
Heureux les fans de Joe Bonamassa, sans conteste l’artiste blues rock le plus prolifique de ces dix dernières années. Surtout que dans le cas présent, la quantité n’est jamais au détriment de la qualité, l’Américain n’ayant pas encore commis de b(l)ouse (elle est facile, je vous l’accorde), et ce bien qu’il ait 38 albums, dont 13 en solo, sous la ceinture… Pour un tout jeune quadra, le chiffre est proprement vertigineux.
Costard, lunettes noires et cheveux gominés, le “sharp-dressed man” débarque sur la scène du Dôme, à Marseille, à 20 heures piles, accompagné de son “mini” big band : Anton Fig (KISS, Ace Frehley, Joe Satriani, Beth Hart et membre du groupe du “Late Show with David Letterman”) à la batterie, Michael Rhodes (un CV long comme le bras, en studio et en live) à la basse, Reese Wynans (Stevie Ray Vaughn & DOUBLE TROUBLE) au piano et aux claviers, Lee Thornburg (SUPERTRAMP, TOWER OF POWER) à la trompette et Paulie Cerra (Lucky Peterson, Glenn Hughes) au saxophone. Sans oublier Mahalia Barnes et Jade MacRae, les choristes australiennes, valeur ajoutée évidente pour le petit supplément d’âme.
Des pointures qui n’ont pas vocation à faire de la démonstration mais juste à accompagner le maestro et à souligner la déconcertante facilité avec laquelle il peut arracher toutes les émotions à son instrument et à son public. Sans conteste le meilleur bluesman de sa génération (même s’il affirme que tout n’est finalement qu’une question de travail, acharné et perpétuel), doublé d’un excellent chanteur et d’un lyriciste inspiré. Faudra pas demander si les bonnes fées se sont penchées sur son berceau…
Et c’est parti pour 2h15 d’un show sans temps morts qui fait la part belle à « British Blues Explosion », live sorti l’année dernière dans lequel l’Américain rend hommage à ses héros britanniques, mais aussi à ses deux derniers albums solo en date, l’excellent « Blues Of Desperation » (2016) et le non moins réussi « Redemption » (2018). Avec ses changements de guitare sur quasiment chaque morceau (Fender Stratocaster, Telecaster, Gibson Les Paul, Firebird), mais aussi d’ambiance, tout au long du concert, Bonamassa va passer en revue les différentes facettes de son jeu tout en feeling et détailler son ADN musical. En attirant tous les regards mais sans jamais donner dans l’autosatisfaction.
A la fois vintage (“Tiger In Your Tank” de Muddy Waters, “Nobody Loves Me But My Mother” de B.B. King ou “King Bee Shakedown”) et hypnotisant (“Blues Of Desperation”), le groupe nous fait même frissonner avec un “Self-Inflicted Wounds” à la fin duquel Jade MacRae se lance dans des vocalises dignes de “Great Gig In The Sky”, pièce maîtresse du mythique « Dark Side Of The Moon » de PINK FLOYD. Au cours de la soirée, le grand Joe jouera également la carte de la mélancolie (“Sloe Gin” de Tim Curry et “Mountain Time”, qui clôture le concert de manière magistrale), sans oublier les hymnes plus enlevés, comme ce “Just ‘Cos You Can Don’t Mean You Should”, qui nous replonge dans l'univers du regretté Gary Moore. Dommage simplement que “Molly O'” et “Mountain Climbing” n'aient pas fait partie de la set-list (considération toute subjective, évidemment).
Ce n’est qu’au bout d’une heure 30 qu’il présentera, non sans humour, chacun de ses partenaires, de véritables complices tant leur plaisir à jouer ensemble est évident. Joe précisera même que le lendemain, 8 mai, il deviendra « officiellement vieux » puisqu’il aura 42 ans et que ce soir, il donne donc son « meilleur dernier concert possible d’homme de 41 ans ».
Les quelque 2 500 personnes qui ont fait le déplacement ont vu un artiste au sommet de son art. Backstage, quelques heures plus tôt, il confiait qu’il arrêterait quand la flamme ne brûlerait plus et disait se donner quelques années encore avant d’abandonner définitivement la musique pour « enfin vivre », lui qui tourne depuis déjà 30 ans et n’a jamais pris de vacances. Ce qui devrait représenter encore un nombre conséquent d’albums quand on connaît le monsieur… Surveillez HARD FORCE, l'interview sera publiée prochainement.
Photos © Chris Caprin - Portfolio
