8 août 2017, 9:11

ELUVEITIE

• Interview Christian "Chrigel" Glanzmann

Huit ans après le premier album entièrement acoustique d'ELUVEITIE, « Evocation I - The Arcane Dominion », les Suisses reviennent avec une suite, « Evocation II - Pantheon » dans la droite lignée païenne du premier tome. Ils nous transportent à nouveau dans le panthéon celtique au son d’instruments traditionnels et de paroles en gaulois, nous laissant vagabonder dans un paysage où les Dieux et Déesses sont omniprésents. Malgré un changement de line-up important l’an passé, ELUVEITIE s’est remis au travail et les nouveaux membres ont d’ores et déjà été fort sollicités, faisant d’« Evocation II » un album à l’atmosphère profonde de sens et d’esprit, à laquelle on ne peut rester insensible. Christian "Chrigel" Glanzmann revient sur ce chef-d’œuvre et nous ouvre les portes de son monde celtique.


Comment vous est venue l’idée de sortir « Evocation II » ? Le deuxième tome était-il prévu au moment de la parution du premier ?
Quand j’ai écrit le concept acoustique d’« Evocation » en 2008, j’avais déjà pour projet de faire deux albums. On a sorti le premier volet en 2009 et on a pris notre temps pour la deuxième partie, on n’avait pas envie de se précipiter, on voulait le faire au moment qui nous semblait le plus opportun…et ça a pris 8 ans !

L’album contient 13 chansons, toutes acoustiques. Est-ce un moyen de vous rapprocher de l’aspect traditionnel de la musique ?
Oui, probablement, on peut le voir comme ça. Mais on avait aussi simplement envie de le faire. La musique d’ELUVEITIE a deux facettes : une plutôt dark, metal, mélodique et une plus traditionnelle, plus authentique, celtique. Il y a eu un moment où j’ai ressenti le besoin de faire quelque chose de totalement acoustique. C’est de là qu’est venue l’idée d’«Evocation».

Qu’en est-il des instruments dont vous jouez ? Il y en a une grande variété et ils sont la touche personnelle d’ELUVEITIE, surtout sur cet album.
L’un des principaux aspects de notre musique est la musique traditionnelle celtique. Les instruments que nous utilisons, sur tous nos albums, sont les instruments de base de cette musique celtique.

Tous les titres de l’album, sauf trois, portent le nom d’un Dieu gaulois et se rapportent au panthéon celtique. Quelle est l’importance du paganisme dans ta vie ?
C’est très important. Le paganisme a beaucoup de sens pour moi, pour nous. Mais je dois dire que je suis très éloigné de cette nouvelle vague ésotérique païenne. Je n’ai rien contre, mais ce n’est juste pas ma tasse de thé.
 

"Notre concept, nos paroles sont travaillés en partenariat avec diverses universités, avec beaucoup de scientifiques, linguistes, historiens." - Christian "Chrigel" Glanzmann



Tu ne te considères pas comme païen ?
Si, bien sûr mais tout ce que nous faisons est très scientifique, très précis. Notre concept, nos paroles sont travaillés en partenariat avec diverses universités, avec beaucoup de scientifiques, linguistes, historiens. Il est très important pour nous que ce que nous produisons soit fondé historiquement et prouvé scientifiquement. Il y a aujourd’hui une mode autour ce thème et on peut trouver de tout sur internet. Il y a plein de groupes qui jouent et se disent celtiques, mais ne le sont pas en réalité.

Et ELUVEITIE est l'authentique...
Non, ce n’est pas ce que je veux dire. Il y a beaucoup à apprendre sur les Celtes, mais il y a aussi beaucoup de choses que nous ne connaissons simplement pas. Ce que nous savons ne suffit certainement pas à créer une spiritualité systématique. Par exemple, il n’y a aucune preuve de la façon dans les Celtes célébraient les 4 grandes fêtes de l’année. On sait qu’elles existaient mais on ne sait pas comment ils les célébraient. Il y a plein de groupes qui font des rituels dits celtiques, c’est très bien, mais pour moi ce n’est pas fondé. Encore une fois, je n’ai rien contre eux et je ne les juge pas, mais ce n’est juste pas la façon dont nous sommes connectés au monde celtique. Cela a beaucoup de sens pour nous dans notre vie quotidienne, mais pas dans ce sens de vieux paganisme ésotérique.

Vos paroles sont en gaulois. Comment as-tu appris la langue ?
En fait, je ne l’ai pas apprise. Le gaulois est une langue ancienne, une langue morte, tu ne peux pas vraiment l’apprendre. On la découvre et on l’étudie grâce à des scientifiques partout en Europe, c’est très intéressant.

Penses-tu que les fans sont de plus en plus sensibles au côté intellectuel et culturel de vos paroles ?
Je pense que globalement, ils ne s’intéressent pas aux paroles. Et cela n’a pas d’importance. Tout le monde peut s’intéresser à notre musique sans entrer dans les paroles. Je n’ai pas de but précis en les écrivant. Je ne veux pas dire ou enseigner quelque chose. Je les écris beaucoup pour moi, car elles me font sens. La semaine dernière j’ai été surpris sur Facebook car nous avons publié les paroles en gaulois avec la traduction en anglais de notre premier single. Il y a eu énormément de commentaires en référence à ce que nous écrivons en gaulois. C’était très surprenant pour moi, car apparemment, plein de monde connaît la langue gauloise. C’est incroyable ! J’en ai parlé à notre guitariste et il n’en est pas revenu car il y a 15 ans, quand nous avons commencé, c’était bien différent. Personne ne réagissait et d’ailleurs la plupart des gens ne savaient même pas ce qu’était le gaulois. Ils trouvaient ça intéressant mais en ignoraient le sens. Aujourd’hui, tu postes quelque chose comme ça et les gens réagissent, posent des questions et ont des connaissances sur le thème. C’est quelque chose à laquelle je ne m’attendais pas.

Il y a eu un gros changement dans le line-up d’ELUVEITIE l’année dernière, mais il semble que les nouveaux membres fassent déjà partie intégrante du groupe et soient bien impliqués.
Oui, nous avons un nouveau line-up, mais la plupart des nouveaux sont dans ELUVEITIE depuis plus d’un an maintenant et cette dernière année a été incroyable du point de vue du travail en groupe. L’alchimie s’est faite. L’atmosphère a tout de suite été à la connexion, l'implication et on travaille vraiment comme une famille. Cela faisait de nombreuses années que nous n’avions pas travaillé dans une si bonne atmosphère en tant que groupe. Ce fut une très bonne expérience d’enregistrement.
 

"Je ne sais pas de quoi demain sera fait alors les projets" - Christian "Chrigel" Glanzmann



ELUVEITIE est maintenant un groupe mondialement reconnu et apprécié. Est-ce plus simple pour vous de tester de nouvelles choses, de revenir au plus près de vos racines peut-être ?
Je ne sais pas trop. D’un côté, c’est effectivement plus simple. D’un autre, les attentes sont plus grandes, plus concrètes. Il y a 15 ans, personne ne nous attendaient au tournant. Aujourd’hui, les gens exigent beaucoup de choses concrètes. Honnêtement, nous ne nous attardons pas là-dessus, cela ne nous importe pas. Si les gens aiment ce que nous faisons, tant mieux. Sinon, ce n’est pas grave, car nous faisons ce que nous aimons. Si tu passes trop de temps à te fier à ce que les gens disent de toi, à ce qu’ils attendent de toi, de tes idées, tu perds en créativité. Du coup, on évite de trop réfléchir à ces choses.


Est-ce que tu peux nous expliquer ce qui est représenté sur la pochette de l’album et ce que veux dire la phrase écrite ?
Tout le concept de l’album tourne autour du panthéon celtique et chaque chanson représente un des Dieux. Le symbole que l’on voit est un symbole de ce panthéon. Il combine de nombreux points cruciaux de cette mythologie et spiritualité celtique. Par exemple, la roue représente la roue de l’année, les équinoxes, les solstices. Il y a aussi les symboles des Dieux, du Dieu des animaux par exemple qui évoque la place de l’humanité au milieu des autres créatures. Cela montre le fait que nous, en tant qu’humains, sommes où nous sommes mais que nous dépendons aussi de tout ce qui est autour de nous. Nous vivons en symbiose avec les autres créatures. Au centre de la pochette, il y a un symbole qui représente les trois visages du Dieu Lug/Lugus mais aussi symbole de la divinité. En arrière plan, il y a un ennéagramme qui représente la trinité qui nous observe. Il croise les lignes de roue de l’année et forme trois groupes avec trois noms de Déesses gauloises. Le texte autour représente globalement les paroles de la première chanson de l’album qui est une des trois seules à ne pas porter le nom d’un Dieu gaulois. Mais "Dvressu" veut en fait dire quelque chose comme "entrée". Les paroles de cette chanson sont comme une invitation au voyage dans le panthéon celtique, mais aussi une bénédiction magique pour celui qui vient errer dans ce monde.

Dans le livret d’ « Evocation II », les fans pourront trouver des anciennes écritures datant d’il y a 2000 ans. Pourquoi ce choix de présenter ces textes anciens ?
Parce qu’elles sont jolies ! Plus sérieusement, les celtes anciens utilisaient différentes écritures, différents alphabets mais la plupart des Celtes et les Gaulois utilisaient l’alphabet romain. Les lettres cursives telles qu’on peut les trouver dans le livret, étaient surtout utilisées pour la magie, la spiritualité mais elles étaient très communes. Comme les paroles de l’album sont elles-mêmes très magiques et spirituelles, on a trouvé intéressant d’utiliser ces lettres cursives latines. Et puis... elles sont vraiment jolies !

ELUVEITIE est reconnu pour son énergie sur scène. Avez-vous une tournée prévue pour la promotion de l’album ? Est-ce qu’elle sera acoustique ?
Jusqu’à la fin de l’année, nous allons beaucoup tourner en Europe. Ce ne seront pas que des morceaux acoustiques, nous jouerons aussi les anciennes compositions.

Quels sont vos projets ensuite ? ELUVEITIE semble de plus en plus inspiré et productif au fur et à mesure des années.
Je n’en ai pas car je ne connais pas l'avenir et j’ai donc du mal à me projeter. Peut-être que pour le prochain concert, l’avion va se crasher et voilà, tout sera fini ! Je ne sais pas de quoi demain sera fait alors les projets, ce sera de faire ce que nous aimons : créer de la musique et faire des concerts.


Blogger : Aude Paquot
Au sujet de l'auteur
Aude Paquot
Aude Paquot est une fervente adepte du metal depuis le début des années 90, lorsqu'elle était encore... très jeune. Tout a commencé avec BON JOVI, SKID ROW, PEARL JAM ou encore DEF LEPPARD, groupes largement plébiscités par ses amis de l'époque. La découverte s'est rapidement faite passion et ses goûts se sont diversifiés grâce à la presse écrite et déjà HARD FORCE, magazine auquel elle s'abonne afin de ne manquer aucune nouvelle fraîche. SLAYER, METALLICA, GUNS 'N' ROSES, SEPULTURA deviendront alors sa bande son quotidienne, à demeure dans le walkman et imprimés sur le sac d'école. Les concerts s'enchaînent puis les festivals, ses goûts évoluent et c'est sur le metal plus extrême, que se porte son dévolu vers les années 2000 pendant lesquelles elle décide de publier son propre fanzine devenu ensuite The Summoning Webzine. Intégrée à l'équipe d'HARD FORCE en 2017, elle continue donc de soutenir avec plaisir, force et fierté la scène metal en tout genre.
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