16 novembre 2019, 23:55

TYRANT FEST 2019

@ Oignies (Jour 1)

Quatrième du nom, le Tyrant Fest 2019 a une nouvelle fois offert, dans le cadre idéal du site 9-9 bis de Oignies – ancien puits minier où trône encore, majestueux, un chevalet – un week-end riche et varié. Outre les concerts, orientés black et death, des expositions, des conférences et même des randonnées étaient programmées par des organisateurs d’une rare efficacité. Le sold-out du dimanche était largement mérité !

Samedi, le festival, pour moi, a débuté par BARQUE, dans l’auditorium, petite salle d’une centaine de places, dans laquelle se produisent des groupes de moindre notoriété, mais non de moindre talent. Les Lillois, dont l’album « Pyre Builders » est sorti en début d’année, ont livré un show intense d’une demi-heure. Sur une trame hardcore, avec un chanteur expulsant son chant comme un crachat de haine, avec une batterie au taquet, les titres sont si rageurs qu’ils explosent parfois en un chaos ravageur.

Après un petit tour au bar de l’Annexe et quelques passages, les yeux avides, devant les stands des labels et autres vendeurs de disques, il est temps de se rendre au Métaphone, le cœur vibrant du Tyrant Fest.
AORLHAC – Aurillac, la ville du groupe, en langage occitan – offre un black d’inspiration norvégienne, porté par des riffs intéressants, mélodiques et animés d’un souffle épique, mais pénalisé par des structures de morceaux trop semblables. Si le son est lourd, avec une basse qui prend une place importante, les touches heavy, vaguement médiévales, trop répétitives, finissent par lasser. S’exprimant avec conviction en français, le groupe narre, comme le rappelle le chanteur avant "Saint-Flor, la Cité des Vents", « les histoires les plus sombres du passé ».

Changement d’ambiance ensuite avec PENSEES NOCTURNES, qui oscille entre grand-guignol et rituel, entre angoisse et absurde – mais n’est-ce pas la même chose ? – dès l’inaugural "Paria". Dans un décor de cirque maléfique, de cabaret des horreurs, des erreurs, quand les musiciens deviennent des clowns menaçants, qui font penser au dessin dégénéré du serial killer JW Gacy, les parties calmes et les notes d’un accordéon sinistre évoquent les films d’épouvante. Les cuivres, trompette et tuba, en fanfare décadente, donnent l’impression d’assister au défilé d’une harmonie monstrueuse qui devient une bande furieuse quand les guitares et la batterie imposent le retour du black metal.
Les références sont multiples, les morceaux ne cessent de changer de visage à l’image de "Poil de Lune", qui débute avec le thème des Temps Modernes de Chaplin, glisse vers l’Europe de l’est entre quelques salves explosives. "Deux Bals dans la Tête" alterne blasts et lourdeur. Varehon, chanteur à la voix torturée, des hurlements aux vociférations, et multi-instrumentiste, âme de la horde folle qui l’accompagne, déchaîné, n’hésite pas à traverser la fosse – si calme qu’il finira par lâcher, en fin de concert un « vous êtes bien sages » agacé.

UNDEAD PROPHECIES installe dès son entrée en scène une ambiance morbide dans un décor où règnent pierres tombales, images de statues et un magnifique backdrop d’un vert sinistre évoquant la forêt de Blairwitch. Le chanteur arrive lentement, une lanterne à la main, s’approche de son micro orné d’une faux avant que ne résonne la lourdeur quasi doom de "The Souls I Haunt". Le groupe masqué offre ensuite une démonstration de death classique, dans la lignée du légendaire DEATH, bien sûr, voire d’OBITUARY quand les growls se font inhumains.
La brutalité furieuse est au rendez-vous, jouée avec talent et maîtrise : "I Summon The Demon" est haineux à souhait comme "Unholy Entity" qui clôt le concert... avant que les musiciens, pour la première fois, ne révèlent leur visage ! (Interview)

DOPETHRONE, dans son côté crade et déglingué, à un petit côté DARKTHRONE – dont Julie, chanteuse dreadlockée porte un t-shirt – revendiqué : son dernier album ne s’appelle-t-il pas « Transcanadian Hunger » ? Bien sûr, il s’agit d’une version doom/sludge de la légende norvégienne mais l’atmosphère dégagée est semblable à celle qui émane des disques du duo. Ambiance oppressante, répétitive, accentuée par les incessants mouvements de derviche tourneur de la frontwoman à la voix éraillée ("Planet Meth"). La basse rayonne, hypnotise pour rapprocher ce concert d’une transe traversée de quelques éclats de colère : "Killdozer", conclusion impitoyable, qui voit le guitariste hurler « Détruisez tout ! ». Le public, malgré les premiers pogos de la journée, ne montrent pas un grand enthousiasme... Dommage car DOPETHRONE a brillé… d’une lumière noire, bien sûr.

« Les blessures de l’âme sont immortelles ! », tel sera le leit-motiv, scandé par un frontman autant chanteur que maître de liturgie, du concert de SETH. Le groupe culte du black metal français fête les 20 ans de son album légendaire, « Les Blessures de l’Âme », qui vient de sortir en version live, enregistré aux Feux de Beltrane. Ce disque, pierre angulaire du genre, est joué en intégralité. Le son, quasi-parfait, fait honneur aux claviers et à la voix pour un concert qui se fait rituel. Église maudite en backdrop rougeoyant, chandeliers, autel, couteaux, la cérémonie maudite se déroule au rythme des chansons majestueuses, mélodiques, frénétiques – ah la batterie sur "Hymne au Vampyre, Acte II", morceau admirable, toujours aussi prenant... Les ambiances, entre effroi et passion, se déploient sur la salle où de nombreux spectateurs – disciples ? - vivent intensément ce moment de grâce, hors du temps. Le point d’orgue de cette orgie païenne est l’arrivée d’une nonne, presque nue, que Saint-Vincent recouvre, lentement, de sang.

Bien difficile pour SEPTICFLESH de conclure ensuite la première journée du Tyrant Fest. La magie se dilue au rythme des apostrophes du chanteur, engoncé dans son costume de cuir, qui ne cesse d’interpeler la foule avec des « Eh my friends » et autre « One, two, three, four... ». Le black/death des Grecs, efficaces bien sûr, plaisant, est souvent parasité par les bandes symphoniques qui donnent l’impression de se retrouver dans un peplum bas de gamme. "Prometheus" ou "Persepolis" reste des chansons accrocheuses mais ne parviennent pas à faire décoller un concert assez banal. Dommage...

Jour 2


Blogger : Christophe Grès
Au sujet de l'auteur
Christophe Grès
Christophe a plongé dans l’univers du hard rock et du metal à la fin de l’adolescence, au tout début des années 90, avec Guns N’ Roses, Iron Maiden – des heures passées à écouter "Live after Death", les yeux plongés dans la mythique illustration du disque ! – et Motörhead. Très vite, cette musique devient une passion de plus en plus envahissante… Une multitude de nouveaux groupes a envahi sa vie, d’Obituary à Dark Throne en passant par Loudblast, Immortal, Paradise Lost... Les Grands Anciens – Black Sabbath, Led Zep, Deep Purple… – sont devenus ses références, comme de sages grands-pères, quand de jeunes furieux sont devenus les rejetons turbulents de la famille. Adorant écrire, il a créé et mené le fanzine A Rebours durant quelques années. Collectionneur dans l’âme, il accumule les set-lists, les vinyles, les CDs, les flyers… au grand désarroi de sa compagne, rétive à l’art métallique.
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