
Jared James Nichols est probablement aussi sympathique que méconnu.
Bien qu’il ait entamé sa carrière en 2010, l’Américain de 36 ans, originaire du Wisconsin mais basé à Nashville, éprouve bien du mal à percer, malgré ses talents de guitariste et de chanteur.
D’abord sans doute à cause du style musical dans lequel il se produit, un hard rock bluesy très ancré dans les années 70, reprises de MOUNTAIN ou BLACK SABBATH à l’appui. Un genre qui fut populaire autrefois, mais dont il faut bien reconnaitre que la moyenne d’âge des auditeurs ne cesse de s’élever.
Autre souci, et pas des moindres : les disques de Mr. Nichols ne sont pas simples à trouver, et s’il suit une logique dans sa production, elle ne s’avère pas facile à cerner : aucune régularité, des EPs, des singles, publiés en vrac et sans publicité, peu de vrais albums, de plus éparpillés sur une multitude de labels… En France, Listenable Records a soutenu l’artiste au milieu de la décennie précédente, avec un succès mitigé malgré une bonne volonté évidente.
Dommage, car la musique de Nichols ne peut que parler aux amateurs de Joe Bonamassa, Pat Travers ou feu Johnny Winter.
Saluons tout de même la ténacité de Jared James qui revient régulièrement donner de ses nouvelles en France, du moins à Paris, avec des concerts en première partie de pointures comme LYNYRD SKYNYRD ou Mr. BIG, ou carrément en tête d’affiche.
Ce 12 novembre, c’est le cas au Café de la Danse, salle de 500 places maximum, pas totalement remplie, et déjà visitée lors d’un excellent show donné il y a deux ans.
Cette fois, Jared James Nichols nous prévient : la première partie ne s’est pas présentée, il va donc jouer deux sets !
Une bonne nouvelle, qui réjouit d’emblée le public, mais aussi manifestement le héros de la soirée, d’excellente humeur et qui ne cessera de blaguer lors de sa prestation.
En trio, accompagné de Brian Weaver à la basse et de Ryan Rice à la batterie, Nichols attaque donc avec « Easy Come, Easy Go », extrait de son dernier disque éponyme, sorti en 2023 et parfaitement représentatif de l’artiste : un riff simple mais convaincant, une voix chaude appuyée par les backing vocals de ses accompagnateurs, un solo court et efficace et hop, l’affaire est pliée, souvent en moins de 4 minutes, voire de 3.

Après « Down The Drain », puis le plus metal « Hard Wired », autres morceaux datant de 2023, Nichols poursuit avec un titre pas facile à dénicher en version physique, l’excellent « Threw Me To The Wolves », qui avait été dévoilé au tout début de la pandémie de Covid-19, autrement dit a vu sa destinée tuée dans l’œuf. L’Américain improvise un peu dessus, y collant le riff du « Miss You » des ROLLING STONES, qui fait réagir au quart de tour les spectateurs.
Totalement inédit de nos oreilles, le titre suivant, « Way Back » parle, selon JJN, de « tout ce qu’il aime », donc vieilles voitures, vieilles guitares, vieilles chansons. Le guitariste en profite pour venir taper le solo au milieu de la foule, avant de regagner ses pénates à temps pour reprendre le micro. Il récidive d’ailleurs sur le titre suivant (« Honey Forgive Me » peut-être, nous ne sommes pas sûrs), livre un nouvel inédit avec « Pretend », puis finit le premier set avec une reprise millimétrée du « Mississippi Queen » de MOUNTAIN.
Nous ne venons de voir que 45 minutes de Jared James Nichols, mais la partie est déjà gagnée. La sympathie du personnage, son sourire permanent, mais aussi son talent - et il joue sans médiator, notons-le - s’avèrent irrésistibles.
Avant de revenir sur scène, le trio se fait tout de même attendre 20 longues minutes. Mais le thermomètre regrimpe vite avec « Good Time Girl », puis le génial boogie « Can You Feel It? », pépite de 2014 que nous n’avions plus entendue depuis un bail.
Nichols commence alors à entamer un répertoire plus éloigné de ses prestations habituelles. Et ça commence très fort avec une reprise totalement inattendue du « Man In The Box » d’ALICE IN CHAINS ! On ne savait pas Nichols amateur de grunge, mais en tout cas, il faut avouer que sa version est bluffante, et qu’il fait ici preuve d’un sacré coffre vocal qui n’a rien à envier à celui du regretté Layne Staley.
Il s’amuse beaucoup, part dans des improvisation funky avec ses musiciens qui ont droit à leur break à la basse et la batterie, cite DEEP PURPLE, BLACK SABBATH, ZZ TOP et consorts…
Un petit « Keep Your Light On Mama » pour faire passer tout ça, une blague pour se moquer de sa prof de français quand il était gamin qui lui avait prédit qu’il ne quitterait jamais son bled natal, et place à un vieux blues des familles, « Nails In The Coffin ».
On y croit très fort quand Nichols attaque l’un des riffs les plus déments du rock, celui du « Stranglehold » de Ted Nugent, chanson dont il livre tout le premier couplet. Ça headbangue furieusement dans la fosse, tant le guitariste, par son jeu et son look, rappelle le Motorcity Madman quand il était jeune, et on pense bien qu’il va aller jusqu’au bout. Mais hélas, le trio coupe court, repart sur « La Grange » de ZZ TOP, puis un titre maison dont la référence nous échappe sur l'instant.

Une ultime reprise pour finir, mais cette fois offerte en intégralité, celle du « War Pigs » de BLACK SABBATH, lors duquel Nichols descend une dernière fois dans la fosse pour délivrer son solo.
1h05 pour ce deuxième set, plus 45 minutes lors du premier : le client n’est pas déçu du voyage. A tel point que nombre de spectateurs restent sur place et scandent, en vain et durant plusieurs minutes, « one more song!».