15 avril 2023, 23:59

KLONE + HAMASAARI

@ Savigny-Le-Temple (L'Empreinte)

Plus de trois années après un mémorable concert de LEPROUS, avec KLONE en première partie (report ici), nous retrouvons les Poitevins en tête d’affiche, cette fois, dans la jolie salle de L’Empreinte à Savigny-le-Temple, en Seine et Marne. Depuis cette date, on a eu l’occasion de revoir le groupe à maintes reprises, notamment au Trabendo en février dernier (report ), et nous avons pu constater à quel point les artistes proposent à chaque fois une prestation de haute volée, aussi qualitative qu’émotionnelle. C’est donc avec en ligne de mire l’objectif de passer une autre extraordinaire soirée que je n’ai pas hésité à traverser la région parisienne d’ouest en est, en ce samedi 15 avril, afin de pouvoir le relater pour HARD FORCE. Arrivée tôt sur les lieux, je me faufile par les coulisses, et il faut avouer que c’est un privilège inestimable que de pouvoir assister à la balance de KLONE, puis à celle de HAMASAARI, et je mesure pleinement la chance qui est la mienne. Moments de réglages pour les musiciens, mais aussi moments personnels pendant lesquels les artistes montrent un visage différent de ce que l’on a l’habitude de voir : plus drôles, plus détendus, plus faillibles aussi, quand il faut rejouer encore et encore un passage délicat. En un mot comme en cent : plus humains. Ce qui les rend de plus en plus attachants.
Alors que le soleil se couche lentement sur la ville en faisant miroiter les panneaux de verres colorés de la façade de L’Empreinte, illuminant le hall de mille reflets irisés, le public, venu nombreux, peut enfin pénétrer dans la salle, ou flâner au merchandising. Pour notre part, nous filons nous installer au plus près de la scène, afin de pouvoir goûter à cette proximité qui nous est chère. Celle qui permet cet inestimable échange d’énergie et de chaleur humaine à chaque concert...


C’est HAMASAARI que nous avions découvert à Istres (report ici) et dont le premier album, « Ineffable », sorti le 3 mars, nous a fait forte impression (chronique), qui est en charge de l’ouverture de la soirée. Premier constat, le quintet originaire du Mans a gagné encore plus en maturité, en assurance et en cohésion, et si l’on sent que les jeunes pousses vont encore grandir, on a la satisfaction de voir que les racines sont ancrées plus profondément, leur donnant une force de caractère très appréciable. L’album est interprété dans son intégralité, permettant au groupe de présenter toutes les facettes de sa personnalité, en distillant ses ambiances qui naviguent entre légèreté et solidité. On attaque donc avec "Different Time", un morceau qui monte en intensité progressivement pour finir dans un joyeux bordel d’une belle puissance, et la réaction du public ne se fait pas attendre. En effet, HAMASAARI évolue dans un registre progressif pas très éloigné de la tête d’affiche, et l’audience se laisse bien volontiers embarquer. Dès le deuxième morceau, "Crumbs", Jordan Jupin (chant, guitare) envoie valser ses godasses, puis un peu plus tard, c’est au tour des chaussettes, de manière à pouvoir sentir le sol et les vibrations sous les pieds, probablement. Ancrage au sol pour mieux déployer son énergie dans les airs. La section rythmique composée de Jonathan "Joe" Jupin à la basse et d’Élie Chéron à la batterie, assurent une assise précise, stable et forte. Tandis que la guitare d’Axel Vaumoron et les claviers de Sullivane Albertini diffusent mélodies éthérées et riffs d’acier. "White Pinacles" et "Old Memories" font partie des très bons moments, le premier avec son côté brut et violent, le second, à l’opposé, avec ses ambiances acoustiques. Leur sincérité, leur implication et leur générosité fait que, le public de L’Empreinte étant majoritairement composé de fins connaisseurs, les acclamations récoltées par les musiciens de HAMASAARI sont à la hauteur de leur talent et de la très grande qualité de leur prestation de ce soir. Et nous ne pouvons que chaudement recommander de suivre le groupe de près, car il ne fait nul doute qu’il va encore évoluer dans les années à venir.


A peine le temps de tailler la bavette quelques minutes avec les copains photographes, et c’est KLONE qui investit la scène, après un changement de plateau ultra rapide. L’excitation monte de plusieurs crans quand retentit l’intro au saxophone de "Ellusive", premier extrait de la soirée, issu de l’excellent « Meanwhile » paru le 10 février dernier (chronique de l’album à retrouver ici). Tout juste de retour d’une longue tournée européenne en ouverture de Devin Townsend, KLONE nous fait l’honneur d’une dernière date en France avant de s’octroyer une petite pause bien méritée. L’énergie que les musiciens déploient sur scène et les émotions qu’ils distillent nous font oublier le temps, le futur et l’avenir, pour se concentrer sur l’ici et maintenant. Bulle d’amnésie volontaire et salvatrice, pour atteindre cette symbiose, cette union invisible mais palpable entre les artistes et le public, que seuls de rares groupes peuvent nous faire toucher du doigt. Et KLONE est de ceux-là.


Ancrage au sol pour Yann Ligner quand il délivre son chant profond et vibrant avec une implication totale. Ou bien feux follets qui tournoient dans l’atmosphère, comme les deux guitaristes Guillaume Bernard et Aldrick Guadagnino ainsi que le bassiste Enzo Alfano, qui balancent leurs mélodies divines en se jetant à corps perdus dans une chorégraphie débridée. Et enfin, stabilité et rythme métronomique avec Morgan Berthet et sa frappe inimitable, claire, précise et groovy, qui fait trembler les murs et s’infiltre jusque dans les veines, à l’unisson de nos pulsations cardiaques. Ou comment la musique arrive à toucher l’âme et le corps des spectateurs jusqu’à ne faire plus qu’un, tous liés dans le même élan de passion et de partage.
La set-list proposée est la même que celle du Trabendo, à l’exception de "Bystander", que l’on regrette de ne pas avoir entendu ce soir. Ainsi, le groupe alterne chansons aériennes ("Night And Day" et sa superbe ligne de basse, "Sealed", "Keystone", "Immersion", "Nebulous"...) et morceaux plus rugueux ("Rocket Smoke", "Within Reach", "Gone Up In Flames", toujours aussi efficace et groovy en diable, ou encore l’explosion auditive provoquée par la géniale reprise du "Army Of Me" de Björk). Yann parle peu, mais ses prises de paroles sont toujours justes et sincères, car même s’il est réservé, le frontman respire l’humanité, la gentillesse et la sensibilité. Et quelle présence, quelle voix !


Assuré par le fidèle Romain "Makino" Bernat et son oreille infaillible, le son est parfait, tout comme pour le concert de HAMASAARI, diffusant les notes qui emplissent l’espace et entrent en résonnance avec les corps. Le public réagit au quart de tour, autant les enfants (dont ce petit lutin qui profite du concert, assis sur l’avancée de la scène, les yeux écarquillés d’émerveillement), que les adultes, tel le joyeux drille qui crapahute sur scène pendant "Immersion" et s’imagine probablement pouvoir faire du stage-diving. Mais comme personne ne fait mine de rattraper l’intrépide plongeur, il finit par redescendre par ses propres moyens, tout penaud. Grand moment de solitude... Totalement incongru lors d’un concert de KLONE, et cependant particulièrement hilarant.


Lorsque Yann Ligner annonce bientôt la fin du show en introduisant "Silver Gate", on entend maintes protestations : « Ça fait que 10 minutes ! », « Vous n’avez joué que deux morceaux ! », « On commence à peine, là ! »... Effectivement, le temps semble s’être arrêté, et ô combien aimerions-nous rester suspendus au sein de cette parenthèse enchanteresse ! Admirable chanson qui fait monter les larmes aux yeux à chaque fois, "Silver Gate" nous transporte dans son crescendo majestueux, tourbillon d’émotions et de notes mêlées, sur lequel Guillaume, Aldrick, Yann, Enzo et Morgan balancent toute leur énergie pour un final éblouissant. S’en suit un flot d’applaudissements à s’en péter les phalanges, avant que Yann ne nous dise : « On revient dans deux minutes ». Etrange... Car si l’on sait que le groupe va revenir pour le rappel, il n’a pas l’habitude de l’annoncer. Et lorsqu’on les voit revenir sur scène accompagnés de l’excellent batteur, Jelly Cardarelli de DISCONNECTED (bien connu des lecteurs de HARD FORCE) à la place de Morgan Berthet, pour interpréter "Yonder", on se dit que les étoiles sont décidément bien alignées ce soir. Cerise sur le gâteau pour celles et ceux qui n’ont pas pu voir KLONE sur scène lors de la tournée avec Devin Townsend car, en effet, Jelly a dû remplacer Morgan, engagé de son côté avec MYRATH, l’un de ses deux autres groupes principaux. La fine fleur des batteurs français réunis sur la même scène : que demander de plus ? Si leur jeu est différent, les deux apportent une touche unique au groupe, et rayonnent d’un talent exceptionnel, transcendant les chansons comme peu savent le faire. "Yonder" est un morceau merveilleusement beau. Et la parfaite conclusion pour cette soirée magique.

Le public de L’Empreinte ne s’y est pas trompé, réservant une formidable ovation aux six musiciens. Message subliminal (pas si subliminal que ça) : quel regret de ne pas avoir entendu le chef d’œuvre qu’est "Meanwhile" en live pour la première fois... Cela dit, et de façon magistrale, KLONE vient de nous prouver, une fois encore, qu’il est l’un des tous meilleurs groupes de la scène française actuelle. Sa musique n’a pas de frontière. Les émotions qu’elle véhicule sont une langue internationale qui s’adresse à tous. Il suffit de fermer les yeux et de se laisser transporter, entre ciel et terre, pour un voyage au cœur de l’infinie Beauté.

Photos © Benjamin Delacoux - Portfolio.

Blogger : Sly Escapist
Au sujet de l'auteur
Sly Escapist
Sly Escapist est comme les chats : elle a neuf vies. Malgré le fait d’avoir été élevée dans un milieu très éloigné du monde artistique, elle a réussi à se forger sa propre culture, entre pop, metal et théâtre. Effectivement, ses études littéraires l’ont poussée à s’investir pendant 13 ans dans l’apprentissage du métier de comédienne, alors qu’en parallèle, elle développait ses connaissances musicales avec des groupes tels que METALLICA, ALICE IN CHAINS, SCORPIONS, SOUNDGARDEN, PEARL JAM, FAITH NO MORE, SUICIDAL TENDENCIES, GUNS N’ROSES, CRADLE OF FILTH, et plus récemment, NIGHTWISH, TREMONTI, STONE SOUR, TRIVIUM, KILLSWITCH ENGAGE, ALTER BRIDGE, PARKWAY DRIVE, LEPROUS, SOEN, et tant d’autres. Forcée d’abandonner son métier de comédienne pour des activités plus «rentables», elle devient tour à tour vendeuse, pâtissière, responsable d’accueil, vendeuse-livreuse puis assistante commerciale. Début 2016, elle a l’opportunité de rejoindre l’équipe de HARD FORCE, lui permettant enfin de relier ses deux passions : l’amour des notes et celui des mots. Insatiable curieuse, elle ne cesse d’élargir ses connaissances musicales, s’intéressant à toutes sortes de styles différents, du metalcore au metal moderne, en passant par le metal symphonique, le rock, le disco-rock, le thrash et le prog. Le seul maître-mot qui compte pour elle étant l’émotion, elle considère que la musique n’a pas de barrière.
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