
Pour son troisième album, le trio parisien HOWARD choisit de rompre avec le style de ses précédents albums. Si le groupe utilisait un ensemble d’instruments classiques pour un groupe de fuzz-rock (guitare, basse, batterie, orgue Hammond), ce nouvel album fait la part belle aux synthés et sonorités électroniques qui portent un message aussi intense que les rythmes techno : le coming-out non-binaire de Jimbo Canoville qui assure le chant et les parties de guitare. Ni homme ni femme, l’identité de genre de Jimbo est amenée à évoluer au gré de la fluidité de ses ressentis, sans adhérer complètement à un genre en particulier. C’est l’exploration de ces ressentis et de cette fluidité que le groupe nous donne à entendre sur cet album puissant, engagé, émouvant et nécessaire.
Le motif des oscillations est la principale clef de lecture de l’album. Il représente l’instabilité de la santé mentale de nombreuses personnes queer en quête de réponses, mais aussi la richesse de leurs émotions et de leurs questionnements. Sont abordés la dépression, dans "Black Tongue" où il en est question comme d’un voile noir recouvrant les yeux, la volonté d’aller de l’avant malgré les difficultés criée dans le titre "Keep Running", la solitude avec "Lighthouses" sur lequel le duo voix-guitare acoustique apporte un temps de douceur. Entre ces sujets difficiles, des îlots instrumentaux représentent une autre facette de la quête de réponses : le son devient un terrain propice à l’introspection, l’orgue et les synthés de Raphaël Jeandenand deviennent une nappe sonore sur laquelle navigue la réflexion à laquelle on se livre.
Toujours sous le signe de l’exploration, que celle-ci soit intérieure ou musicale, les titres "Daydreaming" et "Myself" sont particulièrement révélateur du chemin parcouru par le groupe. Aux instruments déjà cités, la batterie de Tom Karren offre une base solide pour déployer la nouvelle musicalité du trio. Encore une fois, les synthés sont à l’honneur mais pour un ensemble de morceaux qu’on a clairement envie d’entendre en rave ou en soirée techno. Le spoken-word de "Myself" pose les bases de cette nouvelle identité et marque la volonté du groupe de se tourner vers de nouveaux styles qui lui vont tout aussi bien que le fuzz-rock. L’ensemble formé par les deux morceaux permet de mettre des mots sur les changements, mais aussi de leur associer des musiques. Pour parfaire la célébration de l’évolution que représente cet album, le groupe a choisi de le partager au public lors d’une listening-party au Dr. Feelgood Rocket à Paris le jeudi 27 mars, quelques heures avant sa sortie officielle. Une très belle façon de fêter la richesse des identités et de la musique.