En parallèle de son activité prolifique menée avec le label Debemur Morti depuis plus d'une décennie, Phil, patron de cette noble institution a créé il y a deux ans Sundust Records avec la tête pensante de BLUT AUS NORD, Vindsval. Un refuge idéal pour des formations hors-normes, éloignées du carcan black/death qui constitue habituellement les fondations de sa résidence principale. Une sorte de maison de campagne sombre et austère qui a déjà accueilli en ses murs glacés MUTTERLEIN et ERUDITE STONER. Deux chantres d'un style hors des standards actuels, quelque part entre dark-folk expérimental et industriel pour le premier, à mi-chemin entre doom éthéré et post-rock lumineux pour le second.
Troisième larron a avoir posé ses valises chez Sundust, VARSOVIE va affoler les compteurs Linky en baissant encore d'un cran la température dans cette Amityville des temps modernes. Poltergeist insaisissable, le duo au patronyme charbonneux charrie la grisaille pesante de la capitale de l'Est en y apposant une froide marque de fabrique mélancolique. Que ce soit sur ces habiles lignes de chant clair signées Grégory Catherina, qui collent à merveille aux sinistres ambiances délivrées par des guitares habitées, ou sur les parties de batterie percutantes d'Arnaud Destal, VARSOVIE frappe fort sur ce troisième album. Hanté par une mélodie entêtante, le premier morceau éponyme en est une parfaite illustration : guitares à vif, batterie épileptique et basse pêchue, la recette fait mouche. Tout comme sur l'hypnotisant "Killing Anna" ou "Va Dire à Sparte" et ses huit minutes épiques ponctuées d'un refrain enivrant. Qui ne doivent pas occulter l'intensité émotionnelle de "Le Lac" ou la puissance fourbe de l'instru-têtu "Les Chevaux Échappés". Les quatre années qui séparent « Coups et Blessures » de « L'Heure et la Trajectoire » ont indéniablement permis au groupe d'affiner sa recette pour proposer un style ensorcelant où les atmosphères, glaciales et prenantes, sont ici érigées en lignes de conduite.
La production rend quant à elle une copie nette et sans bavures avec un son propre, peaufiné, en aucun cas musculeux et bien loin des grosses Bertha souvent synonymes de cache-misère. Benoit Roux, dans son antre du Drudenhaus, a une fois de plus fait des merveilles aux manettes (ALCEST, NESSERIA et REVERENCE sont notamment passées entre ses mimines expertes). Ajoutez à cela un design inspiré de Dehn Sora et de superbes photos signées Rytis Titas et vous obtiendrez un album qui n'attend plus que vos esgourdes grandes ouvertes pour y déverser ses sombres mélopées.