1 avril 2021, 19:00

LE JOUR OÙ…

Jim Carrey invite CANNIBAL CORPSE dans son film


Quand Ace Ventura : Détective chiens et chats débarque au cinéma aux USA en 1994, Jim Carrey n'est pas encore la superstar de la comédie qu'il va devenir dès ce film, justement. Ce qui ne l'empêche pas d'avoir imposé à l'écran un groupe avec qui il avait particulièrement envie de travailler : CANNIBAL CORPSE !

Automne 1992. Les musiciens de CANNIBAL CORPSE, qui à l'époque n'ont pas encore posé leurs valises en Floride et sont encore basés à Buffalo, dans l'Etat de New York, reçoivent un coup de fil de Metal Blade, leur maison de disques. Ces derniers ont été contactés par la production du film Ace Ventura : Pets Detective (Ace Ventura : Détective chiens et chats en France, où il sortira en mars 1995) qui leur a dit que Jim Carrey les voulait absolument dans le film. A l'époque, les cinq hommes viennent tout juste de sortir leur troisième douceur, « Tomb Of The Mutilated », tandis que l'acteur au faciès élastique et à l'humour déjanté, limite éprouvant parfois, est alors célèbre pour ses participations à l'émission télé "In Living Color", composée de sketches, qui fait de grosses parts d'audience outre-Atlantique. Il sortira la même année deux autres comédies qui cartonneront au box-office – The Mask et Dumb & Dumber. Ce n'est qu'un peu plus tard que le Canadien changera de registre avec « Truman Show » ou « Eternal Sunshine Of The Spotless Mind », histoire de prouver qu'il n'est pas que le fils spirituel de Jerry Lewis qui en fait des gigatonnes.

Le groupe, qui croit presque à un canular, commence par s'étonner que l'acteur ait entendu parler d'eux, leur brutal death metal – underground par essence –, leurs pochettes gore censurées et leurs textes sadiques étant réservés aux cœurs, aux oreilles et aux nuques avertis. Et pas franchement raccord avec l'idée que l'on se fait d'une comédie familiale… Ils déclinent  la proposition, d'une part en raison d'une concordance de dates avec des concerts programmés en Europe, et puis aussi parce qu'ils craignent d'être tournés en ridicule.  « Nous prenons notre musique très au sérieux, nous ne voulions qu'on nous fasse passer pour des clowns » expliquait Paul Mazurkiewicz, batteur et cofondateur du groupe, à Noisey.

Vingt-quatre heures plus tard, pas démontée, la prod' revient à la charge en leur assurant que l'idée n'est absolument pas de se moquer de CANNIBAL CORPSE, dont Carrey est fan, et qu'en plus, ils vont reprogrammer le tournage de la scène live où ils apparaissent pour leur permettre d'assurer leurs concerts comme prévu. Des amis du groupe leur rapportent alors que quelques mois plus tôt, à l'occasion d'une interview, l'acteur canadien avait confié aimer particulièrement CANNIBAL CORPSE, mais aussi CARCASS et NAPALM DEATH. Ou du moins, selon les sources, être suffisamment "intrigué" par leur violence pour leur porter un intérêt. En 2009, son beau-fils, qui joue alors dans le groupe BLOOD MONEY, affirmera même que Carrey déteste le death et qu'avant le film, il n'avait jamais entendu parler des New Yorkais…

L'affaire est conclue et, de retour au pays, les musiciens vont, deux jours durant, tourner leurs scènes live au Cameo Theater à Miami, en Floride. Impressionnés, eux qui débarquent pour la première fois sur un plateau de tournage, on leur présente dans la foulée Jim Carrey, qui les remercie chaleureusement d'avoir répondu à l'appel. Avant de leur réciter les paroles de plusieurs de leurs morceaux, dont "Rancid Amputation", un titre de « Butchered At Birth », leur précédente boucherie sortie en 1991, et de leur demander d'interpréter "Hammer Smashed Face" dans le film… Ça tombe (of the mutilated) bien, c'est alors le morceau le plus connu du répertoire du groupe et ça l'est toujours près de 30 ans plus tard. D'ailleurs, en 2017, on l'entendra également (de façon quasi subliminale, mais quand même) dans Bright, un “original” Netflix avec Will Smith. « C’était dingue. On était super excités parce qu'on était sur un plateau de tournage avec Jim Carrey et lui, il était excité parce qu'il rencontrait CANNIBAL CORPSE » se souvient Mazurkiewicz. Qui souligne également à quel point l'acteur et le réalisateur, Tom Shadyac, ont été aux petits soins avec eux. Ce n'est pas parce que l'on pratique le gros death metal qui tache que l'on n'apprécie pas d'être bien traité, il fallait le préciser !

A l'époque, les cinq hommes – dont le chanteur Chris Barnes, qui partira par la suite fonder SIX FEET UNDER – n'ont pas encore de clip à leur actif et ils découvrent ainsi les joies du playback, des innombrables prises de vues, sans jamais jouer la chanson en entier une seule fois. « Ils balançaient la musique, on faisait semblant de jouer et ils la coupaient dès qu'il y avait un dialogue, mais on devait continuer à faire semblant de jouer, expliquait le batteur. Du coup, même les figurants dans le public qui faisaient semblant d’être à fond devaient le faire en silence. On entendait juste des bruits de pas, les gens faisaient semblant de s’éclater, et nous, on faisait semblant de jouer, le tout sans musique. C’était assez bizarre, mais on a fait ça deux jours et le reste du temps, on glandait. »


​A la sortie du film, pas de tapis rouge pour les musiciens. Comme tout le monde, ils achètent leur place de ciné, à Buffalo, et se rendent à la dernière séance. Contents d'être à l'écran, même s'ils sont crédités en tant que CANNIBAL CORPSES (parce qu'ils sont plusieurs ?), ils sont toutefois déçus que la scène dans laquelle Carrey/Ventura, poursuivi par deux méchants, débarque sur scène pendant leur prestation et fait semblant d'être le chanteur du groupe ait été coupée au montage. Ils la découvriront deux ans plus tard à la télé, Ace Ventura ayant pour l'occasion bénéficié d'une “version longue”, qui n'apparaît pas non plus dans le DVD.


Avant sa sortie dans les salles obscures américaines, CANNIBAL CORPSE, décidément très demandé, sera également contacté par l'équipe du film Airheads (Radio Rebels dans la langue de Molière), une comédie dans laquelle des musiciens de hard rock débarquent dans une radio et obligent (sous la menace de pistolets à eau remplis de Tabasco…) les animateurs à diffuser leur démo à l'antenne. Mais quand la prod' apprend qu'ils vont apparaître dans Ace Ventura, ils font du coup appel à WHITE ZOMBIE.

Aujourd'hui encore, les désormais Floridiens d'adoption savent que cette apparition, aussi brève soit-elle, leur a permis de toucher un public qui ne les aurait jamais vu jouer sinon et qui n'aurait jamais écouté de death metal de son existence. Et qu'ils ont certainement récupéré un certain nombre de fans chez les ados, plus aptes à s'enthousiasmer pour ce vulgaire étalage de puissance que leurs géniteurs. En 2015, avec plus de 2 millions d'exemplaires écoulés, CANNIBAL CORPSE était la formation death à avoir vendu le plus d'albums dans le monde.

 

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Blogger : Laurence Faure
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Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
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