Jouer et chanter avec ses tripes, vivre la scène avec sincérité, simplicité, chaleur et générosité, cela devrait être la norme pour tous les groupes. ALTER BRIDGE est de ceux-là, sans le moindre doute. Celles et ceux qui se sont déplacés ce mardi 10 octobre 2017 ont pu le constater et sont reparti(e)s le sourire aux lèvres et la tête dans les étoiles.
C’est un Elysée-Montmartre des grands jours qui nous accueille en cette douce soirée d’automne. La foule déjà nombreuse patiente tranquillement le long de la rue avant l’ouverture des portes. Tous âges, toutes générations et toutes nationalités se sont donnés rendez-vous pour assister à ce concert plus qu’attendu, après l’annulation de la date programmée en novembre 2016. Nous n’aurions raté ça pour rien au monde.
La salle se remplit rapidement et c’est vers 19h30 que les lumières s’éteignent pour la première date à Paris d’AS LIONS, le groupe d’Austin Dickinson (oui, le fils de...). Ils sont ici pour présenter leur très bon album « Selfish Age » sorti en février dernier et il faut bien dire que le public d’ALTER BRIDGE leur réserve un accueil plus que chaleureux. Les compositions sont heavy et mélodiques, le groupe ne ménage ni sa fougue, ni son énergie qui devient rapidement communicative. On se laisse facilement embarquer par les chansons qui s’enchaînent toutes sans temps morts, si ce n’est les interventions du frontman qui harangue le public avec beaucoup de professionnalisme. L’ombre du célèbre paternel plane et le jeune a été à bonne école. On n’aurait pas été surpris d’entendre un « Scream for me Paris ! », tellement les gènes sont indéniables. L’album est interprété presque dans son intégralité, et on ne saurait trop vous recommander d’y jeter une oreille attentive. Le seul défaut de la prestation aura été le son souvent brouillon, ce qui est malheureusement le lot de bien des groupes de première partie, certaines compositions en pâtissent légèrement.
S’en suit un court entracte, rafraîchissements ou autres envies plus pressantes, à peine le temps d’une respiration dans une salle bondée, déjà chaude et moite de sueur, que les lumières qui s’éteignent une nouvelle fois pour l'entrée des quatre talentueux musiciens d’ALTER BRIDGE.
C’est au son de "Farther Than The Sun" que débute ce concert qui durera deux bonnes heures. Puis on enchaîne sur "Before Tomorrow Comes" et "Addicted To Pain" qui nous démonte les cervicales. Ce titre est d’un effet redoutable en live. Pas de répit, le groupe nous assène "Ghost Of Days Gone By" et déjà on se doute que la grande majorité du public n’aura plus de voix le lendemain. En effet, quasiment tous connaissent les chansons sur le bout des doigts et Myles n’hésite pas à les solliciter avec force, sourires et remerciements.
"Cry Of Achilles" et sa superbe intro nous électrise de bonheur. Les musiciens sont vraiment très en forme, le son est surpuissant. Ils nous offrent ensuite "Broken Wings" tiré de leur premier album et que nous n’avions pas entendu depuis longtemps. Le concert est déjà bien entamé lorsque nous avons droit au premier extrait du dernier disque : "Crows On A Wire", l’un des plus efficaces de cet album pourtant un peu en demi-teinte. À noter que seulement deux titres seront joués ce soir, le groupe ayant de toute évidence préféré miser sur des compositions plus anciennes, connues de tous. De quoi faire regretter aux détracteurs de « The Last Hero » de n’être pas venus à ce concert aux allures de best of.
L’excitation monte encore d’un cran avec "Ties That Bind", ça remue fort dans la foule et ce n’est pas "Waters Rising" interprétée par Mark Tremonti qui va faire redescendre la température. Cette partie du concert est très attendue par les fans de son projet solo, TREMONTI, connaissant ses aptitudes vocales. L’homme, en effet, possède un fort bel organe qui en ferait pâlir de jalousie plus d’un.
Arrive le moment acoustique lorsque Myles se retrouve seul sur scène avec sa guitare pour un "Watch Over You" d’anthologie. Communion ultime avec le public sur cette chanson qui nous fait à chaque fois dresser les poils et verser notre petite larme devant tant de beauté. Myles n’hésitant pas à faire reprendre le refrain en chœur à son public plein de ferveur. Le duo Myles-Mark nous réserve ensuite une surprise de taille quand, toujours en acoustique, ils nous interprètent "In Loving Memory", chanson écrite par Mark suite au décès de sa mère. Autant dire que ce fut un moment de grâce exceptionnel auquel il nous a été donné d’assister !

"Metallingus", devenu absolument incontournable dans la set-list du groupe, va transformer la féérie de l’instant précédent en frénésie, encore plus lorsque Myles Kennedy nous enjoint à sauter au moment du break. Le public est déchaîné et la puissance ne retombera pas jusqu’à la fin du concert. Nous allons avoir droit au triplé gagnant avec la perfection absolue qu’est "Blackbird" (vraiment rien à jeter dans cette œuvre somptueuse), suivie de "Open Your Eyes" où les fans sont une nouvelle fois mis à contribution et "Show Me A Leader" qui se révèle bien plus heavy que sur l’album. Le son est monstrueux de puissance et nous lamine la tête. Seul (léger) bémol : la batterie couvre parfois les guitares et les voix.
Le rappel est plus que mérité car les fans ne sont pas encore rassasiés. C’est avec un énorme "Isolation" que le groupe revient sur scène pour nous achever. Le duel de guitares entre Myles Kennedy et Mark Tremonti nous permet d’apprécier les styles différents et pourtant complémentaires des deux guitaristes. Cela semble si facile pour eux qu’on a l’impression qu’ils n’ont pas tété un biberon mais une guitare lorsqu’ils étaient petits. Ils s’amusent sur scène, prennent du plaisir et nous en donnent avec une telle générosité que l’on ne peut que savourer cette chance de les voir d’aussi près.
Pour conclure cette superbe soirée, "Rise Today" nous donne une nouvelle fois l’occasion de nous époumoner avec les encouragements et remerciements (en français) de Myles Kennedy. Ainsi s’achève ce show. Les quatre musiciens prennent le temps de saluer leurs fans jusqu’à ce que les dernières notes aient fini de résonner dans la salle...
Un Myles Kennedy très en forme vocalement, souriant et disponible pour son public, Mark Tremonti formidable de dextérité quant à lui, Brian Marshall discret mais tellement précis et Scott Phillips qui martèle ses fûts comme un damné. Que demander de plus ? Peut-être une reconnaissance nationale à la hauteur de leur talent, comme dans d’autres pays ? (Royaume-UNi et Etats-Unis en tête). Oui et non, à vrai dire. Oui, car ils le méritent plus qu’amplement, tant ce groupe nous offre le meilleur de lui-même à travers des chansons et prestations de toute beauté. Non, pour pouvoir bien égoïstement les acclamer dans de petites ou moyennes salles comme l’Elysée-Montmartre et avoir cette opportunité de vivre d’autres concerts magiques comme celui d'aujourd'hui, qui restera longtemps dans nos mémoires. Enfin, une pulsion, une envie de leur dire : « Merci ! Merci d’être ceux que vous êtes, ALTER BRIDGE. ».