4 octobre 2022, 18:36

LES GRANDES GUEULES

Dave Mustaine rêve d'une collaboration avec James Hetfield


Pour suivre l'actualité metal, il y a bien sûr au quotidien HARD FORCE ainsi que Planète Metal qui, chaque dimanche en fin de journée, revient sur quelques-uns des faits marquants de la semaine écoulée. Mais il y a aussi des infos un peu plus "inside", anecdotes, déclarations, petites querelles et autres coups plus ou moins bas, à retrouver dans Les Grandes Gueules... Cette semaine, revenons sur les dernières déclarations de Dave Mustaine sur METALLICA, entre réécriture de l'histoire, mégalomanie et douce utopie.


Il a beau être en pleine promotion de « The Sick, The Dying… And The Dead! », seizième album de MEGADETH bien accueilli par la critique et les fans, Dave Mustaine ne semble avoir qu'un mot à la bouche : « METALLICA ». Dont il ne fait plus partie depuis bientôt 40 ans. Quand même. Bon, c'est vrai que l'on peut soupçonner les journalistes de l'aiguiller légèrement sur le sujet, mais de même que tous les chemins mènent à Rome, on dirait bien que toutes les interviews de MegaDave mènent à son ex-groupe. Clair qu'il n'a toujours pas digéré de s'en être fait virer comme un malpropre au réveil, le 11 avril 1983, alors qu'il était à New York en compagnie de James Hetfield, Lars Ulrich et Cliff Burton pour l'enregistrement de leur premier album, « Kill 'Em All », qui aura l'impact que l'on sait sur le thrash et le speed metal. On ne peut pourtant pas dire qu'il ne l'avait pas cherché.

Les deux premiers, qui en ont marre, en vrac, qu'il ait des problèmes de drogue, l'alcool mauvais, qu'il soit mégalo et qu'il s'en soit déjà pris physiquement aux autres musiciens (on en reparle un peu plus loin), ont en effet embauché en douce Kirk Hammett, alors guitariste d'EXODUS. Qui n'ont pas très bien vécu le départ de leur soliste, mais c'est une autre histoire. Dave n'aura donc pas l'occasion d'essayer de faire amende honorable : son sort est scellé et c'est en bus qu'il regagnera la Californie au terme de quatre looongues journées de transport. Au cours desquelles il aura tout le loisir de préparer sa vengeance. Et de trouver au passage le nom de son nouveau groupe : MEGADETH. Directement emprunté au prospectus où figure le discours d'un sénateur californien sur lequel il griffonne les textes de la première chanson de son après-METALLICA, qui deviendra "Set The World Afire", ce dernier alertant sur les dangers d'un conflit nucléaire (on est alors en pleine guerre froide) qui pourrait résulter en "megadeath" : des millions des morts.


​Depuis, c'est une histoire d'amour et de haine qu'il voue à Hetfield & Co. Le côté positif, c'est que son éviction et son désir de revanche et de reconnaissance ont donné naissance à l'un des plus grands groupes de thrash de l'histoire. Qui figure dans le Big 4, également composé de METALLICA, dans le rôle de la tête de gondole, SLAYER (R.I.P.) et ANTHRAX. Certains considèrent que SLAYER, qui, contrairement aux trois autres, n'a jamais changé son fusil d'épaule/retourné sa veste à clous selon les opinions, mérite de figurer en seconde position quand beaucoup d'autres votent d'emblée pour MEGADETH. Quoi qu'il en soit, aux yeux de Mustaine, la seconde place, c'est celle du premier perdant.

Le côté négatif – pour lui du moins et pour ses "employés", dans la mesure où il est plus que jamais le seul et unique maître à bord du navire MEGADETH – c'est que malgré sa réussite, ses quasi 50 millions d'albums vendus dans le monde et un Grammy Award (on s'en fout un peu, comme tous les groupes qui n'en ont jamais eu d'ailleurs, mais cela fait quand même toujours bien sur un CV), il n'est jamais parvenu à dépasser et à écraser ses ex. Et ça, ça le perturbe fortement. Au point d'avoir collectionné les musiciens qu'il a jetés à sa guise tout au long de sa carrière. David Ellefson, qui fut longtemps son courageux lieutenant avant de se faire virer avec pertes et fracas en juin 2021 pour une sombre histoire de fesses, puis de voir ses parties de basse réenregistrées par Steve DiGiorgio (TESTAMENT), en est persuadé : « Je crois bien qu'il ne s'est jamais remis de s'être fait jeter de METALLICA, disait-il peu de temps après sa mise à pied. Et il voulait faire subir à quelqu'un ce qu'ils lui ont fait, c'est-à-dire le dégager et faire réenregistrer ses parties instrumentales par un autre. » Un côté : "Do unto others as they've done to you" (fais aux autres ce qu'ils t'ont fait subir), comme chantera en 1984 Hetfield dans “Fight Fire With Fire”...
 

« De James, Lars et moi, c'était bien moi le mâle alphaPourquoi étais-je obligé de tout faire quand j'étais dans le groupe ? Pourquoi me demandaient-ils toujours de parler avec les organisateurs et de récupérer le cachet des concerts ? Pourquoi est-ce moi qui devais me battre ? Pourquoi est-ce moi qui parlais sur scène entre les chansons ? » - Dave Mustaine à propos de son passage dans METALLICA


Du côté de METALLICA, si les relations avec leur ex-guitariste semblent désormais apaisées, il est évident qu'Hetfield et Ulrich se fichent à peu près autant de lui que de leur premier jeu de cordes/première paire de baguettes. Du coup, ses remarques se heurtant au mur de leur indifférence, Mustaine tente de les asticoter par interviews interposées. Début septembre, dans un entretien paru sur Classic Rock, quand le journaliste s'étonne que, dans son autobiographie, Mustaine: A Heavy Metal Memoir (Mustaine en V.F.), sortie en 2010, il se soit érigé en leader du groupe, Dave a décidé de jouer au jeu de celui qui a la plus grosse (tête, qu'allez-vous imaginer ?). « De James, Lars et moi, c'était bien moi le mâle alpha (NDJ : le mâle dominant). Pourquoi étais-je obligé de tout faire quand j'étais dans le groupe ? Pourquoi me demandaient-ils toujours de parler avec les organisateurs et de récupérer le cachet des concerts ? Pourquoi est-ce moi qui devais me battre ? Pourquoi est-ce moi qui parlais sur scène entre les chansons ? ». Non sans ajouter dans la foulée que de toute façon, il s'en tape et qu'il ne parle de METALLICA (chose dont s'abstient en général Jason Newsted, éternel bizuth, qui a passé, lui, 15 ans au sein du groupe à ne pas rigoler tous les jours en dehors de la scène) que parce qu'il les aime.

Dans la même interview, Mustaine explique que, suite au coup de blues d'Hetfield en plein concert au Brésil, en mai dernier, au cours duquel il a déclaré au public : « Je n'étais pas au top avant de monter sur scène ce soir. J'étais anxieux. Je me disais que j'étais vieux, que je ne savais plus jouer (…) », il lui avait envoyé un SMS deux jours plus tard. « Je lui ai dit : "James, j'ai beaucoup d'affection pour toi et j'adore ta façon de jouer". Il n'a pas ouvert mon message et n'a pas répondu. Evidemment. Mais pourquoi l'aurait-il fait ? Je voulais juste qu'il sache ce que j'éprouvais. Il faut se rappeler que quand j'ai rejoint METALLICA, James ne jouait pas de guitare. Il s'y est juste mis quand je suis entré dans le groupe. En toute honnêteté, c'est l'un des meilleurs guitaristes de metal du monde. Alors il ne faut pas qu'il ait cette fausse impression sur son jeu car il a un talent de folie. Je voulais donc juste lui dire quelque chose. Je n'ai pas twitté ma réponse. Je ne voulais pas que quiconque sache ce que j'avais dit. Mais j'en parle parce que c'est toi (NDJ : le journaliste de Classic Rock) qui a mis le sujet sur la table. » 
Le simple fait que le message soit resté sur "non lu" semble pourtant clair… Un peu comme quand, dans un autre registre, Ozzy a contacté Jimmy Page pour l'inviter à jouer sur « Patient Number 9 », son dernier album en date, et que ce dernier n'a jamais pris la peine de repondre… Ambiance : "Et si tu allais plutôt jouer sur l'autoroute ?"...

Quelques jours plus tard, Ron McGovney, premier bassiste et membre fondateur de METALLICA dans lequel il a joué entre 1981 et 1982 avant d'être remplacé par Cliff Burton, et qui a donc été "contemporain" de Mustaine pendant quelques mois, commentait sobrement dans un Tweet : « Dave parlait aux promoteurs ? Récupérait les cachets ? James ne jouait pas de guitare avant METALLICA ? Ce n'est pas ce dont je me souviens. C'est même plutôt l'inverse ». Un ange passe, vêtu d'un T-shirt METALLICA...


​Toujours le mois dernier, à l'occasion d'une session Questions/réponses avec les internautes organisée par Revolver Magazine, Mustaine a rappelé la raison (enfin, du moins celle qui semble avoir signé son arrêt de mort) de son licenciement : son chien. Qu'il avait amené à une répétition du groupe et qui avait éraflé la peinture de la portière de la voiture de Ron. Hetfield avait gueulé et lui a avait mis un coup de pied (au chien). Dave, pas content, lui avait mis un coup de poing (à James). « C'était idiot de ma part d'avoir pris mon chien avec moi à la répétition et c'était encore plus idiot de ma part de frapper James, a-t-il reconnu. J'ai beaucoup de respect pour lui et pour son jeu de guitare et j'espère qu'il sait qu'il y a beaucoup de gens, comme moi, qui l'apprécient et qui se foutent qu'il soit dans METALLICA. » Ce qu'il sous-entend vraisemblablement, c'est que Papa Het est quelqu'un d'appréciable, humainement parlant, sans tenir compte de son statut de frontman du plus gros groupe de metal en activité – n'allez pas lui faire dire ce qu'il n'a peut-être même pas pensé !

Sachant tout cela, quand, il y a peu, le frontman de MEGADETH a annoncé à Vinyl Writer Music qu'il rêvait d'une collaboration avec le frontman de 'TALLICA, comment dire… « J'espère secrètement qu'un jour, James et moi nous pourrons composer à nouveau ensemble. Je pense que le monde entier en a très envie et je pense qu'il y a des chances pour que ça se concrétise dans le futur. D'après moi, un jour, James changera peut-être d'avis et tous les deux, nous pourrons refaire quelque chose ensemble. Je crois que c'est ce qui m'a toujours poussé à aller de l'avant. Ça pourrait être bien pour MEGADETH et aussi pour METALLICA. » Les "spécialistes" du Net jugeront...
 

 « J'espère secrètement qu'un jour, James et moi nous pourrons composer à nouveau ensemble. Je pense que le monde entier en a très envie et je pense qu'il y a des chances pour que ça se concrétise dans le futur. » - Dave Mustaine


Il y a un peu plus de dix ans, après la tournée du Big 4, Mustaine avait déjà fait part de ses aspirations, lui qui aurait alors rêvé de former un supergroupe composé de la paire Hetfield-Ulrich, d'Ellefson et de lui-même. Ce qui n'avait pas emballé James, surpris par tant d'audace… « Dave est clean à présent. Et un peu moins amer, commentait-il à l'époque dans une interview avec So What!, magazine officiel des Four Horsemen. Mais j'ai lu beaucoup de choses dans la presse où il parle de taper le bœuf avec nous et de faire un album. C'est de la folie. Quand je lis ça, je me dis : "Attends, c'est le Dave que l'on voulait oublier. La grande gueule qui en rajoute". Mais il a une certaine authenticité quand il parle. Il ne réfléchit pas trop, il est très spontané. Et quand il dit ça, ça part d'un bon sentiment. »


Extrait du DVD The Big 4: Live in Sofia, Bulgaria, capté le 22 juin 2010 et sorti en octobre de la même année : "Am I Evil? " de DIAMOND HEAD. METALLICA et quelques invités de marque.


L'éconduit avait donc mis son mouchoir par-dessus et présenté ses plates excuses à Hetfield par message interposé, comme il l'expliquait à l'époque à Artisan News. « Je lui ai dit que je n'en parlerais plus. Je voulais juste qu'ils sachent que j'ai beaucoup d'affection pour eux, qu'ils me manquent et que j'étais heureux de jouer avec eux (NDJ : au concert célébrant les 30 ans de METALLICA au Fillmore à San Francisco le 10 décembre 2011). Si ce n'est pas réciproque, alors je comprends. J'ai toujours du respect pour James et j'ai toujours de l'affection pour lui. S'il ne veut plus jouer avec moi, pas de problème. S'il n'aime pas l'idée que j'ai proposée, pas de problème non plus. Ce n'est pas comme si j'avais dit que ça allait se concrétiser, c'est quelque chose que j'aimerais voir se concrétiser. Mais à présent, ça ne fait plus partie de ma bucket list. » 


C'est que, tout tyran "domestique" qu'il est au sein de son groupe, il finirait presque par nous faire de la peine, Dave. A s'accrocher envers et contre tout, en amoureux bafoué qui ne comprend pas que quand c'est fini, il faut passer à autre chose, ce qu'il a très bien réussi avec son groupe d'ailleurs. Que quand on s'est fait virer par la porte, puis par la fenêtre, inutile de tenter de rentrer par le Velux. « Je suis très entêté, c'est comme ça que j'ai mené MEGADETH où il en est aujourd'hui » croit-il bon de préciser. 

Même si une collaboration, ne serait-ce que le temps d'une reprise pour une bonne cause (All Within My Hands, au hasard ?), aurait bien évidemment de la gueule, et même si l'on n'est jamais à l'abri d'un retournement de situation, voire d'une bonne surprise, le pourcentage de chances de la voir se concrétiser est bien faible. Le "futur" auquel MegaDave fait référence a des airs de "When Hell freezes over" ("Quand il gèlera en Enfer"). Qui, comme vous le savez certainement en bons fans de longue date de METALLICA que vous êtes, était le titre originel de la première mouture de “The Call Of Ktulu” en démo. C'est également le dernier morceau coécrit par Mustaine jamais enregistré par METALLICA...

Les Grandes Gueules 1
Les Grandes Gueules 2
Les Grandes Gueules 3

Blogger : Laurence Faure
Au sujet de l'auteur
Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
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