
Valeur montante du death metal mélodique et moderne que nous observons de près depuis quelques années, ORBIT CULTURE a effectué, en douze ans d’existence, un parcours qui force l’admiration, notamment en tournant avec TRIVIUM, SLIPKNOT ou encore BULLET FOR MY VALENTINE et IN FLAMES. Aujourd’hui, le groupe revient avec « Death Above Life », un album allant encore plus loin dans le mélange du death metal et des sonorités modernes. Cet album lui ouvre les portes du Bataclan à Paris et du Splendid à Lille, cette fois en tête d’affiche. Nous avons pu nous entretenir avec le frontman Niklas Karlsson afin qu’il nous détaille sa vision du présent et de l’avenir du groupe suédois.
Vous avez sorti début octobre « Death Above Life » et avez déjà un peu entamé cette nouvelle ère du groupe avec la sortie de singles. Comment vois-tu cette nouvelle étape dans la carrière d’ORBIT CULTURE ?
Tout sera amplifié, c’est sûr ! En fait, ça me semble beaucoup plus énorme. C’est le plus gros projet qu’on ait mené à ce jour, tant au niveau du son sur l’album qu’au niveau du reste et de la façon dont tout a été planifié. Tout nous semble beaucoup plus gros et on sent qu’on a beaucoup plus de responsabilités. C’est en tout cas une période qui nous rend enthousiastes !
Vous avez déclaré que cet album était un nouveau départ pour le groupe. Qu’est-ce qui en fait un nouveau départ et en quoi était-ce le moment parfait pour faire ce changement ?
Je pense que l’album lui-même est un peu plus moderne que les précédents. Quand on parle d’ORBIT CULTURE et de ce qu’on a fait par le passé, je pense que cette renaissance vient du fait qu’on a joué toutes ces tournées en première partie au fil des ans. C’était génial, mais on préparait un peu le terrain pour être tête d’affiche un jour. Maintenant qu’on a cet album et cette grande tournée européenne avec GAEREA et ATLAS qui approche, on réalise à quel point on a travaillé pour arriver à ce moment de notre carrière... Mais, d’une certaine manière, ça ne fait que commencer ! On est très sérieux quand on parle de tout ça. On l’était déjà au début, mais maintenant, on change totalement de catégorie.
C’est vrai que quand vous avez joué avec TRIVIUM et BULLET FOR MY VALENTINE il y a quelques mois au Zénith de Paris, on n’avait pas l’impression de vous voir jouer dans une salle beaucoup trop grande pour vous !
Génial ! On a toujours été assez nerveux à l’idée de jouer en France parce que le public français est généralement un peu passif au début d’un concert. Il faut le convaincre au fil du set, donc on s’attendait à ce que ce soit un peu le cas quand on est entré dans cette salle. Mais le public nous a pris complètement à revers et c’était un des meilleurs publics de toute la tournée !

Pour revenir à l’album, j’ai l’impression que vous essayez de toujours ajouter de nouveaux éléments. Sur celui-ci, on ressent beaucoup l’influence de SLIPKNOT et on peut complètement deviner vos influences, notamment METALLICA, mais les éléments que vous ajoutez font que l’on reconnaît assez vite votre style. Comment retravaillez-vous à partir de vos influences pour créer un son qui soit 100% celui d’ORBIT CULTURE ?
C’est comme ça qu’on a commencé et on n’a pas honte de nos influences. Mais je pense qu’on s’est habitué à incorporer des choses différentes à notre musique. Si on entend quelque chose qu’on aime et qu’on veut le même genre d’effet, on le fait. On ne réfléchit pas trop quand on crée de la musique. On est vraiment dans l’instant présent et on fait ce qui sonne bien sur le moment. Je pense que c’est pour ça que ces inspirations se voient autant.
Vous avez grandi dans une petite ville, loin d’une véritable scène locale et de ce genre d’émulation collective. Vous avez tout créé vous-mêmes pendant des années, vous le faites encore et on peut constater votre progression et votre apprentissage au fil des albums. Qu’avez-vous appris pour celui-ci ?
Je pense qu’en termes d’écriture, c’est toujours plus ou moins le même processus. On fait des riffs devant un ordinateur jusqu’à ce que quelque chose fonctionne. Mais on n’a que vingt-quatre heures par jour pour travailler dessus, donc on a dû inviter d’autres personnes à travailler sur l’album avec nous. À l’époque, on faisait toutes les vidéos nous-mêmes, ainsi que le mixage, mais sur cet album... Je ne dirai pas que c’est le premier sur lequel on a engagé un ingénieur du son pour le mixage, parce que pour notre premier album, on avait engagé Klas Blomgren. Pour celui-ci, on a travaillé avec Buster Odeholm de HUMANITY'S LAST BREATH pour cette tâche. C’est une décision qui est venue du fait qu’on adore son travail depuis des années. Quand je faisais le mixage moi-même, j’ai toujours voulu imiter certains de ses sons, que ce soit sur une caisse claire ou sur une guitare par-ci par-là, en essayant de le faire correspondre à ORBIT CULTURE et pas à HUMANITY'S LAST BREATH. Mais comme je le disais, on n’a que vingt-quatre heures par jour et il fallait aussi qu’on puisse jouer de la musique ! Donc on a commencé à déléguer les responsabilités pour les vidéos, le mixage, etc. On avait pleinement confiance en ces gens, notamment les gars de Riivata Visuals qui viennent de Finlande et réalisent presque tous nos clips ces derniers temps. Mais on veut évidemment garder le contrôle sur tout de toute façon (rire) ! Donc j’imagine qu’on remue un peu le tout parfois, mais après avoir tout fait nous-mêmes pendant des années, on tient beaucoup à garder le contrôle.
Et comment avez-vous ressenti les choses en confiant votre bébé à quelqu’un d’autre ?
Je dirais que j’ai toujours été assez protecteur avec la musique parce que c’est difficile de changer de direction quand notre vision est si claire. Mais dans ce sens, j’avais préparé et organisé les fichiers source comme je le voulais. Je voulais que Buster n’ait qu’à mixer et masteriser le tout plutôt que de produire l’album. Je lui ai donc envoyé les fichiers et il a fait ce qu’il fait de mieux avec le son. Mais si ça avait été quelqu’un d’autre que Buster, j’aurais eu beaucoup plus de mal à travailler de cette façon. Mais comme j’observe le travail de Buster depuis des années, c’était un peu comme de confier un enfant à son parrain (rire) !

Pour parler des morceaux directement, j’ai été très marqué par "Bloodhound" qui est justement celui qui rappelle le premier album de SLIPKNOT. Quelle est l’astuce pour faire sonner un morceau comme une brique qu’on reçoit en pleine figure (rire) ? Le morceau semble presque simple, mais en même temps, c’est l’un des plus efficaces que j’ai entendus cette année avec ce type d’énergie !
Je pense qu’on a tendance à garder une forme de simplicité dans tout ce qu’on fait, surtout avec des chansons comme celle-ci. On a fait des chansons similaires par le passé, dans lesquelles il y a un riff saccadé avec des pauses courtes et un rythme simple en 4x4. C’est quelque chose qui se fait dans la musique depuis… Eh bien depuis le début de la musique ! C’est très simple mais, selon moi, ça frappe exactement là où il faut. C’est ce que j’ai toujours aimé dans la musique. Je crois qu’ un riff comme ça, c’est la première chose que je trouve quand je crée. J’ai toujours voulu écrire un single comme "Surfacing" de SLIPKNOT, mais j’ai aussi toujours voulu faire un peu comme "99" de THE HAUNTED, ou encore un riff à la "Raining Blood". Je suis toujours à fond pour faire des choses comme ça. Mais quand des riffs primaux comme ça se mélangent à la production de Buster, je trouve que ça frappe beaucoup plus fort !
Une autre chanson qui ressort est évidemment "The Path I Walk", une ballade très vulnérable. Certaines notes font penser au thème de « Inception » composé par Hans Zimmer !
À vrai dire, ça a commencé un peu comme ça ! La version instrumentale de cette chanson a été écrite il y a quelques années et je la travaillais dans ce genre d’ambiance. Il y a vraiment du Hans Zimmer dans celle-là !
Qu’est-ce que ce morceau représente pour toi ?
C’est peut-être un choix bizarre parce qu’elle est sur un album de metal, mais c’est ma préférée parce qu’elle est très différente. Les paroles sont très brutes mais sont renforcées par cette énorme bande son de film, et je trouvais ça très unique pour nous de faire ça. Surtout parce qu’on pourrait s’attendre à un twist à la "One" de METALLICA et qu’on parte sur un passage metal surpuissant, mais on a décidé d’en faire cette énorme berceuse cinématique, un peu comme une outro de l’album. Et je pense qu’avec les paroles sombres et sincères, ça en fait ma préférée.
Tout l’album est très chirurgical, mais sur celle-ci, tu autorises ta voix à dérailler par moments…
Oui, c’est au cœur de tout ça. J’ai réenregistré ma voix de nombreuses fois pour ça et certaines prises étaient vraiment meilleures au niveau de la justesse. Mais il n’y avait pas autant d’émotion dans ces prises, donc j’ai permis à ma voix de fluctuer un petit peu et l’émotion y est. Je crois que l’émotion était plus importante pour moi que la justesse de ma voix.
Comment te mets-tu en conditions mentalement pour ce genre de prises de voix ?
C’était difficile. Parce que quand je m’apprêtais à enregistrer toutes les voix pendant environ une semaine, je pensais pouvoir faire tout ça en même temps : le growl, le scream, et chanter plus calmement. Mais je suis vite revenu à la réalité et j’ai gardé ces parties plus calmes pour la fin. Je pensais qu’en hurlant pendant quelques semaines, ça ajouterait un côté rauque à ma voix, notamment dans mon registre grave, et que ça ajouterait quelque chose à la ballade. Je pense que ça a plutôt bien tourné, mais c’était difficile d’arriver à ajouter une sorte de grain à mes cordes vocales.
Le clip de "The Tales Of War" est très impactant, avec une palette de couleurs distincte, et celui de "Hydra" a les couleurs opposées mais reste cohérente avec la première. Quel est votre processus de création pour les visuels, et quel est votre brief pour que les prestataires avec qui vous travaillez comprennent totalement votre univers ?
Je pense que comme "The Tales Of War" est le premier single, je voulais qu’il donne le ton général de l’album. Et comme l’album et sa couverture ont des nuances de bleu très sombres, je dirais qu’il s’agit de la palette de couleurs de cet album. Mais quand on écoute "Hydra", on a cette impression qui rappelle un peu "Dune". Donc on est parti de là. Tant qu’on gardait la cohérence suffisante pour avoir l’impression qu’on est dans le même univers, ce n’était pas si dur. Les couleurs vont ensemble et elles n’avaient pas tant d’importance parce que ça semblait déjà être lié avec l’autre vidéo parce que le montage de Riivata Visuals était super et ils ont aussi fait la vidéo de "The Tales Of War". Pour ce qui est du brief, je pense que ça leur vient naturellement parce qu’ils réalisent ce style de vidéos régulièrement et ils en font aussi le montage. Ils n’avaient pas fait le tournage de "Hydra" parce qu’il a été tourné dans un désert près de Los Angeles. Une fois ce tournage fini, on leur a envoyé les fichiers pour qu’ils fassent le montage et lient les visuels aux autres singles.

Quelle chanson de l’album correspondrait le mieux à ton humeur aujourd’hui ?
Je suis plein d’énergie et je ne suis pas en colère, sinon ce serait "Bloodhound". Mais comme je suis de bonne humeur, je dirais "The Storm" : elle donne de l’énergie et il va bientôt y avoir une tempête... Pour nous, ça sera une bonne tempête ! Une fois qu’on aura sorti l’album, on va faire des sessions d’autographes un peu partout. J’ai hâte, ça va être une très bonne tempête !
Est-ce que le fait d’avoir signé avec Century Media Records vous a aidés pour ce genre de choses ?
Oui, ils ont été au rendez-vous ! L’album n’est pas encore sorti mais on sent déjà que c’est très différent de nos autres albums. Depuis le jour où on a signé chez eux, on a l’impression que tout est plus grand. On ne nous avait pas menti, c’est réel ! C’est super cool ! On est très heureux d’être à la place qu’on occupe actuellement.
Vous allez bientôt jouer deux concerts en France. Qu’attends-tu de ces concerts au Bataclan (Paris) et au Splendid (Lille) ?
Après le concert qu’on a joué avec BULLET FOR MY VALENTINE et TRIVIUM, je m’attends à ce que Paris et Lille soient les meilleurs concerts de la tournée ! J’espère que le public français en sera conscient, qu’il va chanter avec nous et devenir complètement fou !
Comme tu le disais, vous avez ouvert pour de nombreux groupes. Comment gardez-vous cet esprit "DIY" maintenant que vous êtes en train de travailler sur votre première tournée en tant que tête d’affiche ? Est-ce que tu gardes l’œil sur tout ?
C’est effectivement le cas (rire) ! C’est à la fois une bonne chose et une mauvaise chose. Une bonne chose parce que là où d’autres groupes délégueraient toute la partie emmerdante à des gens qui ne feraient que ça, que ce soit la comptabilité, les réservations d’hôtel, pour que tout fonctionne, moi, je veux aussi avoir l’œil sur tout ça. J’ai besoin de tout contrôler ! Mais c’est bien parce que c’est beaucoup plus facile d’anticiper. Si ce n’était pas comme ça, ce serait beaucoup plus dur pour nous de savoir quoi faire pour la suite, surtout à notre époque où les groupes font la plupart des choses eux-mêmes, il faut être capable de s’adapter. On n’est plus dans les années 80 !
Pour ma dernière question, j’aimerais te rappeler un petit souvenir : en 2023, juste après le fiasco des Metal Days (dont la dernière journée avait été annulée pour cause d’inondations, forçant les autorités à évacuer les festivalier.e.s et les groupes et à les loger tant bien que mal, notamment dans un gymnase à proximité - ndlr), vous aviez joué dans un bar en Slovénie. Est-ce que tu peux nous raconter ta version de cette anecdote ?
C’était une journée vraiment folle. On est venu en avion et on a dormi à l’hôtel. On avait passé une très bonne première nuit. En plus, IN FLAMES était dans le même hôtel donc on a passé du temps avec le groupe ce premier soir. On s’est réveillé et on devait aller au festival à dix heures du matin, mais il avait plu toute la nuit et ça n’arrêtait pas. On a donc passé pas mal d’appels à l’organisation du festival, puis on a appris qu’il était annulé. On a donc commencé à boire des coups parce qu’on était en vacances en Slovénie tous ensemble (rire) ! On a bu pendant quelques heures, puis on s’est dit : « Peut-être qu’on devrait quand même faire un concert pour les gens qui sont bloqués actuellement ». On a trouvé un magasin de musique à côté de l’hôtel et on a demandé si on pouvait avoir un système son, etc. Ils ont dit non, mais ils se sont ravisés quand on est sorti du magasin. Ils ont appelé des potes et soudain, on a eu tout le matériel dont on avait besoin pour faire le concert. Mais il faut garder en tête qu’on était plutôt bourrés à ce moment-là. Il était environ 14h et on avait bu toute la journée. Donc on est allé dans cette salle proche d’un gymnase et il se trouve qu’il y avait un bar dans le même bâtiment. Je crois qu’on a fait jouer un groupe avant nous... Désolé, c’était un peu flou à ce moment-là (rire) ! Puis on a commencé à jouer. Il y avait beaucoup de monde donc on a jeté tout le merch au public ! Les gens étaient coincés là donc on s’est dit qu’on pourrait au moins leur jouer de la musique et leur donner un t-shirt ou deux. C’était le chaos complet ! Quand on s’est réveillé le lendemain, je me suis rendu compte que l’ordinateur que je garde toujours avec moi nétait plus là ! J’ai demandé à nos roadies pourquoi l’ordinateur n’était plus là et ils m’ont dit qu’il était dans une autre pièce. J’ai demandé pourquoi et ils ont répondu : « Bah on a joué un concert hier » ! Et je me suis dit : « Oh, merde ! » (rire) Après ça, les autorités ont commencé à bloquer les routes donc on a eu du mal à aller à l’aéroport, mais on a finalement réussi à arriver dix minutes avant l’heure limite et ça nous a donné de beaux souvenirs d’un moment très spécial ! Merci de me l’avoir rappelé !

