
BEFORE THE DAWN, groupe de death metal mélodique finlandais, vient de sortir son neuvième album intitulé « Cold Flare Eternal ». Avec le changement de line-up déjà effectif sur le précédent et un nouveau label, le groupe profite d’une vague de nouvelle énergie pour présenter 10 titres dont il est plutôt fier. Tuomas Saukkonen, guitariste et tête pensante du groupe nous en dit un peu plus sur son état d’esprit.
A l'occasion de la sortie du nouvel album de BEFORE THE DAWN, tu es dans un marathon d'interviews ?
Assez. C'est la première, donc tu vas avoir la version la plus enthousiaste de moi. Dans cinq heures, quand j’aurai aligné mes 60 interviews, je ne pense pas que je serai aussi ravi d'en faire...
Mais ton discours sera parfaitement rodé à ce moment-là !
Oui, exactement. Toujours les mêmes questions. Je préfère les entretiens Zoom, comme ici, bien plus que les e-mails. J'ai fait environ quatre interviews par e-mail ce matin, et c’est bien trop long à mon goût, parce qu’Il n'y a aucune conversation. C'est le pire format d'interview qui soit, je dois avouer.
Ce n'est pas très interactif...
Non, pas du tout.

Parlons donc un peu de ce nouvel album qui s’intitule « Cold Flare Eternal ». La fierté est le sentiment qui prédomine, j'imagine...
Ça peut paraître drôle, mais je suis plus fier que d'habitude. Parfois, peu importe le point de départ. Certains albums sont plus ou moins difficiles à réaliser et à écrire que d'autres. Et celui-ci en particulier était incroyablement facile et agréable à écrire, à enregistrer, à mixer et tout le reste. Nous étions vraiment inquiets pendant l'enregistrement de l'album. Était-ce trop facile ? Devrions-nous souffrir un peu plus ? Devrions-nous surmonter des obstacles ? Parce que c'est ce que l'art devrait être, un obstacle. Il faut souffrir pour délivrer un art de qualité. Et c'était tellement facile et amusant qu'on s'est demandé : « Est-ce que ce sera un bon album ? » Parce qu'on l'apprécie trop. Mais une fois l'album terminé, on a constaté que tout était nickel.
L'un des meilleurs albums du groupe, selon toi ?
Eh oui, je ne suis pas seulement fier du résultat, de la qualité de l'album, mais aussi du plaisir qu'on a pris à le faire. Oui, cet album est génial.
Peut-être que l'expérience, justement, vous permet d'atteindre la recette idéale...
C'est possible. Je crois que c'est mon 25e album. J’espère toujours apprendre de mes erreurs passées. Aujourd'hui, il est tellement plus facile d'aller en studio et de savoir ce qu'on veut en retirer. Et aussi de profiter davantage du processus. Pas besoin de stresser ni de s'inquiéter des détails. On peut se concentrer sur la musique. Je pense que cela contribue grandement à faire un bon album.
Tu n'es pas trop occupé avec tous ces groupes dans lesquels tu joues ?
Non, pas du tout. Cette année, je le suis étonnamment, parce que mes trois groupes donnent des concerts. DAWN OF SOLACE est mon troisième projet, et il ne joue que très rarement live. Bon là, nous avons cinq concerts cette année, ce qui est le record ultime. Mais il y a eu beaucoup de répétitions, de morceaux à revoir, etc... Ça a donc été une période plutôt chargée. Mais en général, he ne suis jamais trop occupé. J'ai travaillé comme jardinier pendant 27 ans tout en fonctionnant avec mes différents groupes, alors... Maintenant, je travaille comme régisseur et animateur dans les festivals pour la deuxième année, je n'ai pas de travail à temps plein. Je suis juste un magicien à temps plein. J'ai donc des horaires plus faciles et plus détendus que jamais.
Tu peux vivre ta passion pleinement… Ça doit être plutôt agréable !
Oui, exactement. C'est amusant. Je sais que ça ne durera probablement pas éternellement. Surtout avec toutes les turbulences dans l'industrie musicale. Et avec quelle facilité déconcertante les choses peuvent changer. Une guerre fait rage en Europe. Les tournées en Amérique du Nord coûtent dix fois plus cher qu’avant. Beaucoup de projets pourraient changer. Mais au moins, je peux en profiter maintenant.

Et avec encore du succès à la clé…
Je l'espère bien. Comme je l'ai dit, nous avons subi de nombreux revers majeurs lors de l'épidémie de COVID. Et quand la guerre a éclaté en Ukraine, ça a complètement changé les mentalités. On a appris à ne plus trop s'inquiéter. Si de bonnes choses doivent arriver, elles arriveront. Mais s'il y a un autre revers, je pense qu'au moins mes groupes prendront la situation un peu plus à la légère. J'espère donc que le succès sera au rendez-vous. Mais on m'a montré à maintes reprises que ce n'est pas entre mes mains, peu importe la qualité de la musique ou à quel point l’album est bon. C'est un monde fou. Croisons surtout les doigts pour qu’il n’y ait pas de fin du monde ou de troisième guerre mondiale !
En effet… En "attendant", parlons musique. « Cold Flare Eternal » est le neuvième album de BEFORE THE DAWN. Qu’est-ce qui le rend différent des précédents ?
Eh bien, c’est le deuxième album sous cette formation. C'est une toute nouvelle version du groupe. De plus, le point de départ était complètement différent. Pour « Stormbringers » Nous sortions de presque 11 ans d’inactivité avec BEFORE THE DAWN. Un retour à l'industrie musicale et on a rencontré notre nouveau chanteur, Paavo Laapotti juste avant d'entrer en studio. Donc, tout était complètement nouveau, je ne retrouvais pas les anciennes routines... Et puis, nous avons réalisé plusieurs tournées, fait beaucoup de festivals, puis un EP l’année dernière. Alors, quand on est allé en studio, tout le groupe était dans un état d’esprit différent : on avait passé des centaines de jours ensemble sur la route. En gros, l’album précédent était un gros point d’interrogation. Maintenant, toutes ces questions ont disparu. On a désormais une immense confiance en nous et une très bonne énergie au sein du groupe. Parce qu'on apprend à mieux se connaître et on travaille beaucoup mieux ensemble. On sait ce qu'on peut tirer du groupe et comment obtenir les meilleurs résultats de la musique qu’on écrit, ce qui entretient un état d’esprit beaucoup plus positif. Et je pense que c'est aussi la plus grande différence, musicalement parlant : il y a beaucoup plus d'énergie. Une grande partie a été écrite en pensant qu’un jour on jouerait ces titres sur scène. Cela change la façon de concevoir les choses. Pour « Stormbringers » en 2023, on ne savait pas s'il y aurait des concerts, ni s'il y aurait des festivals. Mais dès que nous sommes entrés en studio avec cet album, nous avons reçu plusieurs propositions de tournées européennes. Certaines sont même déjà prévues pour l'année prochaine. On savait donc que ce sont des chansons que l'on va pouvoir jouer devant un public des dizaines de fois. Et quand on arrive en studio avec cette énergie, c’est forcément mieux que pour un simple album studio. C'est très intéressant.
Je pense que tu as trouvé le bon équilibre entre riffs lourds et rythmes puissants, et passages mélancoliques, cet album semble parfait pour BEFORE THE DAWN...
Eh bien, merci à toi. Je n’ai rien d'autre à ajouter, je pense qu’on peut arrêter l’interview là ! (rires) Sincèrement, je suis encore un peu trop imprégné par l'album. En tant qu'auteur-compositeur, je suis objectif. Je reviendrai sur l'album dans un an, car je suis capable de l'analyser. Parce que pour moi, c'est mon album préféré toutes périodes confo, mais en même temps c’est le dernier en date. En tout cas, tout le groupe est ravi du résultat. Parfait est peut-être un grand mot, mais c'est certainement le meilleur que nous ayons fait jusqu'à présent. Je pense aussi qu’il faudra du temps aux auditeurs pour vraiment l'apprécier dans son intégralité, parce qu'il est dense en chansons.
Il y a des titres comme "Mercury Blood" qui sont très lourds, très intenses et au contraire, le suivant par exemple qui semble plus léger, plus aérien. Dans quel état d’esprit es-tu quand tu écris les chansons ?
Je suppose que ça vient du genre d'albums que j'aime. J'apprécie la diversité. Je ne veux pas entendre une chanson qui se répète ou un certain style ou tempo répété encore et encore sur un disque. Un facteur important aussi est le fait que les titres sont pensés pour la scène, en songeant à mes chansons live préférées. Inconsciemment, j'ai commencé à écrire des chansons que j'aimerais vraiment jouer en concert. J'aime jouer des morceaux différents, à des tempos différents. Certains sont lourds, certains ressemblent davantage à du rock et d'autres sont très death metal. Comme "Stronghold" ou "Mercury Blood". Mais tous ces différents titres contiennent les éléments que j'aimerais vraiment jouer en live.
C'est très intéressant... Sais-tu déjà ce que vous voulez faire sur scène ? À quoi ressembleront les shows ?
On n'en est pas encore à ce stade-là. Nous sommes maintenant confrontés au premier problème : créer la set-list. Nous avons déjà beaucoup d'albums à notre actif, il y a beaucoup de chansons que nous aimerions garder sur cette liste. Mais maintenant que nous avons un nouvel album, nous souhaitons y ajouter de nombreuses chansons. On ne pourra pas jouer deux heures, ce sera un choix très brutal que de rogner sur quelques-uns des anciens favoris des fans. Ensuite, on commencera à réfléchir à l'aspect visuel et à ce qu'on veut mettre sur scène.
Tous les musiciens à la carrière longue disent que l'exercice est compliqué...
C'est comme... Je ne sais pas si ce terme s'applique à une autre langue que le finlandais mais c'est comme... "voter en criant". Chacun a son propre morceau favori qu’il veut jouer. Mais bien sûr, aucun d'entre nous ne pourra tous les réunir. Donc, il y aura quelqu'un qui sera content et un autre qui sera mécontent. Ou alors, on peut jouer dix heures ! Le plus gros problème, c'est que notre première tournée européenne, prévue en septembre et octobre, sera celle avec WOLFHEART, mon autre groupe et c’est lui la tête d’affiche, donc nous ne pouvons pas jouer un set vraiment long. Je suis donc moi-même responsable du problème. Je crée mes propres problèmes !
Tu penses que vous jouerez le magnifique "Ad Infinitum" ?
C'est le dernier. Mais wow !, c’est très peu probable, même si la structure fonctionne super bien. C'est l'une de mes chansons préférées, l'une des meilleures mélodies que j’ai jamais faites à la guitare. J'aime vraiment l’ambiance, mais justement à cause de sa structure et de son atmosphère, elle risque de ne pas être aussi intense en live. Il n'y a pas de couplets ni de refrains, il y a trois parties... Et la quantité de répétitions marche vraiment bien sur l'album, parce que c’est le grand final, mais entre les chansons plus compactes de la set-list, je ne pense pas que ça s'inscrirait si bien. Mais encore une fois, le choix va être rude si tous les autres décident que ça doit être sur la set-list et que je suis le seul à dire non. Elle finira par y être, mais ça va être sport ! Vive la démocratie ! Quand tu passes 80 jours par an en tournée avec le groupe, il faut de l’alchimie, c’est le principal défi à relever : maintenir la bonne entente et la bonne ambiance. Tout le monde doit être entendu, même ceux qui ne font pas partie du groupe mais qui nous accompagnent. En tous cas, je dois dire que je suis entouré de personnes très intelligentes et talentueuses.

Nouveauté pour cet album, c’est votre nouveau label, Reaper Entertainment. Comment s’est effectué ce changement ?
J'y avais mes deux groupes et je crois qu'on a fait quatre albums ensemble. Napalm Records, où nous étions avant, est un très bon label, vraiment fiable et ils ont toujours respecté leurs engagements. Je n'ai rien à redire. Mais on a senti que pour évoluer vraiment, il fallait une équipe derrière nous, un label où nous serions la priorité numéro 1, pas un parmi cent. Je n’ai aucune critique à faire sur Napalm bien sûr, ils ont des groupes énormes, qui sont numéro 1 en Allemagne. Mais on a eu besoin d’une approche différente, une maison de disques qui nous considère comme sa priorité. Nous avons publié trois singles avant que l'album sorte. Je pense vraiment que c'était la bonne décision, puis Florian et Greg de Reaper travaillaient chez Nuclear Blast Records, à l'époque où on y sortait des albums. Pour une question d’argent, car l’industrie musicale reste quand même une entreprise, les labels ont besoin de miser sur les gros groupes. Mais nous, on a besoin de soutien, donc Reaper fait parfaitement l’affaire. Surtout que les tournées s’annoncent bien donc on aura besoin de management aussi. En tous cas, ce changement était nécessaire.
D’ailleurs, « Cold Flare Eternal » arrive quelques mois seulement après votre live acoustique. Pourquoi avoir fait ce choix de si peu de temps entre les deux mais aussi, pourquoi un album live unplugged ?
Eh bien, en fait, c’est un concert acoustique qu’on a enregistré il y a 4 ou 5 ans déjà. Je voulais le sortir comme cadeau pour les fans. Cela faisait également partie de ce 20e anniversaire du label avec beaucoup de sorties vinyles exclusives, de différents groupes dont le nôtre. Le timing est un peu bizarre, en effet, car nous, nous parlions déjà d’un nouvel album. Mais peu importe, c’est un objet spécial, pour les fans.
Comme tu le disais, vous avez sorti plusieurs singles avant l'album, qui prend de telles décisions chez vous ?
On donne notre avis sur le choix des singles, mais c’est le label qui choisit ce qui doit sortir en fin de compte. Question d’algorithmes de streaming... Par exemple, les chansons avec 3 minutes d’intro sont difficiles à intégrer dans les playlists, donc ne sont pas un choix judicieux. C’est quelque chose à prendre en considération. Avec BEFORE THE DAWN, on n’a pas trop ce souci, mais il faut prendre tous les paramètres en compte.
Il ne nous reste plus qu'à te donner rendez-vous fin septembre à Paris...
Ce sera avec plaisir, mais j’ai comme l’impression que la France est parfois trop dans un coin de l’Europe pour les tournées. On tourne beaucoup en Allemagne, mais généralement, on ne vient qu’à Paris en France et les gens nous disent parfois que c’est trop loin de chez eux. Alors j’espère que pour cet album, on pourra tourner de façon plus intensive dans votre pays...

