1 novembre 2021, 10:46

REBELLION

"We Are The People"

Album : We Are The People

REBELLION est un groupe un peu boudé de ce côté-ci du Rhin, à tort. Rejeton talentueux de GRAVE DIGGER, il nous régale depuis 20 ans avec des sagas de qualité. Vikings, saxons, tragédies shakespeariennes, le tout est narré avec un heavy metal puissant... Alors, qu'en est-il de « We Are The People », la nouvelle production et 9e album de REBELLION ?

Une ouverture très sombre alors que je contemple la pochette déroutante révélant un taureau couché sur des braises, blottie, une femme au visage masqué brandissant un drapeau européen repeint à la chevrotine calibre 12... quo vadis ? Bon dieu, ne me dites pas que les teutons versent dans un nationalisme nauséabond ?
Rassurez-vous c’est tout le contraire. REBELLION, sur des riffs sombres et une rythmique lourde, dénonce la tragédie européenne des deux derniers siècles. Il est question de... rébellion. Chaque titre dénonce les plaies de notre continent : le nationalisme (Napoléon et autres princes "qu’on sort"), le racisme (Shoah), le bellicisme, ces abominations qui sont à l’origine des conflits les plus abominables (Verdun, la seconde guerre mondiale). Voilà pourquoi le drapeau bleu étoilé est en charpie. L’Europe est un beau rêve malmené.

C’est donc sur un ton sombre que se déroule cet album pamphlet. "Risorgimento (Tear Down The Walls)" regorge d’une puissance incroyable. Les guitares tonnent sur le ton toujours aussi guttural de Michael Seifert. Histoire d’avoir la classe REBELLION se paie le luxe de soli inspirés pour un titre devant lequel pourrait pâlir GRAVE DIGGER... "Liberté, Égalité, Fraternité" a toute mon attention, et admiration. Les groupes germains osent plus souvent la langue de Molière que nous celle de Schiller, bonjour l’audace. Les futs sont martelés avec la grâce d’un câlin saxon, les riffs huilent lourdement le duvet de nos oreilles, les soli glissent sur des vagues mélodiques. Verdict ? La classe à Dallas, la beauté de Médée. "Sweet Dreams" ? Une arnaque. Rien de doucereux, plutôt une charge de tous les diables (et c’est tant mieux !), le morceau aura préparé le terrain pour le bulldozer "Vaterland". Refrain martial, breaks théâtraux et lourdes pluies de riffs, REBELLION narre la création de l’Empire allemand de 1870. Un titre taillé dans du metal en fusion. "Asches To The Light" et "World War ll" sont également vifs et bien graisseux. Des chansons qui devraient constituer de belles représentations sur scène.

Se démarquant de ses précédentes productions très (voir trop ?, selon certains) conceptuelles et uniformes, REBELLION propose aussi de la richesse, de la complexité. "Verdun" a un côté lancinant, comme un écho à la boucherie de la bataille. La batterie bombarde et les riffs sont les tranchées. "God Of War" est une exécution musicale guerrière avec des percussions tripales. De même "Shoah", langoureux heavy metal qui fait ressortir toute la rage de l’Holocauste, impressionnant comme les morceaux shakespeariens du groupe. Une "tragedy in steel" qui se prolonge avec le magistral "World War ll". Le final "We Are The People" est un feu d’artifice qui claque et éblouit les sens, une charge fédératrice d’acier et sueur.

« We Are The People » est une œuvre de grande qualité, explorant des riffs et des rythmes variés. D’un classicisme classieux, cet album engagé et enragé est un must. REBELLION est l’un des porteurs de flamme du heavy Metal old-school. Un metal multidimensionnel et tout en saveur. Et si la meilleure manière de construire l’Europe était la musique ?

Blogger : Christophe Scottez
Au sujet de l'auteur
Christophe Scottez
Chris est ethnologue à ses heures perdues, vétéran des pogo joyeux en maillots de core. Un explorateur curieux, grand amateur de riffs et de chants sauvages. Il a grandi dans les glorieuses années 80, bercé par les morceaux canoniques d’ACCEPT, SCORPIONS, MOTLEY CRUE et autres GUNS N ROSES. Traumatisé par le divorce entre Max Cavalera et son groupe, ainsi que par un album des Mets un peu «chargé» en n’importe quoi, Chris a tourné 10 ans le dos au hard rock. Puis, un jour, il a par hasard découvert qu’une multitude de nouveaux groupes avait envahi la scène … ces nouveaux sauvages offraient des sons intéressants, chargés en énergie. Désireux de partager l’émo-tion de ce style de metal sans la prétention à s’ériger en gardien d’un quelconque dogme, il aime à parler de styles de metal dit classiques, mais aussi de metalcore et de néo-metal. Des styles souvent décriés pour leurs looks de minets, alors que l’importance d’un album est d’abord le plaisir sonore que l’on peut en tirer, la différence est la richesse du goût. Mais surtout, peut-on se moquer de rebelles coquets alors que les pères fondateurs du metal enfilaient des leggins rose bonbon et pouponnaient leurs choucroutes peroxydées ?
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