29 novembre 2025, 13:49

CASKETS

Interview Matthew Flood


Le phénomène de metalcore anglais CASKETS revient avec un 3e album, « The Only Heaven You'll Know », d’une sincérité désarmante, montrant à quel point le groupe évolue et grandit avec ses fans, se positionnant comme un des groupes phares du metalcore moderne. C’était l’occasion pour nous de parler de cette évolution avec le chanteur Matthew Flood dans un échange à cœur ouvert.
 

Le nouvel album, « The Only Heaven You'll Know », est sorti le 7 novembre. Avec le succès de « Lost Souls » et « Reflections », vous avez placé la barre très haut. Quelles sont vos attentes et comment avez-vous façonné la création de cet album ?
Matthew Flood : 
C'est agréable. Ça fait longtemps qu'on n'a pas sorti de nouveaux titres donc c’est plaisant de sortir quelque chose de nouveau. Je veux évidemment que l'album marche vraiment bien et j'espère que les gens en tireront quelque chose de concret et personnel. J’espère surtout qu’ils prendront le temps de l'écouter jusqu'au bout et qu'ils l'apprécieront.

Tout au long de ce disque, l'idée d'introspection revient souvent. Il y a aussi un aspect profondément personnel dans les paroles, qui montre que tu t’es beaucoup ouvert à ton public. Comment as-tu fait pour y parvenir ?
Sur un plan très personnel, je pense qu'avec « Lost Souls » il m'a fallu beaucoup de temps pour écrire et parler de quelque chose alors que pour « Reflections », on a écrit des chansons qu'on aimait. Mais on ressentait une grande pression à l’idée de produire « Reflections ». Du coup, pendant l'écriture de cet album, on s'est éloignés de ce qu'on voulait écrire pour se concentrer davantage sur ce que les autres voulaient qu'on écrive. J'ai un peu délaissé mon envie de parler de choses et de réflexions personnelles, mais avec ce dernier album, je me sens beaucoup plus à l'aise avec moi-même. Je réalise que les gens, et nos fans, veulent entendre des choses auxquelles ils peuvent s'identifier, de la musique qui leur procure des sensations authentiques. Il y a plein de choses dont je n'ai pas vraiment eu envie de parler car j'avais trop peur de le faire. Je ne parle pas de mes problèmes aux gens, donc ça m'aide beaucoup de les coucher par écrit. Et je pense que les gens veulent écouter et ressentir la vraie gentillesse, la vérité et l'honnêteté pour qu’ils puissent aussi s'y identifier. J'ai l'impression que c'est le bon moment pour moi de me délester de beaucoup de choses, ce que je n'avais jamais osé faire auparavant. Par exemple, mes rapports avec la foi et la religion quand j'étais enfant et la façon dont ça m'a un peu foutu en l'air, parce que je n'avais jamais vraiment cru à ça auparavant. On m'y a poussé, et quand j’en suis sorti, ça m'a beaucoup détruit parce que je me demandais qui j'étais, où j'étais dans ce monde et comment la foi pouvait m'aider à réfléchir. J'ai l'impression que beaucoup de gens ont vécu ce genre de choses alors je veux écrire de la musique pour que les gens se sentent moins seuls face à ces problèmes.

Tu as mentionné ta foi et je vois que c’est un pilier important de l'album. Pourrais-tu parler un peu plus de cet aspect de ta vie et de l'influence de ta foi sur ton art ?
Oui, bien sûr. Quand j'étais enfant, ma famille faisait partie des Témoins de Jéhovah. On m'emmenait tous les dimanches à la messe pour aller prier, etc. mais j'étais un enfant, je voulais juste aller jouer au foot et sortir avec mes amis. On m'a arraché à tout ça. Et puis finalement, ça s'est arrêté alors j'en suis arrivé à un point où je me suis dit que cette religion, cette foi, pourrait être un aspect important de ma vie et que ça pourrait m'aider avec tout ce que je traversais enfant, que ça serait quelque chose sur lequel je pourrais m'appuyer pour essayer de comprendre ce qui se passait. Mais comme ça s’est arrêté brutalement, je n'avais pas vraiment l'impression d'avoir un grand réseau de soutien autour de moi quand j'étais enfant, sans que ce soit la faute de ma famille pour autant. Nous avons grandi avec peu d’argent et ma mère était célibataire avec trois enfants. Elle travaillait comme une folle pour subvenir à nos besoins. Mais j'avais besoin de quelqu'un ou de quelque chose pour m'aider à grandir et je n'avais pas ça. J’ai gardé ce manque à l’esprit toute ma vie en grandissant. Mais plus tard, j’ai repensé à ce manque et je me suis demandé si je pouvais retourner vers la religion. Est-ce que je pourrais m'appuyer à nouveau sur elle pour m'aider à trouver une vie meilleure ? Mais plutôt que d'essayer d'y retourner, j'ai commencé à m'engager sur une mauvaise voie, à faire de mauvaises choses comme développer une addiction à la drogue, etc. C'est quelque chose dont je n'ai jamais vraiment parlé à qui que ce soit parce que je ne me sentais pas assez à l'aise pour en parler avec quelqu'un. Je m'entoure de beaucoup de gens, surtout des gens de mon âge en Angleterre, mais je n'ai jamais pu m'asseoir et en parler alors que j'ai toujours ressenti le besoin d'exprimer ces sentiments. Je me suis finalement dit que la musique était le meilleur moyen pour moi de le faire.

C’est une sorte de thérapie qui aide aussi les autres finalement. C'est bien de pouvoir s'identifier à des paroles et à des sujets personnels.
Exactement !  Ça nous donne aussi l'impression d'être entendus et vus.

Je pense notamment à la chanson "Closure" dont le sujet me parle beaucoup : le principe de sortir d'un schéma toxique peut être difficile et demande une certaine prise de conscience. Si tu avais un conseil à donner à quelqu'un qui écoute cette chanson et qui se dit : « OK, ça me parle, ça me fait ressentir quelque chose. », duquel s’agirait-il ?
J'ai découvert que c'était normal de ressentir ce que les gens coincés dans ces cercles vicieux ressentent. On traverse tous des situations difficiles et parfois, on a l'impression qu'il n'y a aucune issue. On ne voit rien, on se sent piégé. On est au fond d'un trou et on n'arrive pas à s'en sortir. Je pense que l'essentiel est de croire en son instinct et de ne pas se poser de questions, de ne pas remettre en question l'étape suivante si on arrive à l’apercevoir, comme pour chaque pas qu'on fait : sur les quelques pas qu’on arrive à faire, on peut peut-être reculer ou glisser de nouveau. C'est ce qui me faisait peur à l’époque : je travaillais si dur pour me sortir de ces situations que je craignais que, pour une raison ou une autre, si quelque chose tournait mal, j’allais peut-être faire fausse route, empirer les choses, et souffrir encore plus. Et je pense que ça fait peur à beaucoup de gens. Mais ce n'est pas grave parce qu'au moins, on fait quelque chose pour essayer d'améliorer la situation, n’est-ce pas ? Donc c'est comme si on faisait deux pas en avant, un pas en arrière et encore un pas en arrière. Mais ce n'est pas si mal car finalement on fait un pas, on avance et on brise l’inertie dans laquelle on était coincé.
Tu vas commettre des erreurs. Tu vas te faire du mal, d'une manière ou d'une autre. Mais si tu crois en toi, en ce que tu veux et en tes objectifs, tu vas y arriver. Tu dois avoir la détermination et la motivation nécessaires pour y arriver. D'abord, bouge-toi, crois en toi, et commence à agir. Ensuite, continue de croire en toi et en ce que tu veux. Ne laisse personne t’influencer. Ne laisse pas les autres te décourager. Cela peut être un énorme défi pour beaucoup de personnes, évidemment. Mais cela peut aussi être gratifiant.

Comme tu abordes justement ce côté gratifiant, je m’aperçois qu’on parle souvent des défis que les artistes surmontent tout au long de l'année, surtout lorsqu'il s'agit de produire un nouvel album. Mais on ne parle jamais vraiment des récompenses que l'on reçoit, en dehors de la satisfaction d’avoir créé un nouvel album. Rétrospectivement, quelle a été ta plus grande récompense de l'année ?
Pour plusieurs raisons, j’ai vécu l'une des meilleures années de ma vie ! Je me suis fiancé ! La famille de ma fiancée est incroyable. Elle a le genre de parents que j'ai toujours voulu avoir, d'une certaine manière. Non pas que mes parents étaient vraiment mauvais ou quoi que ce soit, mais notre famille était très dispersée. Je n’ai jamais vraiment eu ce genre de lien familial qu’il y a dans sa famille. Ils sont si soudés, si bons les uns envers les autres que c’est agréable à regarder. Et c'est tellement agréable d'en faire partie. J'ai déménagé aux États-Unis pour être avec ma fiancée et c'est incroyable. Et côté groupe, ça fait vraiment du bien de sentir quelque chose se produire à nouveau. On a sorti de nouveaux morceaux, on part bientôt en tournée, l'album sort et Halloween approche ! Donc oui, ça a été l'une des meilleures années de ma vie, si ce n'est la meilleure.

Toutes mes félicitations ! C’est génial de voir autant de belles choses se produire ! Parlons du groupe et des débuts. Peux-tu me raconter l'histoire de la formation du groupe ? Comment vous êtes-vous rencontrés et comment avez-vous décidé de créer de la musique ensemble ?
Le groupe s'est formé à partir d'un ancien groupe appelé FAULTLINES dont les autres membres faisaient partie. J'étais dans un autre groupe à l’époque. Benji et Chris sont venus un soir voir jouer mon grouper et c'est comme ça qu'on s'est rencontrés, probablement un an ou deux avant la création de CASKETS.
Ensuite FAULTLINES a fini par se séparer et j'ai reçu un appel de Chris ou Benji pour venir auditionner pour leur nouveau groupe. Je crois que j'y suis allé le lendemain et, heureusement, j'ai réussi. Nous avions un autre bassiste à l'époque appelé Lee mais il a fini par partir pour des raisons de conflit avec son vrai travail. On a ensuite auditionné James qui est maintenant notre batteur et c’est comme ça que tout a commencé. On a travaillé un an ou deux sur des chansons et juste avant la sortie de l’EP, on les a soumises au management et c'est comme ça qu'on a rencontré notre manager qui est maintenant copropriétaire. On a commencé comme ça.
On a commencé à faire des petits concerts à Leeds et ensuite un peu partout en Angleterre. Peu de temps après, on a fait notre première tournée européenne en première partie. C'était une façon un peu folle de créer un groupe parce qu'on ne se connaissait pas vraiment avant ça. À vrai dire, je suis très reconnaissant et chanceux que ces gars m'aient trouvé, parce qu'ils m'ont sauvé la vie à l'époque, pour être honnête avec toi.

C'est génial ! Et comment a évolué votre façon de travailler au fil des albums ?
Cette fois-ci, les choses ont été différentes. On voulait que ce soit beaucoup plus amusant et moins stressant que pour « Reflections ». On a donc commencé à écrire des démos peu de temps après la sortie du 2ème album, voire avant, mais de deux manières différentes en prenant en compte la disponibilité de chacun. On s’est rendu compte qu’on adorait se retrouver chez les uns ou les autres et la dernière fois qu'on l'a fait, on a loué un cottage au milieu de nulle part en Angleterre. On y est restés une semaine et on a fait des démos toute la journée, tous les jours. Mais il arrive aussi qu’on travaille principalement sur ordinateur. Benji et Craig écrivent des démos musicales et ils me les envoient pendant que je discute un peu des parties vocales. Et ce n'est qu'une fois en studio pour commencer l'enregistrement de l'album qu'on commence à affiner ce qu'on veut garder ou non. On a ce don pour extraire des morceaux de différentes démos et les fusionner pour créer, notamment pour le titre "Sacrifice". Le refrain de ce single était le premier couplet d'une autre démo, ce qui n’allait pas à ce moment-là mais je savais que c'était une très bonne accroche vocale. Nous l'avons donc gardé en mémoire et finalement, Benji et Craig ont commencé à écrire en studio ce qui est maintenant "Sacrifice". Un jour, je suis entré, j’ai entendu la mélodie et je me suis dit : « Cette mélodie irait très bien avec ça, il suffit de changer un peu la tonalité et le tempo ». Donc oui, on préfère écrire ensemble en groupe parce que ça coule de source quand on s'imprègne des gens, on entre plus facilement dans le rythme.


Le titre "Sacrifice" m’a beaucoup interpellée lors des écoutes de l’album : l'ambiance musicale est tellement différente du reste de l'album avec son style un peu plus moody et prenant. Quel était le choix créatif derrière ça ?
Étrangement, je cherchais cet univers moody. Je trouvais l’idée parfaite et quand on est allé en studio, pendant qu'on écrivait les démos, on avait envie de créer des ambiances différentes. "Sacrifice" a été entièrement écrite en studio. Dès que j'ai commencé l'intro et que je l'ai intégrée au couplet et à la musique, je me suis dit : « C'est la bonne. ». On savait juste qu'on voulait essayer d'évoluer, d'ajouter des éléments différents à notre son. On veut continuer à mûrir musicalement et artistiquement et je pense que des chansons comme celle-là nous aident à y parvenir tout en repoussant aussi nos limites.

J’ai aussi adoré "Our Remedy" avec MAKE THEM SUFFER en featuring. Tu peux m'en dire plus sur cette collaboration ?
Pour ce titre, on est arrivé en studio avec une démo complète en sachant qu'on voulait une collaboration sur ce morceau. On avait une liste restreinte d’artistes qui pouvaient bien s'intégrer à cette démo et je me souviens qu'on écoutait une playlist Spotify en studio, un single vraiment heavy de MAKE THEM SUFFER dont je ne me rappelle plus le nom est passé et on a tout de suite imaginé leur style sur notre démo. On les a contactés et on leur a envoyé la démo. Ils nous ont renvoyé une première version et c'était fait. On s'est dit : « Rien à changer. », c'était parfait. Et à vrai dire, c'est l’une de mes chansons préférées.

Y a-t-il des groupes ou des artistes avec qui vous aimeriez collaborer à l’avenir ?
Oh que oui ! Il y a plein de groupes avec lesquels j'adorerais collaborer. J’adorerais faire un concert avec LORNA SHORE. Évidemment il y a BRING ME THE HORIZON mais je pense que tous les groupes aimeraient travailler avec eux ! Il y a aussi le groupe DOWNFALL qui m'intéresse beaucoup en ce moment, ils sont vraiment géniaux. Et il y a un groupe qui vient d'Europe, ANKOR, qui est génial et avec qui j'adorerais faire quelque chose, mais j'aimerais aussi explorer d'autres genres comme de la musique country, du rap, ou quelque chose comme ça. Je pense qu'on est encore loin de ça avec la sortie de cet album, mais on ne sait jamais et je pense que c'est bien de se projeter un peu et de voir ce qui peut arriver à l'avenir.

Bien sûr ! Vous avez déjà commencé à réfléchir à la suite ? Y a-t-il déjà du matériel pour le prochain album ?
On a commencé doucement à écrire d'autres choses. Il y a un Google Drive, par exemple, où on met toutes nos démos. Benji, Craig et moi, on va y ajouter petit à petit des parties instrumentales etc. Je pense que Benji et Craig ont déjà commencé d’ailleurs, mais je pense que c'est quelque chose qu'on étudiera plus en détail plus tard, probablement après la tournée australienne en février 2026. On aura un peu de répit après celle-ci alors on commencera à réfléchir à la suite. On veut aussi s'assurer que le prochain album soit différent des trois premiers et on veut que ce soit aussi un projet à part. Donc, quoi que ça puisse devenir, je veux faire quelque chose de différent dessus. Et je veux aussi avoir plus de featurings sur le prochain album.

Pour conclure, quel est ton Top 5 de ta playlist actuelle ?
Il y a une chanson intitulée "Between Us" de FIT FOR A KING qui est absolument magnifique. J'écoute aussi beaucoup un groupe appelé COLORBLIND en ce moment. Je crois qu'ils viennent de sortir un EP, ils ont une chanson intitulée "Let Down" qui est super. J'adore BAD OMENS et la chanson "Specter" est incroyable. J’écoute aussi le groupe PRESIDENT dont j'aime vraiment vraiment beaucoup la musique. J'ai hâte de voir ce qui va se passer avec BAD OMENS ensuite et d'écouter le prochain single. Je suis d'ailleurs récemment allé les voir dans un festival avec ma fiancée et je repense au fait qu’on a fait quelques concerts avec eux en Allemagne en 2020 et 2021. C'est tellement cool de constater à quel point ils ont explosé et comme ils se portent bien.

Blogger : Sonia Salem
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Sonia Salem
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