NATURE MORTE est de retour sur les platines à peine trois ans après la sortie de « NM1 » où le post-black metal du groupe parisien faisait des merveilles. Influencé par les deux premiers DEAFHEAVEN, ce style riche en atmosphères dont il régalait les esgourdes sur ce premier album est toujours d’actualité. Mais celui-ci a mûri puisqu’il délaisse en effet sur « Messe Basse » ses aspects les plus sombres pour troquer ses rangers crottées contre une paire de bottines plus légères. Le trio s’enfonce ici dans des territoires qui mêlent post-rock, shoegaze ou metal atmosphérique pour en proposer une relecture très personnelle. Parce qu’entre nous, ces raclements de gorge signés Chris Richard renvoient toujours NATURE MORTE au black metal pendant que la section rythmique, mélodique et chaloupée, contrebalance cette agression et pourra déstabiliser à la première écoute. Un peu comme le Nutella et le beurre sur une tartine de pain frais, les deux composantes semblent sur le papier irréconciliables. Et pourtant, la magie opère au fil des écoutes, la profondeur du chant s’accordant aux riffs et ambiances qui jouent d’avantage sur les nuances que sur l’opposition. Ainsi dès les premières mesures de "Only Shallowness" jusqu’au dernier souffle de "Messe Basse", le voyage proposé par le groupe laisse place aux rythmiques feutrées et aux envolées de guitares mélancoliques. Tout cela touche à tout sans en avoir l'air... mais au final, le résultat reste cohérent.
Le long et classieux "Night’s Silence" illustre d'ailleurs mieux que quiconque cette sorte de nonchalance mêlée de nostalgie qui évoque les premiers efforts d’ALCEST et AMESOEURS ou dans ses moments les plus insondables la force tranquille d'un SHOW ME A DINOSAUR. Un peu de ça, oui, mais tellement plus encore, ces dix minutes où le temps s'étire et prend des allures de voyage introspectif. On s'y trouve perdu quelque part entouré de guitares douillettes, de rythmiques astucieuses et surtout d'ambiances prenantes, le tout se savourant comme un plaisir (non) coupable (cf.beurre et Nutella).
« Messe Basse » est donc un album qui ne peut laisser insensible, pour sûr, et pour lequel un consensus mou est ici impossible à dresser. Tant mieux d’ailleurs. Que ce soit sur la production énorme, véritable pavé dans la tronche, signée Edgar Chevallier, l’artwork surprenant à l’allure très rétro ou les vocalises passées au papier émeri, NATURE MORTE a mis le paquet sur un parti pris fond-forme qui force le respect. C’est son point fort à mon sens mais cela rebutera aussi une partie de son public potentiel qui se tournera peut-être vers des formations plus calibrées. Tant pis pour lui, ça en fera plus pour les autres !
