8 avril 2021, 18:25

LE JOUR OÙ...

SUICIDAL TENDENCIES apparaît dans la série "Deux Flics à Miami"


Paradoxe : alors que SUICIDAL TENDENCIES a été interdit de concert à Los Angeles dans les années 80, le groupe s'est parallèlement retrouvé à l'écran dans l'une des séries télé les plus suivies à l'époque, Miami Vice, mieux connue sous le nom de Deux Flics à Miami chez nous. Va comprendre, Mike…


En 1984, SUICIDAL TENDENCIES est le seul groupe de skate punk hardcore – et le premier ! – à être régulièrement diffusé sur MTV, chaîne musicale américaine née trois ans plus tôt. Malgré son nom, qui lui vaudra bien des déconvenues et l'a certainement freiné dans son ascension – du moins aux USA –, le gang de Venice drivé par Mike Muir a en effet signé le titre "Institutionalized", présent sur l'album éponyme du groupe sorti en juillet 1983, qui a été composé par le frontman et le bassiste Louiche Mayorga peu de temps après son arrivée dans la place, un an plus tôt.

A l'époque, Miko n'est pas encore Cyco et il n'a que 20 ans, mais déjà, il fait preuve d'un talent de lyriciste certain. Le texte de "Institutionalized" est un long monologue intérieur dans lequel un adolescent raconte son mal-être et ce à quoi il est confronté, surtout quand sa mère se persuade qu'il se drogue et le fait interner ("institutionalize"en américain). Alors qu'en fait, comme tous les jeunes de son âge, il se cherche et aspire juste à ce qu'on lui lâche un peu le bandana/le skate/les sneakers (rayez la ou les mentions inutiles) en le laissant faire ses erreurs et apprendre. Une façon de dénoncer une pratique relativement courante aux USA, à l'époque du moins, et un sujet sensible qu'abordera également Eddie Vedder dans "Why Go" sur l'album « Ten » (1991), puis dans “Leash” sur « Vs. » de PEARL JAM, qui consiste à placer les teenagers “rebelles” ou déboussolés, voire ceux qui “se droguent” parce qu'ils ont fumé quelques joints, dans des institutions pour les “remettre dans le droit chemin”. Que cela les brise n'est qu'un détail…


 

A l'époque, un passage de la chanson en particulier marque les esprits outre-Atlantique, y compris chez ceux qui n'aiment pas ce genre de musique : « Mom just give me a Pepsi please/ All I want is a Pepsi, and she wouldn't give it to me/ All I wanted was a Pepsi, just one Pepsi, and she wouldn't give it to me. Just a Pepsi. » (« M'man, donne-moi un Pepsi, s'il te plaît/ Je veux juste un Pepsi et elle n'a pas voulu me le donner/ Je voulais juste un Pepsi… »). Non, Mike Muir ne cherchait pas désespérément à se faire bien voir du concurrent direct de Coca-Cola, il montrait juste le décalage qui peut exister entre un ado et ses parents et comment une phrase tout ce qu'il y a de plus innocente peut être mal interprétée. Ce qui explique en tout cas pourquoi certains l'appellent "The Pepsi Song"... Preuve de son impact à l'époque sur le monde de la musique américaine, on trouve une déclinaison de ce passage dans “Stuck” de LIMP BIZKIT ainsi que dans “How I Just Could Kill A Man”, un des titres les plus connus de CYPRESS HILL.

Mais c'est grâce à la présence de "Institutionalized" sur la B.O. de Repo Man, un film barré dans lequel on entend également FEAR, BLACK FLAG et CIRCLE JERKS, que SUICIDAL va être repéré par les producteurs de Miami Vice. A l'époque, la série télé, connue en France sous le nom de Deux Flics à Miami et mettant en scène deux inspecteurs, Don Johnson/James Crockett et Philip Michael Thomas/Ricardo Tubbs, est l'une des plus suivies des deux côtés de l'Atlantique. Alors quand Mike Muir reçoit un coup de fil de quelqu'un qui se présente comme le directeur de production de Miami Vice qui lui dit qu'il veut absolument que SxTx apparaisse dans un épisode, il pense tout de suite que c'est un pote qui lui fait une blague. Imperturbable, il fait comme si de rien n'était. « Je lui ai répondu : "Bien sûr que ça nous branche. C'est génial. Comment va Donnie (Don Johnson) ?" » racontait-il à Westworld en 2013. Mais quelques jours plus tard, quand un coursier sonne chez lui et lui remet une enveloppe contenant des billets d'avion, il doit se rendre à l'évidence : personne dans ses relations n'a suffisamment d'argent pour pousser un canular aussi loin…

Paradoxe, alors que SUICIDAL TENDENCIES, que l'on dit affilié à des gangs de la West Coast (Muir porte le bandana bleu des Venice White Boyz) et dont les concerts sont le théâtre de bastons entre membres du public, sera interdit de concert à Los Angeles jusqu'en 1989, le groupe se retrouve à la télé à une heure de grande écoute, dans la saison 2 de Miami Vice, plus précisément dans le 42e épisode titré "Free Verse" – "La Solution" dans sa version française.


​En 1993, on retrouvera "Institutionalized" sur « Still Cyco After All These Years », un album  qui présente l'intégralité de « Suicidal Tendencies » réenregistré dans la foulée de « Lights… Camera… Revolution! » en 1990 (avec Robert Trujillo à la basse, donc), ainsi que deux titres de « Join The Army » (1987) et la face B du single "Send Me Your Money". Si l'on en croit Muir, c'était une façon de faire découvrir aux nouveaux fans le passé du groupe. Peter Mensch, alors manager de SUICIDAL (et de METALLICA), avancera pour sa part que c'était surtout dans l'optique de gagner de l'argent cette fois puisque le frontman, unique membre permanent de la formation et principal compositeur, n'aurait rien touché sur les ventes. Quant au label de l'époque, qui confirmera que « Suicidal Tendencies » s'est écoulé à quelque 400 000 exemplaires, il affirmera que Muir avait reçu 100 000 dollars de royalties. La vérité est quelque part… 

Un an plus tard, BODY COUNT rendra hommage à SUICIDAL TENDENCIES avec "Institutionalized 2014", présent sur « Manslaughter », son cinquième album. Dans le texte alternatif, Ice-T aborde cette fois les problèmes existentiels des ados 2.0 (mot de passe perdu, parents qui reprochent à leur gamin de passer trop de temps sur leur Xbox…). « On a enregistré "Institutionalized" pour rendre hommage à SUICIDAL TENDENCIES, parce que c'était le premier groupe de la côte Ouest à porter des Dickies, des bandanas et à avoir le look West Coast, expliquait le rapper à Metal Hammer en 2015. Quand BODY COUNT a commencé, la plupart de nos fans aimaient SUICIDAL. Et ils sont venus à nos concerts. Alors on a joué cette chanson et on était heureux qu'elle leur plaise. Nous avons le plus grand respect pour le groupe. »



  

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Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
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3 commentaires

User
Michaël Chidoyan
le 09 avr. 2021 à 10:54
De très bonnes anecdotes merci pour toutes ses précisions
User
Laurence Faure
le 09 avr. 2021 à 11:57
Merci Michaël. :)
User
Manu La
le 17 nov. 2021 à 19:42
Oui Laurence, Très bel article, bien joué)
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