Sorti sur le label Ipecac Recordings, ce nouvel album de TOMAHAWK dans le paysage mondial actuel est une excellente surprise à laquelle on ne se serait pas attendus il y a peu. Nous avons affaire ici à un projet initié en 1999 par le chanteur – et créateur du label mentionné ci-dessus – Mike Patton (FAITH NO MORE, MR. BUNGLE, DEAD CROSS et FANTÔMAS, pour ne citer que les groupes majeurs) avec le guitariste Duane Denison (THE JESUS LIZARD) à l’occasion d’une discussion qui s’est avérée fructueuse. Mais TOMAHAWK n’est pas un groupe "prioritaire" pour ses membres, ou qui sort un album par an, non. Alors en 2021, avec ce bordel ambiant, on ne peut pas dire que l’on ne soit pas excité d’écouter des albums, qui plus est lorsque ces derniers sont l’œuvre de formations qui ont acquises le statut de culte de par le pedigree des membres les composant ou de par la raréfaction de leurs parutions discographiques. Et TOMAHAWK n’échappe à aucune de ces deux règles.
Qualifié de "supergroupe" (un terme que j’exècre un peu) en raison des musiciens qui donnent vie à l’entité, outre les deux précités, TOMAHAWK compte également en ses rangs le batteur John Stanier (BATTLES, ex-HELMET) et, depuis 2012, le bassiste Trevor Dunn (MR. BUNGLE, FANTÔMAS et donc compagnon de longue date et de route de Patton). En un peu plus de vingt ans d’existence, le quatuor n’a pourtant sorti "que" cinq albums dont le précédent, « Oddfellows », remonte déjà à 2013. On attribuera principalement cela au fait que son chanteur est un tantinet occupé et sur plusieurs fronts en même temps, en premier lieu FAITH NO MORE qui avait repris son activité en 2015. Voici donc que débarque, après quelques singles qui ont permis d’en avoir un avant-goût, « Tonic Immobility », nous permettant d’apprécier enfin dans son intégralité les 40mn que durent ce disque de 12 titres.
Point de mix cette fois entre beats electro suivis d’explosions de guitares comme on peut en entendre sur "Captain Midnight" (« Mit Gas » de 2003) mais si on ne remonte qu’au précédent « Oddfellows » sur lequel on s’est délecté d’un énorme "Stone Letter" ou "Oddfellows" au clip gentiment barré, le fan n’est en aucun cas déconcerté par ce que l’on entend. Et que l’on attend même. Un mélange de genres qui réunit ici toutes les influences des groupes auxquels appartiennent les membres de la formation, le tout lié à une sauce qui leur est propre bien entendu. Et qu’en attendait-on alors ? Du pur rock ? Il y en a avec "Valentine Shine", "Recoil" ou bien "Dog Eat Dog" décrite par ses compositeurs comme une chanson qui traite « (…) de compétition, d'oppression et d'unité, le tout avec une bonne dose d'humour » selon Dunn avant que Mike Patton ne rajoute, avec un humour qui caractérise bien le personnage que « Les chiens attendent patiemment, docilement l'extinction des humains pour devenir les maîtres du monde. Les chiens au pouvoir ! ». On parlait des styles sinon. Alors, de l’ambient ? Il y en a aussi avec "Doomsday Fatigue" et Eureka", la surannée "Sidewinder" mais aussi "Howlie", bien que celle-ci s’emballe quelque peu à la fin. Du metal ? Oui, on en trouve pour sûr ! "Tattoo Zero" qui voit intervenir au milieu un riff prog’ à la DREAM THEATER. Mais en moins prog’ quand même (« Ceux du fond, suivez s'il vous plait ! »). Sans vouloir faire dans le titre par titre, il est important d’indiquer à l’auditeur où celui-ci va mettre ses oreilles, le groupe prêchant dans différentes chapelles.
Egalement très bien produit, les jouissives parties de basse de Trevor Dunn prédominent dans le mixage (à ce titre, "Fatback" porte bien son nom avec le son de basse le plus... fat de l’album), et se traduisent par un groove et une lourdeur qui se veulent sur la longueur, lancinants. Un véritable atout pour un disque qui ne joue pas la carte de la distorsion à fond et la vitesse d’exécution, hormis "Predators And Scavengers" au riff tachycardique. « Mais c’est une riche idée ça, Rémy ! » s’exclameront les fans belges de TOMAHAWK. C’est sans chichis et fait sans prétention dans la joie et la bonne humeur, les ingrédients sont très bien choisis et les proportions respectés, offrant un produit beau et bon, je vais leur mettre la note de 7,5 (rappel à moi-même : « ‘tain, faut que j’arrête de regarder La Meilleure Boulangerie de France moi… »)