Initié par le guitariste Markus Vanhala (INSOMNIUM, OMNIUM GATHERUM, I AM THE NIGHT), CEMETERY SKYLINE est un projet des plus réjouissants. Réunissant autour de lui le claviériste Santeri Kallio (AMORPHIS), le bassiste Victor Brandt (DIMMU BORGIR, WITCHERY, ex-ENTOMBED/ENTOMBED A.D., ex-FIRESPAWN), le batteur Vesa Ranta (SENTENCED, THE ABBEY) et l’infatigable et génial chanteur Mikael Stanne (DARK TRANQUILLITY, THE HALO EFFECT, GRAND CADAVER...), Markus a enfin pu donner vie à la musique orientée dark-gothique qu’il avait en tête depuis un moment. Le supergroupe ainsi formé accouche donc de son premier disque, le bien-nommé « Nordic Gothic », où l’on peut entendre le frontman de DARK TRANQUILLITY chanter en voix claire exclusivement, pour la première fois de sa longue carrière.
La touche scandinave est bien présente avec cette mélodicité incomparable, et cette mélancolie sous-jacente inhérente à tous les groupes venus du grand froid. Mais avant toute chose, on se délecte du groove dansant qui insuffle son énergie tout au long de l’album. Avec des claviers omniprésents, on est effectivement projetés dans les sons gothiques/dark wave typiques des années 80, mais avec une approche plus moderne et très dynamique ("Torn Away", "Violent Storm", "Behind The Lie", "In Darkness"...). En effet, la première moitié de l’album donne une furieuse envie de se remuer le popotin sur le dancefloor, mais ce n’est pas pour autant que les thèmes abordés sont guillerets. "Nordic Touch" oblige, la tristesse et le spleen recouvrent le tout d’une brume en clair-obscur, comme le montre si bien la pochette de l’album. Clairement articulé en deux parties, autour de la ballade poignante "When Silence Speaks", « Nordic Gothic » offre une première facette ultra punchy, avec les refrains qui tuent (le génial "In Darkness", immédiatement mémorisable, "Behind The Lie"...) et le solo de guitare qui butte ("In Darkness", encore une fois).
Les tempos ralentissent et se font plus lourds sur la suite de l’album, amenant l’auditeur à une introspection ouatée, tel un papillon (de nuit) qui cherche les coins les plus ombres pour fuir la lumière ("Never Look Back"). Un cocon de mélancolie nous enveloppe à l’écoute de son refrain prenant : « What was here is gone forever / No one asked and no one cared enough / To figure out why / And find the answers inside / We never looked back » (« Ce qui était ici est parti pour toujours / Personne n'a demandé et personne ne s'est soucié assez / Pour comprendre pourquoi / Et trouver les réponses à l'intérieur / Nous n'avons jamais regardé en arrière. »)
La belle ligne de basse en intro de "The Coldest Heart" offre aussi une ambiance bien plombée, relevée par des chœurs fantomatiques, des notes de piano délicates et deux soli de guitare courts mais efficaces. Car si les claviers prédominent, il ne faut pas négliger le soutien indéniable des guitares et de la section rythmique qui donnent de la consistance aux compositions. Mais celui qui brille particulièrement sur cet album, c’est bien Mikael Stanne, royal de bout en bout, avec sa voix chaude, profonde (on croirait presque entendre Nick Holmes de PARADISE LOST sur "Torn Away") et pleine de sensibilité ("Anomalie"). A ce titre, il est certain que quelques moments évoquent fortement certaines de ses parties vocales ("Alone Together") avec DARK TRANQUILLITY, tant sa voix est reconnaissable entre mille, mais cela ne gêne en point l’écoute de ce premier album, car la musique, elle, est bien différente de tout ce que le frontman a pu faire précédemment.
En clair, si vous n’avez pas encore craqué sur CEMETERY SKYLINE, cela ne saurait tarder, surtout si vous aimez ressentir un flot d’émotions à l’écoute de belles mélodies et si vous êtes sensible à l’inimitable talent des musiciens de la péninsule Scandinave pour nous balader entre clarté et noirceur, entre joie intense et infinie tristesse. Et on espère sincèrement que ce « Nordic Gothic » n’est que le début d’une longue liste d’albums à venir tant ce projet nous semble prometteur.