« PRIMITIVE MAN est toujours le groupe le plus heavy sur à peu près n'importe quelle affiche de festival et « Observance » va une nouvelle fois mettre à l'épreuve le vocabulaire des personnes cherchant de nouveaux termes pour décrire ce son d’une lourdeur implacable. »
Voilà une introduction de biographie rédigée par le label Relapse Records qui fait sens à l’écoute du quatrième album de ces doux dingues du Colorado. Car en matière de doom/sludge abyssal, le clan américain fait partie des meubles au même titre que ses illustres compatriotes EYEHATEGOD, GRIEF, COFFINWORM ou encore THE BODY. Avec un tel patronyme, cet "homme primitif" qui vit reclus au fin fond de sa grotte, inutile de vous faire un dessin de ce qui vous attend au menu du jour. Du riffing mammouthesque, percutant, des parties de batterie écrasantes en passant par les vocalises profondes et ténébreuses d’Ethan Lee McCarthy, le tout baignant dans un climat oppressant, sinistre, de ceux qui font froid dans le dos.
Intenses, les guitares s’abattent comme autant de coups de hache sans jamais baisser la garde sur ce magma compact qui annihile toute forme de résistance (l’introductif "Seer" en est la parfaite illustration). PRIMITIVE MAN écrase l'auditeur sans discontinuer par ses changements de rythmes, les tempos plus massifs et suffocants se mêlant aux embardées dissonantes qui lacèrent sans répit. La basse de Jonathan Campos est proéminente : elle gifle, elle vrombit, accompagnée avec doigté par la frappe monolithique du préposé aux fûts, Joe Linden. Le cadre est planté. Bien profondément.
Ce marécage sonore boueux a comme des allures d'ambiance de fin du monde. Que l'on retrouve tout du long des 68 minutes de ce long voyage en enfer avec en poche un ticket aller-simple... et sans retour. Ces guitares abrasives, cette frappe de bûcheron ne laissent pas beaucoup d’espace à la lumière. D’ailleurs y-en-a-t-il déjà eu sur les trois méfaits précédents ? Ici, tout explose de la première à la dernière seconde en un magma de noirceur. Un magma où rugissements habités et rythmiques chaotiques se succèdent pour injecter une épaisse couche de bitume dans les esgourdes à grand coup de riffs marteau-piqueur. Un véritable régal masochiste. Et s’il chérit lui aussi les ambiances opaques, impénétrables ainsi que les envolées rythmiques compactes, gluantes propres à ses compatriotes cités en introduction, PRIMITIVE MAN reste peut-être le plus difficile d’accès, même après de nombreuses écoutes attentives qui tentent comme elles peuvent, sauve qui peut, de cerner ce monstre de noirceur qu'est « Observance ».
Comme si cela ne suffisait pas à corser l'addition, ce maléfice est produit en mode rouleau-compresseur par Andy Nelson et masterisé par Arthur Rizk. Pas vraiment des enfants de chœur. Et le résultat est à la hauteur des attentes : destructeur. A l’instar de titres pachydermiques, impitoyables dont le gang de Denver a lui seul le secret tels "Transactional" ou "Social Contract", cette fameuse noirceur plane tout du long de ces sept morceaux douloureux. Comme si cette lourdeur se suffisait à elle-même, écrasant l’auditeur de tout son poids en lui ôtant l'infime espoir d'en sortir vainqueur. Une fois encore...
