Les Suisses ELUVEITIE n’avaient pas sorti d’album depuis 2019 et « Ategnatos ». En cause, des problèmes de santé et des changements de line-up. Car les membres d’ELUVEITIE vont et viennent et c’est aujourd’hui un groupe de huit personnes, dont le leader Chrigel Glanzmann, qui officie autour d’un folk/death metal mélodique sophistiqué. En effet, si les douze titres de « Ànv » restent dans la lignée de ce qui a été fait précédemment, on ne peut que voir l’évolution mainstream d’un groupe résolument enclin à fédérer un public de plus en plus large, avec une musique certes brutale par moment, mais souvent lisse et entêtante. La production de Jens Bogren est parfaite, les voix féminines sont douces, les orchestrations sont cleans. Bref, si les instruments traditionnels sont toujours présents, ils semblent n’être qu’un prétexte pour garder un côté folk entraînant.
Au début, on se laisse volontiers plonger dans du ELUVEITIE pur et dur avec le death mélodique de "Taranoías". Ses growls brutaux, ses guitares puissantes et ses rythmes blastés augurent un bon départ. Les voix féminines, mélodiques mais sporadiques sont de bon aloi. Une belle entrée en matière avec l’instrumentation traditionnelle attendue. "The Prodigal Ones", bien que déjà très mélodique, suit le même modèle avec des soli et des breaks frénétiques en plus. Le poétique "Ànv", minimaliste à la voix solo féminine, apporte beaucoup de magie et d’intemporalité. "Premonition" est un bon morceau d’ELUVEITIE, fidèle à ce que l’on attend, féroce mais accrocheur.
C’est avec "Awen" que l’album prend un tournant nettement plus abordable et mainstream. Des mélodies finement ciselées, des riffs heavy, une vraie modernité dans la voix féminine, beaucoup d’effets et d’arrangements. Un tube pour les radios assurément. L’acoustique "Anamcara" redonne un peu de consistance et de sens et le rapide "The Harvest", du charisme. L’instrumental et celtique "Memories Of Innoncence" fera danser les foules avant la ballade ultra mélodique et pompeuse "All Is One". C’est beau, c’est touchant, c’est mignon même, complaisant. Trop peut-être pour du ELUVEITIE. Attention à ne pas décrocher car l’album n’est pas fini. Si "Aeon Of The Crescent Moon" fait la part belle à quelques beaux passages, l’ensemble super atmosphérique et éthéré peut surprendre. Mais restez connectés ! Le lourd et positivement folk "The Prophecy" peut raviver votre flamme. Un point pour la fin de « Ànv ».
Avec « Ànv », ELUVEITIE nous propose un album aux mille facettes, toutes plus brillantes les unes que les autres. Sa musique entraînante, dansante, joyeuse et virevoltante même, saura ravir un public de festival déchaîné. Cependant, elle devient de plus en plus raccord avec l’industrie du metal moderne, perdant peu à peu l’âme gauloise et la magie païenne des débuts. Espérons qu’en plus de fédérer une large audience le groupe ne laisse pas sa fan-base sur les flancs des Alpes suisses. On ne peut pas ôter à ELUVEITIE l’envie d’évoluer, les choix semblent assumés, c’est ce qui compte.