fabisz et le guitariste Nicolas Pélissier, partagent avec nous leurs impressions en tant que groupe en pleine effervescence.


Voici déjà le deuxième album pour ANTECHAOS, mais revenons un peu sur « Apocalypse » sorti en 2022. Etes-vous satisfaits par l’accueil qui lui a été réservé ? Il semble que vous ayez trouvé votre public ?
Laurent :
J’avoue que nous avons été très surpris par le très bon accueil réservé à ce premier album. Pour l’ensemble du groupe, c’était la première fois qu’on composait des chansons écrites en français avec tous les risques que cela comporte de donner un vrai sens aux paroles et que ça ne sonne pas "cucul la praline". (rires) Les chroniques, plus de 50, ont été unanimes et il semble que le groupe se soit fait une place dans le paysage hard rock français. Notre public est situé principalement dans le Grand Est, notre région d’attache, et le but pour nous maintenant va être de faire découvrir notre musique à plus grande échelle.
Nico : Notre plus grande satisfaction je pense, est et restera de garder notre indépendance et de ne devoir notre évolution que par la musique que l’on propose et non pas par la somme d’argent mise sur la table.

Cela vous a donné l’occasion de présenter le groupe sur scène comme tu le dis, avec des nombreuses premières parties notamment. Les critiques sont également unanimes quant à la qualité de vos prestations scéniques. C’est rassurant de savoir que votre travail est reconnu ?
Laurent : Il est clair que nous attachons beaucoup d’importance à notre performance scénique. Nous tenons vraiment à faire vivre un moment particulier à notre public. Qu’il sorte du concert en se disant qu’il a vécu une expérience inédite. Chacun de nos concerts est différent, de par la set-list qu’on peut jouer, de l’interaction avec le public, le jeu de scène. Nous faisons sur scène ce qu’on aimerait voir si nous-mêmes nous allions voir un concert. Nous jouons sans aucun sample, mis à part l’introduction. On ne triche pas, et je pense que c’est ce que le public attend. De l’authenticité, du partage, et de l’émotion.
Nico : ​En plus nous essayons d’intégrer à notre répertoire des morceaux incontournables de la chanson française que nous adaptons à notre univers. Ainsi les auditeurs ont un point d’accroche qui va les guider tout au long du concert.

Quelle sensation avez-vous sur scène, devant le public, ou finalement beaucoup de choses se jouent ?
Laurent : On ressent une énergie qui nous dépasse. Un lien invisible nous lie avec le public. Les gens sont eux-mêmes acteurs du concert, car pour avoir une bonne ambiance, il faut que les artistes jouent le jeu, mais également les spectateurs. Enormément de monde lors de la tournée de notre premier album nous ont fait part de leur étonnement sur la proximité qu’on a avec eux, sur l’énergie qui est véhiculée par le groupe. Le plus étonnant, c’est que nous avons eu l’occasion de jouer dans des concerts plus "mainstream", et des personnes qui n’aiment pas forcément le hard rock sont venus nous féliciter, car ils ont apprécié notre prestation, les paroles et les émotions que nous avons faites véhiculer.
Nico : ​C’est là que les étiquettes musicales perdent leur sens... Oui on fait du hard rock lorgnant vers le metal, mais le côté mélodique permet de réconcilier les néophytes avec ce style parfois mal compris.


Ce nouveau « Dystopies » arrive donc deux ans après « Apocalypse », c’est un bon rythme entre deux albums. La société actuelle vous inspire ?
Laurent : Oui, déjà 2 ans, ou seulement 2 ans nous séparent de la sortie de « Apocalypse ». Il est important dans notre industrie musicale actuelle d’avoir un contenu régulier, surtout pour un groupe qui n’a que 4 ans d’existence, au risque de se faire oublier par le public. Nous sommes en pleine ascension, et ce n’est pas le moment de se relâcher. Nico a la faculté de pouvoir écrire de la musique avec énormément de facilité, et je pense que la réussite du premier album nous a particulièrement motivés à écrire à nouveau. Concernant les thèmes abordés, il y a effectivement plusieurs sujets de société, mais l’inspiration dans les paroles peut venir d’une idée sur la réalité que nous vivons, ou alors un personnage, fictif ou non. Il arrive que Nico ait une idée de thème en écrivant la musique, ou alors c’est moi qui trouve le thème en écoutant la musique de Nico ou en ayant une idée qui me traverse l’esprit à un moment donné.
Nico : ​En fait l’idée de faire un album sur les dystopies qui gangrènent le monde moderne actuel a germé durant l’écriture des derniers morceaux de notre précédant disque. Ce gamin qui conserve un monde utopique sous cloche car le sien a été complètement détruit par la bêtise et l’égoïsme des humains ("Apocalypse"). Je me suis demandé, comment on pourrait en arriver là à terme... Avec Laurent nous avons listé des domaines où nous sombrions peu à peu vers le chaos. L’album est né ainsi.

Votre hard rock est toujours pêchu, dynamique, mélodique et efficace mais en même temps, il est original. On reconnaît la "patte" ANTECHAOS. Qu’est-ce qui, selon vous, vous donne ce petit truc en plus, que d’autres groupes n’ont pas ?
Laurent : Je pense avant tout que nous sommes curieux. Nous écoutons beaucoup de styles différents. Nico est issu d’un univers assez progressif ou brutal, et il adore également tout ce qui est médiéval. Pour ma part, j’ai baigné dans le heavy metal des années 80 et 90, mais j’apprécie aussi des artistes très variés qui ont marqué la musique, et j’ai une formation scolaire littéraire. J’ai aussi fait du classique en faisant quelques années de conservatoire. Nico a cette capacité étonnante de pouvoir composer dans n’importe quel registre, et c’est un vrai bonheur de pouvoir écrire sur sa musique. Le mélange de tout ça se ressent certainement dans nos chansons.
Nico : ​Le fait également pour ma part d’avoir des enfants qui grandissent et qui te font découvrir de nouvelles choses, de nouveaux groupes et de nouveaux sons. C’est ce qui m’empêche de tomber dans la facilité et de rester sur mes acquis. L’avis des jeunes est impitoyable!!

En se penchant sur les paroles des chansons de « Dystopies », on constate que les mots "réel" ou "réalité" reviennent régulièrement, comme une sorte de fil rouge en opposition avec l’immatériel, l’irréel des réseaux sociaux, d’internet, du "metavers" auquel un des titres est consacré. Peux-tu nous parler de cette vision de la réalité qui revient à toi à chaque moment ?
Laurent : Effectivement, cette dualité réel/irréel est très présente dans cet album. On vacille entre réalité et fiction au fil des chansons. Certains personnages en immersion totale ("Métavers", "Mission Sirius", "J&H") ne savent même plus où se trouve la frontière entre la réalité de leur vie, et l’univers du jeu vidéo, le fait qu’ils soient esclaves d’une secte, ou le monstre qui prend le dessus sur leur intégrité. La dystopie est une utopie qui tourne mal. Où les puissants pensent que les choses sont justes alors qu’elles ne le sont pas du tout, ou tout est écrit et où on ne peut rien faire pour changer le monde de manière positive. On peut même dire que certaines chansons pourraient être le fruit de l’imagination d’une personne qui rêve, qui vit ces histoires dans un songe en totale immersion. C’est ce que j’ai eu en tête lors de tout le processus d’écriture des paroles.


Est-ce qu’on peut dire qu’ANTECHAOS est un groupe engagé, un "agitateur" de conscience ?
Laurent : Le terme engagé peut être piégeux. ANTECHAOS raconte avant tout des histoires qui permettent au public de voyager en sautant d’une chanson à l’autre. Parfois, implicitement, ou explicitement, on se fait l’observateur de la société actuelle, mais loin de nous l’idée de donner des leçons ou d’être des lanceurs d’alerte. Le fil rouge de cet album est que les personnages des chansons pensent faire quelque chose de bien, mais au final, les choses se retournent contre eux et ils font le mal. En aucun cas nous sommes engagés politiquement, mais il est clair que nous défendons des valeurs qui nous sont chères : la protection de l’enfance (cf "Enfance 2.0", "Effet Papillon"), la préservation de la nature ("Les Vertueux"), le refus des dictatures ("Dystopies").
Nico : ​Comme le dit justement Laurent, bien souvent les donneurs de leçons ne sont pas les plus vertueux dans de nombreux domaines, il suffit juste de voir les sommes engagées pour la sortie d’un disque, pour un clip, l’impact écologique d’une tournée, les cachets et caprices demandés...

Vos influences sont variées et votre musique est riche. Quels sont les artistes qui vous inspirent, quelles sont vos références ?
Laurent : Je me souviens que quand nous avons écrit le premier album, le but était d’avoir un gros son à l’américaine, comme MÖTLEY CRÜE, SIXX:A.M., etc... Pour les influences, elles sont très larges. On peut citer RAMMSTEIN, MÖTLEY CRÜE, PAIN OF SALVATION pour ce qui est de la musique. Pour le coté chant, j’avoue avec un gros penchant pour IRON MAIDEN, JUDAS PRIEST, STRATOVARIUS. J’apprécie énormément AVATAR, qui ne cesse de gagner en notoriété et qui fait preuve d’une originalité incroyable. Une chanson d’un univers complètement différent peut parfois nous influencer pour donner une couleur inattendue.
Nico : ​Ce sont plutôt les thèmes abordés qui m’inspirent. J’avoue que du temps de SEYMINHOL, j’avais plutôt tendance à me réfugier dans les orchestrations, les ambiances pour composer. Maintenant, seule ma guitare me sert de guide et je dois avouer que ça rend les choses plus spontanées. Cela dilue énormément mes influences.


© Antechaos - DR


Trois personnes sont venues collaborer avec vous sur cet album : Julien Escalas de MAGOYOND ainsi que Raphaël Verguin de PSYGNOSIS pour le violoncelle sur "Memento Mori" et Arno Dhenain Le Bourhis de BLACK BOMB A sur "In Vivo". Tu peux nous parler de leurs prestations et comment s’est décidé ce travail en commun ?
Laurent : Comme dit plus haut, nous sommes très ouverts musicalement, et nous apprécions le travail des autres artistes. Malgré tous mes efforts pour être le plus polyvalent possible vocalement, nous souhaitions une vraie couleur de voix sur certains passages, que je n’étais pas en capacité de faire. C’est ainsi que Julien et Arno ont été contactés. Nous leur avons transmis les textes et ils ont enregistré les pistes et nous les ont renvoyées. Il est important de noter que Nathanael Pélissier, le fils de Nico est l’auteur des paroles de "Memento Mori". Pour Raphaël, le son d’un vrai violoncelle est inimitable. C’est tout naturellement que nous lui avons demandé sa participation, car nous connaissions sa qualité de jeu. La musique est avant tout un partage, et ce fut très enrichissant de nous entourer d’artistes aussi expérimentés et sympathiques.
Nico : ​Ce sont des gars très sympathiques, ils ont accepté tout de suite quand je leur ai proposé, malgré leur notoriété et leur emploi du temps ultra chargé. J’adore la voix de Julien, c’était mon choix numéro 1 pour ouvrir l’album. C’est quelqu'un de très professionnel, il a pris du temps pour nous, pour que ce soit le mieux possible. Je ne connais Raphaël que virtuellement, il a tout de suite accepté aussi et a enregistré dans la foulée. J’adore son style ! Pour Arno, nous avons la chance de connaître le nouveau batteur de BLACL BOMB A, Jordan. C’est lui qui m’a dit de foncer lui demandé car c’était quelqu'un de cool. Il a eu totalement raison. C’est pour moi une des plus belles voix extrêmes en France.

A nouveau l’artwork de l’album est extrêmement soigné avec des couleurs magnifiques et beaucoup de symbolisme. Tu peux nous en parler ?
Laurent : Jérôme Brack ("le druide"), est un véritable ami du groupe et un artiste hors pair. Il arrive très facilement à interpréter les thèmes que nous souhaitions aborder. De plus, il a cette faculté de faire véhiculer une quantité d’atmosphères différentes. Sur la couverture, on voit cette image qui laisse présager un monde assez mystérieux, et chacun y trouvera sa propre signification. A l’intérieur du livret, on trouve des photos de David Kreb, mais aussi des objets tirés de chacune des chansons qui sont disséminés ça et là au détour d’une page. Quand on regarde le livret, c’est une véritable expérience, et chaque coup d’œil révèle un détail supplémentaire, comme dans un film qu’on regarde plusieurs fois.

« Dystopies » est sorti en CD bien sûr mais aussi en vinyle. Est-ce une chance de pouvoir le décliner sous plusieurs formats et quel est selon toi le support le plus approprié à l’écoute d’ANTECHAOS ?
Laurent : Dans notre monde actuel, le numérique est un incontournable. Tout le monde n’a pas un lecteur CD, ou une platine, et malheureusement la musique ne se consomme plus de la même manière qu’il y a 10 ans. Moi-même, et j’en suis attristé, je ne peux plus écouter de CD dans ma propre voiture. (rires) Je pense que la meilleure qualité d’écoute se fait sur vinyle, où on ressent parfois les craquements du disque sur le diamant. Une vraie saveur particulière. Je dirais que chaque support à sa praticité, et aura une couleur différente. Aussi, je vous invite à vous procurer, la version numérique, le CD et le vinyle pour faire le comparatif (rires)
Nico : ​Il a fallu batailler pour que tout le monde accepte de presser des vinyles. Pour moi ça a toujours été un objectif pour le groupe car la demande actuelle est forte. L’objet "Vinyle" revient en force en complément du digital naturellement.

J’ai vu que vous aviez déjà des concerts prévus en cette fin d’année. Vous avez hâte de vous produire devant votre public et présenter à vos fans les nouvelles compositions ?
Laurent : Notre set-list est à 90% renouvelée. Nous avons pu tester quelques nouvelles chansons au cours de cette année durant les concerts, et elles ont eu un effet incroyable sur le public. Nous considérons que cet album traduit une vraie affirmation de style ANTECHAOS, avec un son et une marque de fabrique bien identifiés. L’année s’annonce riche en concerts et festivals. Nous avons hâte de reprendre la route.

On vous souhaite le meilleur à venir ?
Laurent : Tout d’abord, Aude, je tiens à te remercier pour ton soutien, ainsi que toute l’équipe de HARD FORCE qui nous suit depuis le début du groupe. J’invite tout le monde à venir nous découvrir sur Facebook, YouTube, et nos autres réseaux sociaux. A très bientôt en concert ou ailleurs
Nico : Merci beaucoup à toi Aude ainsi qu’à toute l’équipe qui est très disponible et d’un grand soutien pour des groupes comme le nôtre. Soutenez les groupes locaux, les groupes indépendants en écoutant et en partageant leur musique. L’argent n’achète pas tout !

Blogger : Aude Paquot
Au sujet de l'auteur
Aude Paquot
Aude Paquot est une fervente adepte du metal depuis le début des années 90, lorsqu'elle était encore... très jeune. Tout a commencé avec BON JOVI, SKID ROW, PEARL JAM ou encore DEF LEPPARD, groupes largement plébiscités par ses amis de l'époque. La découverte s'est rapidement faite passion et ses goûts se sont diversifiés grâce à la presse écrite et déjà HARD FORCE, magazine auquel elle s'abonne afin de ne manquer aucune nouvelle fraîche. SLAYER, METALLICA, GUNS 'N' ROSES, SEPULTURA deviendront alors sa bande son quotidienne, à demeure dans le walkman et imprimés sur le sac d'école. Les concerts s'enchaînent puis les festivals, ses goûts évoluent et c'est sur le metal plus extrême, que se porte son dévolu vers les années 2000 pendant lesquelles elle décide de publier son propre fanzine devenu ensuite The Summoning Webzine. Intégrée à l'équipe d'HARD FORCE en 2017, elle continue donc de soutenir avec plaisir, force et fierté la scène metal en tout genre.
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