
Il y a des concerts qui restent dans les mémoires. Si le retour discuté de LINKIN PARK anime toutes les conversations depuis maintenant un an, celui qu’a donné le groupe désormais mené par Emily Armstrong rentre dans cette catégorie. Accompagné de JPEGMAFIA et ONE OK ROCK, le groupe états-unien a amené tous ses riffs et une cargaison de bonbons pour des fans dont le retour en adolescence fut total le temps d’une soirée. Résumé d’un concert d’anthologie !
Nous ne nous attarderons pas sur l’enfer des transports en commun pour rejoindre le Stade de France un soir de concert, mais à mesure que les métros bondés nous passent devant, la frustration monte : JPEGMAFIA commence déjà son set alors que nous ne sommes pas encore à Saint-Denis ! Un petit sprint et une rapide fouille plus tard, nous arrivons tout juste à temps pour en voir le dernier morceau, le très calme "Either On Or Off The Drugs" qui, par son côté jazz et le flow posé mais rapide du rappeur vêtu de noir, nous fait vite regretter de ne pas être arrivés bien plus tôt. JPEGMAFIA sort donc de scène en annonçant que nous venons d’écouter du rap expérimental, ce à quoi le public réagit par une acclamation mesurée, mais sincère. La prochaine fois, on ne loupera pas JPEGMAFIA !

Après un bref interlude suffisant pour attraper l’une des trop rares boissons fraîches sans alcool présentes dans le stade en plein cagnard, nous nous remettons en place pour le set de ONE OK ROCK. Deux ans après sa venue remarquée en ces lieux en première partie de MUSE, le quartette venu de Tokyo a durci le ton avec son album « Detox » sorti il y a quelques mois. Produit avec Dan Lancaster, Rob Cavallo et Dai Dai de PALEDUSK (je vous laisse aller jeter un œil à leurs CV respectifs), l’album se concentre sur le côté plus rock voire metal de leur son. C’est donc cette facette de leur musique que l’on voit majoritairement ce soir. Il faut maintenant que je vous avoue une chose : bien que j’aie écouté l’album en amont et que j’aie déjà vu ONE OK ROCK, je ne m’attendais pas à un tel déferlement d’énergie.
Le set, composé aux deux tiers de titres de « Detox », voit le chanteur Takahiro Moriuchi se déchaîner, sprinter sur la longue avancée de scène et sauter partout pendant que le groupe enchaîne les riffs comme si toute sa discographie (pourtant habituellement plus soft) avait toujours été aussi heavy ! Le public, visiblement aussi surpris que moi, abonde d’ovations et la magie opère. Sur "C.U.R.I.O.S.I.T.Y." (entre autres), le stade hurle à pleins poumons avec les Japonais, Colin Brittain de LINKIN PARK rejoint même le groupe sur "We Are" et les 80 000 Français qui sortent de ce set n’ont qu’une phrase à la bouche : « C’était trop court » ! Rendez-vous le 8 octobre au Zénith de Nantes, le 10 octobre à Paris, l’Accor Arena, et le 11 octobre au Zénith de Strasbourg pour découvrir plus en profondeur ce groupe qui fête cette année ses vingt ans de carrière !

C’est devant une foule fébrile que le compte à rebours de LINKIN PARK approche de zéro, accompagné tour à tour par la bande son de la série Emily In Paris (plutôt bien adaptée à la soirée), puis par le générique du dessin animé Caillou (on comprend moins, mais soit). Soudain, celui-ci atteint zéro et l’intro déjà révélée à la Défense Arena huit mois plus tôt retentit. Les membres du groupe entrent en scène tour à tour, puis Emily Armstrong et Mike Shinoda déboulent pour "Somewhere I Belong" suivi de près par "Crawling", deux titres qui mettent les choses au clair : le groupe est fier de son héritage et des chansons auparavant portées par Chester Bennington. Mais il est aussi très fier du nouvel album « From Zero » dont le premier extrait, "Up From The Bottom" est déjà bien connu des fans, quelques mois seulement après sa sortie. "Lying From You" prend la suite et le public hurle tant et si bien le prénom d’Emily Armstrong que Mike Shinoda se voit contraint d’annuler son petit discours avant de lancer "The Emptiness Machine". Paris 1, discours 0 !
Divisé en "actes", le concert compte en réalité quelques instants de pause de temps en temps afin de reposer les voix des deux chanteurs, mais aussi pour calmer le public visiblement très excité par les magnifiques lunettes de Joe Hahn que les membres du groupe se font passer tout au long du set (on veut les mêmes). Les hits s’enchaînent mais les surprises aussi, et après l’avoir boudé au Hellfest quelques semaines plus tôt, Mike entonne à nouveau "When They Come For Me", mon morceau préféré de l’album « A Thousand Suns ». Également au rayon des surprises, le groupe joue "Stained", pourtant un des morceaux les moins cités par les fans (mais néanmoins très cool en live), le puissant "Casualty", que l’on n’attendait pas forcément, mais aussi "Castle Of Glass" qui vient ENFIN faire écho à tout le teasing de cette chanson, quasi systématiquement présente entre les "actes".

Le public aussi est acteur de ce show ! De la timide fan venue sûrement aux aurores qui reçoit une casquette signée par tout le groupe aux warriors présents dans les nombreux mosh-pits qui éclosent çà et là, les fans français font honneur à leur groupe préféré ! On aperçoit de nombreuses pancartes parfois drôles comme le « DON’T stop yelling at me », en référence à "Two Faced", ou les nombreuses références à Emily In Paris, mais aussi parfois surprenantes. En effet, l’une d’elles proposait à Mike Shinoda de choisir entre deux possibilités, menant ce dernier vers un cul de sac : « dessine-moi un tatouage » ! Un peu gêné, Mike dessine donc un chat assez approximatif pendant qu’Emily chante une version non moins approximative de "Immigrant Song" de LED ZEPPELIN. Les aléas du direct !
Au niveau de la performance, si le Hellfest en a laissé certains sur leur faim, LINKIN PARK est irréprochable ce soir ! Chacun se donne à fond pendant près de deux heures, et c’est avec un grand sourire qu’on imagine Chester Bennington chanter à leurs côtés sur les couplets de "Numb" et "In The End" qu’Emily laisse au public. Cette dernière nous offre également une magnifique version de "Lost", d’abord acoustique puis électrique, se réappropriant la B-side de « Meteora » révélée en 2023. Elle fait également trembler les gradins en compagnie de Taka de ONE OK ROCK lors de "One Step Closer" (sur lequel Taka surprend par sa similarité vocale avec Chester), puis de nouveau sur son single heavy à elle, "Heavy Is The Crown".

Un concert en plein air, c’est un numéro d’équilibriste. Avec de nombreux paramètres comme la météo, la santé, la fatigue du public, la qualité du matériel, les potentiels problèmes techniques ou encore l’actualité, beaucoup de choses peuvent mal tourner. Et il faut le dire, LINKIN PARK a excellé à trouver cet équilibre parfait, entre puissance et mélodie, entre nouveau et ancien, entre proximité et spectaculaire. C’est donc en nous levant et en applaudissant haut au-dessus de nos têtes que nous saluons l’un des groupes de notre adolescence, devenu l’un des groupes de notre trentaine, et peut-être le plus grand groupe du monde le temps d’une soirée. Ce concert restera dans les mémoires et les images d’Emily Armstrong coiffée d’un béret avec un drapeau français sur les épaules, d’un Mike Shinoda plus souriant que jamais, d’un Phoenix porté par Colin Brittain, d’un Brad Delson visiblement ému et des lunettes de soleil légendaires de Joe Hahn (sérieusement, on veut les mêmes) resteront gravées dans nos mémoires pendant longtemps ! Alors, on vous retrouve à Lyon le 16 juin 2026 ?
Portfolio par Lilian Ginet

Linkin Park © Lilian Ginet | HARD FORCE