
Nous voilà à Lille pour assister à la seconde date de cette tournée française de GOJIRA. Ce soir, le groupe joue à guichet fermé. Après le traditionnel contrôle de sécurité, nous entrons dans l’enceinte pour regarder la fin de la performance de NECKBREAKKER. C’est devant une salle déjà bien remplie que le groupe a déroulé son set d’une demi-heure. Si le son est correct et que les Danois ne sont pas là pour faire de la figuration, l’ambiance est globalement tiède. Toutefois, il est à noter quelques points chauds, notamment dans la fosse où un circle-pit s’organise et aussi des applaudissements et encouragements du public qui réagit aux sollicitations du chanteur.
Plongé dans une ambiance rouge et un espace limité et encombré de la batterie de COMEBACK KID caché sous un drap, NECKBREAKKER ne passe pas inaperçu avec son death/groove metal. Ce n’est guère étonnant puisque malgré sa jeunesse, le quintet a participé aux 40 ans de LOUDBLAST au Black Lab de Wasquehal au printemps dernier. Pour en savoir plus sur cette formation, nous vous invitons à lire la chronique de son premier album, « Within The Viscera ».
Place au hardcore des Canadiens COMEBACK KID. Si le nombre de concerts qu’ils ont donnés en France est plutôt modeste comparé à l’Allemagne ou au Royaume-Uni, le groupe se produit régulièrement au Hellfest ou encore à l’Xtreme Fest. Aujourd’hui, c'est la première fois que nous les voyons dans le nord. Plus expérimenté, le groupe fête les 20 ans de son second album, « Wake The Dead ». Afin de soutenir le dynamisme de sa prestation, les cinq musiciens bénéficient de plus de lumières. Mais bien que le chanteur descende à deux reprises dans le pit pour provoquer le public, seule la fosse devant la scène est vraiment réceptive. Globalement, la salle reste plutôt attentiste.

Il est 21h30 lorsque s’élève une clameur dans l’enceinte du Zénith. L’ambiance bleutée et l’absence d’activité sur scène indiquent que l’attente touche à sa fin et les 7000 spectateurs commencent à s’impatienter. GOJIRA va tout de même attendre 21h35 pour lancer un set de 90 minutes et une set-list qui met à l’honneur « From Mars To Sirius » qui célèbre ses 20 ans. C’est ainsi que huit des titres de l’album seront jouées, au moins en partie pour quatre d’entre eux dans un medley lors du rappel. « Fortitude » et « Magma » sont aussi bien représentés avec quatre chansons chacun. « L’Enfant Sauvage » n’est pas en reste avec trois extraits. Si « The Link » est abordé avec un titre, le 1er album « Terra Incognita » est écarté.
Au-delà des chiffres, cette seconde date d’une tournée française très attendue est très réussie. Tout d’abord, le fait marquant est l’impact de l’entrée en scène : une scénographie incroyable faite de lights, de flammes, et de fumée où le groupe semble flotter sur un nuage. Cela n’est pas sans rappeler PINK FLOYD ou IRON MAIDEN, mais ici, c’est un nuage cyclonique qui propulse la salle dans un univers violent où la souffrance règne en maître ("Only Pain").
Ensuite, le line-up à cinq fonctionne admirablement bien. Joe, s’étant blessé quelques semaines plus tôt, ne peut pas assurer certaines parties de guitare. A l’image de James Hetfield dans les années 80, il assure le chant et se fait seconder par Greg Kubacki, guitariste de CAR BOMB. Si ce dernier reste au début statique sur la plateforme à la gauche de Mario, il finit par descendre sur "The Cell" pour se mêler au groupe. Loin de faire de la figuration, il joue aussi les solos de Joe, qui ne manque pas de le mettre en avant. A deux ou trois reprises, Joe s’empare aussi de sa guitare pour des interprétations inédites à trois guitares.

Après une première salve magmatique, "Wisdom Comes" est l’occasion d’un retour aux sources avec cet unique extrait de « The Link ». Joe en profite pour le dédicacer à LOUDBLAST, NO FLAG, BLACK BOMB A et les nombreux groupes de la région dont l’importance dans l’histoire de la scène metal française est incontestable, comme il le rappelle. On ne peut qu'acquiescer. C’est l'occasion pour lui et une poignée de personnes présentes de se remémorer la première venue de GOJIRA sous le nom "GODZILLA" au Splendid de Lille, en première partie d’IMMORTAL. C’était le 2 octobre 1999.
"Wisdom Comes" est suivi de "Flying Whales", l’occasion d’une plongée de plus de huit minutes dans le grand bleu en compagnie d’une baleine. La transition avec "From The Sky" est assurée par Mario qui fait son one-man-show, qui rappelle un peu Angus Young. Il tourne d’abord en dérision le cambriolage des "bijoux de la Couronne de France" au Louvre et ensuite fait une démonstration de double grosse caisse. Prouvant ainsi que, sur scène, le chef d’orchestre, c'est bien lui.
Pour introduire "Another World", Joe Duplantier finit son laïus en le qualifiant de caprice. Dans la réalité qu'est celle d’aujourd’hui, dénoncer et résister sont les seules options qui s'offrent à ceux qui s’opposent. C’est aussi et surtout un devoir citoyen.

Bien que cette prestation soit réussie, elle comporte deux ratés. Le premier concerne le fameux "Mea Culpa (Ah! Ça ira!)". Marina Viotti n’étant pas présente pour son interprétation, elle est remplacée par une bande-son dont le niveau sonore donne l’impression que Carmen a été remisée dans les oubliettes de la Conciergerie, projetée en arrière plan. S’il est compréhensible que la chanteuse ne puisse être là pour chanter chaque soir une ou deux minutes, la scénographie pour la remplacer laisse à désirer.
Le second bémol concerne la sortie du groupe après "Amazonia" qui clôt le concert, avant le rappel, et qui n'est pas réellement franche. Un flottement s’installe, le public ne comprenant pas immédiatement que c'est la fin et peine un peu à se faire entendre pour que le groupe revienne. Christian Andreu fait son retour le premier pour inviter le public à faire du bruit s’il veut que GOJIRA entame un rappel. Bien évidemment, "L’Enfant Sauvage" est proposé pour un voyage final entre Mars et Sirius.
Cela faisait huit ans que GOJIRA n’avait plus mis les pieds à Lille. Il y fait un retour remarqué, même si ce deuxième concert de la tournée n'est pas vraiment parfait. Dans tous les cas, ce fut l’occasion de mesurer le parcours que le groupe a accompli, lui qui était quasiment inconnu et que nous avions découvert il y a maintenant 26 ans.
