24 septembre 2021, 18:56

RED HOT CHILI PEPPERS

"Blood Sugar Sex Magik" (1991 - Rétro-chronique)

Album : Blood Sugar Sex Magik

Nous sommes (déjà !) en 2021 et cet album fête ses… 30 ans !

Voilà près de 40 ans que se sont formés en Californie les RED HOT CHILI PEPPERS. La formation dès ses débuts se composait déjà des indéboulonnables Anthony Kiedis au chant et, à la basse, Flea, de son vrai nom Michael Peter Balzary. Pressé d’en découdre, le groupe a rapidement sorti un premier album éponyme complètement barré et juste incompréhensible pour une large partie du public (mais lequel au final ?). Quant au grand public, lui… Mais ça tombe bien, il n’avait pas été prévu de lui plaire initialement. Avance rapide jusqu’en 1989 après que les RED HOT aient intégré en leurs rangs les nouvelles recrues qu’étaient le guitariste John Frusciante, alors tout juste âgé de 19 ans, et le batteur Chad Smith en lieu et place du guitariste Hillel Slovak, tragiquement décédé d’une overdose, et du batteur Jack Irons, profondément marqué par ce décès et qui choisit alors de quitter l’aventure (il rejoindra plus tard PEARL JAM). Le jeune guitariste est celui qui a su, à l’époque de « Mother’s Milk », insuffler davantage de mélodies dans les compositions de la formation, ce qui aura pour conséquence de faire décoller les ventes de ce disque précisément, avec en particulier leur reprise survitaminée du méga hit de Stevie Wonder, "Higher Ground". C’est après cet album qu’entre en piste une nouvelle maison de disques, Warner Bros., le quatuor quittant EMI et alors que les tractations avec Epic Records/Sony Music avaient pris trop de temps pour aboutir à un accord. On en connait qui ont dû entendre parler du pays après un tel loupé et au vu du succès de « Blood Sugar Sex Magik »…

Sur « Blood Sugar Sex Magik » et suite à des désaccords, exit le producteur Michael Beinhorn qui a travaillé avec eux sur leurs deux dernières réalisations, laissant ainsi le siège vacant à un Rick Rubin (BEASTIE BOYS, SLAYER, METALLICA entre autres), qui a de plus en plus le vent en poupe mais qui avait pourtant refusé de collaborer plus tôt avec eux en raison de leurs addictions. Presque un débutant dans le métier, l’on découvre en plus un ingénieur du son répondant au nom de Brendan O’Brien. Ce dernier s’est alors illustré sur le premier album de THE BLACK CROWES, « Shake Your Money Maker » et, son talent reconnu, il sera par la suite l’artisan de nombreux albums majeurs de groupes et artistes tels AC/DC, Bruce Springsteen, PEARL JAM ou encore KING’S X. Musicien accompli, on peut l’entendre notamment au mellotron et à l’orgue Hammond sur pas moins de six morceaux. Après une période de composition où Rubin va prodiguer ses conseils techniques mais également aider Anthony Kiedis à adopter une approche différente de ses textes, tout ce beau monde va établir ses quartiers dans The Mansion, un ancien manoir situé sur les hauteurs de Los Angeles où aurait vécu auparavant le magicien Houdini, sans que de réelles preuves de sa présence n’aient pu être produites. Le manoir appartient aujourd’hui au producteur et a vu défiler de nombreux artistes venus y enregistrer eux aussi leurs albums (Marilyn Manson, SLIPKNOT ou encore SYSTEM OF A DOWN). Présumé hanté, plusieurs groupes prétendent y avoir vécu des phénomènes inexpliqués, l’abus de substances en tous genres en étant possiblement la cause, du moins dans certains cas, ne généralisons pas voulez-vous. Disposant la batterie et les amplis dans la bibliothèque, les musiciens dans une autre pièce, Kiedis, lui, s’isole dans sa chambre pour faire ses prises, plus par timidité qu’autre chose car son approche vocale sur ce disque est toute nouvelle pour lui.
 


​A ce propos, les titres ébauchés sont assez différents de l’ambiance générale que l’on entend sur un globalement agressif « Mother’s Milk » et un très funky « The Uplift Mofo Party Plan » et ils piochent çà et là dans des styles bien distincts (punk, metal et funk bien sûr) pour proposer une suite de titres hétéroclites mais toujours emplis de l’ADN des RED HOT CHILI PEPPERS, formant un tout logique dirons-nous à l’arrivée.  Plutôt porté sur la chose à cette époque, Kiedis écrit sur le sexe ("Suck My Kiss", "If You Have To Ask", "Sir Psycho Sexy", "Give It Away" et "Blood Sugar Sex Magik") mais, au détour d’un carnet de poèmes du chanteur, Rubin déniche le texte qui deviendra celui de "Under The Bridge". Le chanteur doute que ces paroles, trop soft à son goût, sachent trouver grâce aux oreilles du public mais il se laisse finalement persuader. Bien lui en a pris, ce morceau étant devenu par la suite l’un de leurs plus grands succès. Un texte qui ne vante ni le sexe ni l’usage récréatif de drogues ni les deux ensemble, mais qui parle des piliers de ce pont où Kiedis allait rejoindre des marginaux pour s’adonner à l’héroïne, se mettant dans des états de délabrement qui l’ont pratiquement mené à la mort. Nous ne saurions d’ailleurs que trop vous conseiller la lecture de sa biographie parue en 2004, Scar Tissue, dans laquelle il évoque notamment sans fards ses vices et travers, y expliquant en détail l’envers des paroles de cette chanson. Celui-là même qui fumait des pétards avec son père alors qu’il n’était pas encore adolescent est donc forcément un homme sensible, bourré de failles et de doutes. Aussi, pense-t-il suivre la même voie que son père avec les femmes, évoquant ce sentiment au travers de "Breaking The Girl", qui parle de ses échecs sentimentaux. Là encore, carton plein et le grand public suivra. On trouve 17 titres sur l’album (19 pour la version iTunes de 2006 avec comme suppléments "Little Miss Lover" et "Castles Made Of Sand", deux reprises de Jimi Hendrix) bien que 25 chansons aient été enregistrées.

Bien sûr, impossible de taire le morceau le plus connu du groupe, "Give It Away", celui qui mettra le groupe sur orbite et en fera des superstars mondiales. La France est d’ailleurs à l’honneur pour la vidéo de ce morceau, le réalisateur français Stéphane Sednaoui ayant tapé dans l’œil de Kiedis. Auparavant, son travail avait été visible dans des clips de NTM et Ziggy Marley et il collaborera ensuite pour U2 ou MADONNA, embrassant une large palette de styles musicaux sans distinction. Le résultat de "Give It Away" résulte en un clip psychédélique ultra léché, tourné non pas en noir et blanc mais aux couleurs noir et chrome et dans lequel on voit les musiciens peints de couleur argentée. Un clip qui fera date dans l’histoire des vidéos musicales et marquera durablement les esprits, tournant en rotation lourde sur la chaîne musicale MTV mais aussi en France, sur M6 plus particulièrement.

La tournée qui n’en finira plus de s’étaler en salles et en festivals les verra sillonner en long et en large la planète avec deux venues en France en 1992. La première pour une date le 16 février au Zénith de Paris puis un passage télé le 29 février, répondant à l’invitation de Les Nuls, L’Emission lors de laquelle ils interprétèrent deux morceaux ("Give It Away" et "Under The Bridge", à retrouver en fin d’article, désolé pour la piètre qualité mais ce sont les seuls que l’on a pu trouver). Une fin d’émission où l’on voit se côtoyer le groupe, Philippe Dana (la voix off de l’émission) et Yves Robert, invité spécial ce soir-là. Moins drôle cette fois lorsque le 7 mai 92, à quelques minutes seulement du concert qu’ils s’apprêtaient à donner sur la scène du Club Quattro de Tokyo, John Frusciante déclare qu’il ne le fera pas. Après une angoisse et une tension bien légitimes suivies de longues minutes de négociations, il finit par accepter mais jure que c’est le dernier qu’il fait. Anthony Kiedis s’en rappelle en ces termes : « C’était le spectacle le plus horrible de tous les temps. Chaque note et chaque mot faisaient mal, sachant que nous n’étions plus un groupe. Je n’arrêtais pas de regarder John et de voir cette statue morte de mépris... Et cette nuit-là, John a disparu du monde tumultueux des RED HOT CHILI PEPPERS. » Les fans le verront pourtant revenir par deux fois, entre 1998 avec un autre départ en 2002 puis à nouveau en 2019 et il est à ce jour toujours membre officiel de la formation. L’immense succès de l’album aura permis au groupe d’en écouler plus de 10 millions d’exemplaires et il fut classé 1er dans les charts australiens, canadiens et néo-zélandais. 5 singles en seront issus, parus entre septembre 1991 ("Give It Away") et février 1993 ("If You Have To Ask").


​Pour aller plus loin :
« The Red Hot Chili Peppers » (1984) – la « foutraquattitude » à son paroxysme, un disque réservé à un public averti qui en vaut deux. Et même ainsi, ça surprend…
« The Uplift Mofo Party Plan » (1987) - la « foutraquattitude » ordonnée si l’on peut dire
« Mother's Milk » (1989) – ou comment commencer à faire de l’œil au public mainstream tout en restant assez métallique
« One Hot Minute » (1995) – le début d’une ère sonique nouvelle d’un groupe devenu superstar
« The Getaway » (2016) – dernier album en date et assez intéressant pour peu qu’on y prête une oreille attentive et ouverte...






Blogger : Jérôme Sérignac
Au sujet de l'auteur
Jérôme Sérignac
D’IRON MAIDEN (Up The Irons!) à CARCASS, de KING’S X à SLAYER, de LIVING COLOUR à MAYHEM, c’est simple, il n’est pas une chapelle du metal qu'il ne visite, sans compter sur son amour immodéré pour la musique au sens le plus large possible, englobant à 360° la (quasi) totalité des styles existants. Ainsi, il n’est pas rare qu’il pose aussi sur sa platine un disque de THE DOORS, d' ISRAEL VIBRATION, de NTM, de James BROWN, un vieux Jean-Michel JARRE, Elvis PRESLEY, THE EASYBEATS, les SEX PISTOLS, Hubert-Félix THIÉFAINE ou SUPERTRAMP, de WAGNER avec tous les groupes metal susnommés et ce, de la façon la plus aléatoire possible. Il rejoint l’équipe en février 2016, ce qui lui a permis depuis de coucher par écrit ses impressions, son ressenti, bref d’exprimer tout le bien (ou le mal parfois) qu’il éprouve au fil des écoutes d'albums et des concerts qu’il chronique pour HARD FORCE.
Ses autres publications
Cookies et autres traceurs

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de Cookies ou autres traceurs pour mémoriser vos recherches ou pour réaliser des statistiques de visites.
En savoir plus sur les cookies : mentions légales

OK