Ah, les one-man band de black metal ! Ces obscurs Remy Bricka des temps modernes, infatigables artisans pour qui le terme "délégation" est une aberration et "contrôle" une vertu. Des BURZUM, LEVIATHAN, PANOPTICON et autres BORGNE, stakhanovistes acharnés qui ont essaimé aux quatre coins du globe, lâchant au passage un peu de leur fiel amer aux dessus de nos contrées. MORTIS MUTILATI est l'un de ceux chez qui le nuage toxique à fait une halte en 2011, en plein cœur de l'Auvergne, du côté de Clermont-Ferrand. Et le bougre n'a pas chômé depuis sa mutation puisqu'il a déjà enquillé deux démos, un split et trois albums en cinq ans : le burn-out n'est plus très loin. Mais on le sait, comme on n’est jamais si bien servi que par soi-même alors autant battre le fer tant qu'il est chaud.
Un adage que Macabre, principal instigateur de cette sombre entreprise, a fait sien même s'il s'est autorisé ici une petite folie puisqu’il a mis un léger bémol à sa si chère solitude. C'est vrai, il n'a pas eu à chercher bien loin puisqu'il s’est adjugé les services d'une certaine Asphodel, accessoirement sa femme dans le civil (à ne pas confondre avec celle qui est à l’œuvre chez CHENILLE) pour quelques vocalises moins sévères et Rokdhan (ISHTAR) pour certaines parties de guitares. Que l'on se rassure, pour le reste, c'est bien notre taphophile en chef qui reste aux manettes assisté par Devo de MARDUK à la réalisation dans les forges de l'Endarker studios. Gnè ? Tapho quoi ? Oui, je parle ici de cette mystérieuse addiction qui touche notre chef d'orchestre, de cet amour immodéré pour les funérailles, les tombes et les cimetières. Rien de bien surprenant au vu de son patronyme finalement et du style qu'il pratique ici avec ferveur : un black metal tristoune de premier choix qui renvoie manu miltari aux premiers méfaits de FORGOTTEN TOMB, SHINING et KATATONIA. Un black metal mélodique aussi, bourré de riffs épiques avec des morceaux longs comme mon bras gorgés de raclées de gosier au papier émeri. On lorgne parfois vers la pesanteur du doom, quelques trémolos nordiques de bon aloi viennent aussi pointer le bout de leur frimousse et le tout est nappé de timides voix claires et délicates parties acoustiques. Tout cela fleure bon la pleine lune et les ambiances crépusculaires, une certaine mélancolie s'échappant de ces compositions nocturnes.
Chacun des huit morceaux (on mettra de côté ce qui ressemble fort à une intro et outro) présent sur cette quatrième offrande de l'Auvergnat sonne juste, sans fioritures et surtout, ce qui est notable pour le style proposé par MORTIS MUTILATI, sans redondance. Avec une mention spéciale à ce sujet pour "Portrait Ovale", véritable croisade épique et guerrière de plus dix minutes. Pas de doute, on sent bien que Macabre a déjà de la bouteille car les influences précitées sont ici digérées, les structures sont solides : une véritable personnalité émerge de ce « The Stench of Death » à la noirceur vigoureuse. De la belle ouvrage qui n'attend plus désormais que vos esgourdes grandes ouvertes pour y distiller ses sombres mélopées.