"Je suis colère les enfants, je suis colère ! Je suis violence parce que je suis trahison !"
J'aurais pu également ajouter "frustration" et "consternation" à cette réplique éructée par Benoît Poelvoorde, alors au bord de la crise de nerfs lorsqu'il tentait avec un certain cynisme de remotiver son équipe de cyclistes amateurs, pour décrire ce « Poison Blood » insipide et mal dégrossi ! Et pour cause, sur le papier tout prêtait pourtant à l'extase obscur : Jenks Miller, le Rémi Bricka oeuvrant derrière HORSEBACK (dont le superbe « Dead Ringers » est chroniqué en ces colonnes), associé à Neill Jameson, vocaliste attitré d'une des formations américaines les plus respectées en matière de black metal, KRIEG. Relapse Records n'y allait pas avec le dos de la cuillère pour présenter sa nouvelle offrande diabolique puisqu'il fallait se préparer à encaisser un summum de black metal minimaliste et mystique. Et pourtant...
De mystique il n'y a rien, mais alors rien du tout dans les dix-huit minutes que durent ce premier EP. A moins de considérer ces quelques notes de clavier indigentes comme une révélation psychédélique ? Pour ce qui est du minimalisme, en revanche, on peut dire que le duo a tout donné, trop donné même. Quelques riffs cache-misère d'une platitude birkinesque, une boîte à rythmes programmée avec des moufles, des râclements de gorges monotooooones et je vous passe la production qui m'a fait autant d'effet que la vue d'une saucisse désabusée terminant mollement son existence au fond d'un saladier inox. Ploc.
Voilà, POISON BLOOD, c'est ça. Ajoutez pour la forme une originalité proche du zéro polaire et un sens de la composition qui, sous couvert d'en faire le minimum, plonge involontairement (tout du moins je l'espère) dans l'auto-parodie. Reste une question en suspens à l'écoute de ce premier EP : que sont allés faire nos deux lascars dans une telle galère ? On parle ici de KRIEG et HORSEBACK tout de même. Une simple récréation artistique entre potes un brin éméchés, histoire de lâcher la bride entre deux albums ? Ou une volonté de remettre au goût du jour le son visqueux des formations les plus féroces du début des années 90 ? Si tel était le cas, ne dépensez pas le moindre euro, ne gâchez pas ne serait-ce qu'une minute dans ce naufrage annoncé et envoyez-vous entre les feuilles les originaux d'époque enfantés par BEHERIT, BLASPHEMY ou ARCHGOAT. Et savourez la sauvagerie ultime à l'état brut, sans concession aucune.