9 juillet 2016, 15:59

MOTÖRHEAD

"Clean Your Clock"

Album : Clean Your Clock

Voici donc le testament de MOTÖRHEAD. Et à l'entame de ce très beau, il faut l'avouer, CD/DVD (ou Blu-ray) enregistré les 20 et 21 novembre 2015 à Munich, autant vous dire que j'ai été submergé de sentiments contradictoires. Comment en effet ne pas ressentir une certaine gêne quand on sait qu'un peu plus d'un mois plus tard, Lemmy Kilmister laissait le monde du rock orphelin.
Malade depuis des mois, le vieux lion ne voulait surtout pas lâcher le morceau, et l'état d'extrême fatigue dans lequel il se trouvait transpire dans chacun des plans le mettant en vedette sur le DVD. Mais j'y reviendrai. Quant au CD, le rythme des chansons, beaucoup plus lent qu'à l'époque pas si lointaine des live « The Wörld Is Ours - Vol. 1: Everywhere Further Than Everyplace Else » (2011) et « The Wörld Is Ours - Vol. 2: Anyplace Crazy as Anywhere Else » (2012), est là pour rappeler que celui que beaucoup voyaient comme un roc indestructible s'était finalement fait rattraper par cette pute aux multiples visages communément appelée la maladie.

Alors oui, j'avoue m'être senti comme ces spectateurs d'émissions TV racoleuses qui confondent bien souvent compassion et voyeurisme. Non pas que la perspective d'entendre le grand Lem' éructer des classiques comme "Bömber" ou "Metropolis" lors de deux des toutes dernières prestations de la Tête de Moteur me rebutait, mais j'avais encore en tête ce concert du 18 novembre 2014 au Zénith de Paris, durant lequel Phil et Mikkey avaient littéralement porté leur courageux boss à bout de bras. Et puis, tout comme je m'étais dit qu'il n'y aurait certainement pas beaucoup d'autres opportunités de revoir MOTÖRHEAD sur scène - personne ne m'avait forcé à y aller, après tout ! - j'ai finalement pris ce « Clean Your Clock » pour ce qu'il était : l'ultime témoignage live de la légende. Et grand bien m'en a pris ! Il faut dire aussi que le trio britannique pouvait filer des plaques d'eczéma à n'importe quel groupe s'autoproclamant "groupe de scène"... même avec un Lemmy affaibli. C'est la meilleure leçon de cet ultime live.

La set-list, composée de 16 titres, constitue un bon résumé de la carrière de MOTÖRHEAD, et réserve même quelques belles surprises au titre desquelles on retiendra essentiellement "Lost Woman Blues" (« Aftershock » - 2013), "Rock It" (« Another Perfect Day » - 1983) et "When The Sky Comes Looking For You", tirée de l'excellent dernier album du groupe, « Bad Magic » (2015). Les indéboulonnables classiques que sont "Bömber", qui ouvre l'album au son des sirènes de DCA, "Stay Clean", "Ace Of Spades" (littéralement haïe par Lemmy tellement elle avait été jouée sur scène !) et "Overkill", qui clôt l'album (pouvait-il en être autrement ?) sont bien sûr de la partie, à côté de pépites comme "Dr. Rock", dédiée à Philty "Animal" Taylor, décédé un semaine plus tôt, "Just 'Cos You Got The Power", dédiée, elle, à "des bâtards qui volent votre argent à longueur de temps" (je vous laisse deviner lesquels !) ou "Whorehouse Blues" et son solo d'harmonica.

Le son, brut de décoffrage, restitue d'autant plus fidèlement ce qu'était un concert de MOTÖRHEAD qu'aucun overdub n'y a été ajouté. Les quelques pains qui émaillent l'album sont d'ailleurs là pour en témoigner ! C'est louable de la part d'UDR Music quand on sait que même le mythique « No Sleep 'Til Hammersmith » n'avait pas échappé à ce procédé. C'est donc à la formation qui aura tenu le plus longtemps (elle était restée inchangée depuis 1996) qu'incombe la lourde tâche de laisser à la postérité la hargne live de MOTÖRHEAD. Car de la hargne, il y en a bien sur ce « Clean Your Clock » ! De l'attaque de "The Chase Is Better Than The Catch" au break de "Whorehouse Blues", des premières notes d'"Over The Top" au larsen final d'"Overkill". Des larsens, justement, qui se font entendre tout le long du CD, preuve supplémentaire que malgré la fatalité, Lemmy, Phil et Mikkey jouaient toujours à la limite de la rupture ces 20 et 21 novembre derniers. 

En ce qui concerne le DVD (Blu-ray), rien à redire non plus, la qualité est là, et malgré l'émotion de voir un Lemmy extrêmement amaigri et usé, qui, visiblement, lutte pour sortir certaines paroles, c'est avec plaisir que l'on assiste à un concert censé promouvoir « Bad Magic », mais aussi les 40 ans de la légende britannique. On précisera d'ailleurs aux grincheux qu'il ne faut pas aller chercher plus loin la décision d'avoir filmé cette sortie en terres teutonnes. Ce « Clean Your Clock » était bien prémédité, mais pas pour les raisons que certains veulent bien voir ! Fin de la parenthèse. Le montage est à mille lieues de « Stage Fright » (dont le visionnage était déconseillé aux personnes sujettes à l'épilepsie ! Si, si !) et les plans font aussi bien honneur aux musiciens qu'au public, intergénérationnel et parfois recueilli. Les lights sont soignées et le "Bomber" est même de sortie. Outre le concert principal, le DVD présente des extraits d’interviews d’une vingtaine de minutes qui nous permettent d'écouter Phil Campbell, Mikkey Dee, Biff Byford de SAXON, les GIRLSCHOOL (difficile de trouver de plus légitimes interlocuteurs quand il s'agit de discuter de MOTÖRHEAD !) et surtout, Lemmy lui-même.

Au final, ce « Clean Your Clock » au visuel soigné (le digipack s'ouvre sur un pop-up cartonné représentant le groupe et son bombardier sur scène, et les disques sont rangés dans de très belles pochettes intérieures à la manières des vinyls) constitue un bel hommage à un homme qui transpirait le rock'n'roll par tous les pores de la peau et dont l'intégrité est peut-être encore plus palpable ici que sur les précédents concerts de MOTÖRHEAD.
Ce n'est certes pas évident d'écrire cela, mais Lemmy ne se voyait pas finir dans une maison de retraite. Surtout pas. Et si ce live ne sera jamais le meilleur du groupe, il est là pour nous montrer que la vie de cet homme se trouvait sur scène. Et à n'importe quel prix.

Le Rock est mort. Vive le Rock !

Blogger : KillMunster
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KillMunster est né avec le metal dans le sang. La légende raconte que quand Deep Purple s'est mis à rechercher un remplaçant à Ian Gillan, le groupe, impressionné par son premier cri, faillit l'embaucher. Avant finalement de se reporter sur David Coverdale, un poil plus expérimenté. Par la suite, il peaufina son éducation grâce à ses Brothers of Metal et, entre deux visionnages d'épisodes de la série "Goldorak", un héros très "métal" lui aussi, il s’époumona sur Motörhead, Lynyrd Skynyrd, Black Sabbath et de nombreux autres ténors des magiques années 70. Pour lui, les années 80 passèrent à la vitesse de l'éclair, et plus précisément de celui ornant la pochette d'un célèbre album de Metallica (une pierre angulaire du rock dur à ses yeux) avant d'arriver dans les années 90 et d'offrir ses esgourdes à de drôles de chevelus arrivant tout droit de Seattle. Nous voilà maintenant en 2016 (oui, le temps passe vite !), KillMunster, désormais heureux membre de Hard Force, livre ses impressions sur le plus grand portail metal de l'Hexagone. Aboutissement logique d'une passion longuement cultivée...
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1 commentaire

User
UncleFester
le 11 juil. 2016 à 07:06
Vive le Rock ! \m/
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