Bien que l’heure soit indiquée sur les billets (19h), il est difficile comme souvent de savoir si c’est celle de l’ouverture des portes, du début des concerts, voire ni l’une ni l’autre. Nous nous présentons donc à l’heure indiquée en espérant ne rien louper...
Il est donc bien 19h lorsque le groupe de Boston WILDERUN fait son apparition discrètement dans une atmosphère bleutée pour une séance d’accordage avant de se lancer dans un set qui, malgré le titre d’ouverture "O Resolution!", manque de conviction. Malgré quatre albums et plus de 10 ans d'existence, il semble découvrir la scène. Cela n’est pas surprenant si l’on se penche sur son historique où il affiche une seule tournée de quelques dates en 2021. Ce manque de maîtrise se confirme quand le groupe s’y reprendra à trois fois pour débuter le titre suivant, "Identifier". Les quelques dizaines de personnes présentes dans un Splendid bien désert les encouragent toutefois et font l'effet d’être les "Passenger" d’un vaisseau en partance pour une destination incertaine qui ne fait guère rêver ("Far From Where Dreams Unfurl"). Une prestation qui, même si l’ambiance fait penser à OPETH, est globalement décevante. Ce qui est regrettable car l’association du backdrop du dernier album « Epigone » et d'un light-show de qualité permettait au groupe de proposer une prestation honorable.
Il ne faudra pas longtemps aux techniciens pour assurer le changement de plateau. Tout semble être sous contrôle... Quand KATAKLYSM déboule sur scène pour animer l’heure qui vient, il est clair qu’il n’a pas traversé l’Atlantique pour faire du tourisme. Le public montre aussi que les Canadiens sont attendus. D’entrée, la scène est prise d'assaut par cinq excités qui démarre par "Push The Venom" avant "Guillotine" et "Narcissist". Suite à cette démonstration des Québécois, le chanteur Maurizio Iacono s'adresse au public de manière joviale, en français, ce qui permet de créer une relation privilégiée avec lui. Bien plus que le chanteur de KATAKLYSM, il est l'animateur de la soirée. Cette bonne humeur contraste avec la violence de la musique que le groupe exécute avec professionnalisme tout en exploitant superbement la scène. Si le décor est simple, un backdrop de l'album « Unconquered », la batterie au centre avec deux promontoires de chaque côté et un sur le devant de la scène, son association aux lumières permet au dynamisme des musiciens de se sublimer dans une prestation scénique de grande qualité. Si le public est plutôt timide, il va rapidement se lâcher comme sur "Underneath The Scars" pour répondre à l'invitation de Maurizio au pogo...
Cela illustre bien ce côté docteur Jekyll qui se transforme le temps des morceaux en Mr. Hyde, manipulant les esprits ("Manipulator Of Souls") pour mieux régner ("To Reign Again") en dominant l'assistance depuis son piédestal. Alors que la fin de cette prestation approche, avec "At The End Of The World", l'audience glisse inexorablement ("As I Slither") dans une ambiance musicale sombre, comme si les poussières en suspension ("In Shadows & Dust") avaient sur elle un effet d'addiction positive. Comme ensorcelés, le final se termine dans une sorte de messe durant laquelle "The Black Sheep" pourrait transformer la bière en un breuvage sanguinaire qui vous laisserait sur un petit nuage ("Blood In Heaven"). KATAKLYSM vient de frapper fort après un premier concert dans cette salle, 21 ans plus tôt, lors du X-mas Festivals 2002. Si cette belle prestation de nos cousins canadiens a pu étancher notre soif de culture metallique, la soirée est loin d’être terminée. Espérons que SOILWORK saura semer les graines qui permettront de nourrir notre intérêt pour la suite de la soirée...
C’est sur une belle entrée en matière que les musiciens font leur apparition sur scène et interprètent "Övergivenheten", chanson-titre de leur dernier album. Seul groupe de la soirée à défendre son nouvel album, c’est tout naturellement que SOILWORK est la tête d’affiche. Il en jouera d’ailleurs quatre autres au cours de ce set. Et si le plaisir de retrouver les Suédois une nouvelle fois sur les scènes du Nord n’était que momentané ("This Momentary Bliss") ? Avec un light-show soigné, le clavier et la batterie montés sur une estradel dans le fond de la scène, respectivement sur la droite et la gauche, et les autres musiciens devant, ajouté à de nombreuses années d’expérience, le public ne devrait pas se retrouver planté devant une dramatique prestation ("Stabbing The Drama"). Eh bien, sans aller jusque-là, nous allons rapidement découvrir qu’il s'agit en fait d’une sorte de répétition générale...Le groupe manque cruellement d’énergie et reste figé. Chacun à sa place. Seul le guitariste Simon Johansson, garde une liberté de mouvement comme pour assurer la communications entre les membres du groupe. C’en est au point de se demander qui est le petit blagueur qui a mis de la glue sur la scène. SOILWORK semble condamné à une sorte de malédiction, celle de monter chaque soir sur scène ("The Living Infinite I").
Ce manque de conviction est-il dû à la pénombre de la salle dans laquelle un public clairsemé se cache ("Is It In Your Darkness") ? En tout cas, l’invitation au circle-pit est un flop, qui va faire office de fil rouge pour le reste du concert. Pourtant, la prestation ne manque pas d’électricité ("Electric Again"). Il ne fait aucun doute que SOILWORK maîtrise son sujet, mais sans conviction. Ainsi condamné à répéter inlassablement ("The Living Infinite II") le même exercice, tel un forçat prisonnier de ses "Bastard Chain". Il est vrai que malgré quelques personnes qui tentent de mettre l’ambiance dans le public, le Splendid ressemble ce soir à un espace où règnent les ténèbres ("Valleys Of Gloam"). Ne se laissant pas abattre, les six musiciens sont là pour labourer un champ culturel désertique et essayer d’y creuser leur sillon. Ne perdant pas de vue ("The Nurturing Glance") le public clairsemé, le groupe essaie tant bien que mal de récolter son assentiment ("Harvest Spine") avant de quitter la scène. Le groupe fait son retour avec "The Ride Majestic", "Arrival", et au terme d’un concert au relief plutôt léger, enchaîne avec "Nerve" puis termine par "Stålfågel".
SOILWORK avait toute les cartes en main pour assurer la tête d’affiche mais au final, nous avons assisté à la prestation d’un groupe qui n’a pas su, contrairement à KATAKLYSM, laisser de côté sa déception de ne pas avoir incité le public du Nord à se déplacer en nombre... Il est plus de 23h et il est temps de quitter le Splendid après un concert dans l'ensemble réussie musicalement, mais visuellement sans grand intérêt, sauf peut-être pour les inconditionnels du groupe.