Lors d’une première écoute, si les antennes se dressent et que le pied commence à battre la cadence dès les premières notes, c’est plutôt bon signe. D’où l’envie de fouiller et d’en apprendre un peu plus sur le groupe en question et son nouvel album, « Gawdzillionaire ». OTHERWISE est un groupe de hard rock alternatif, crée en 2009, originaire de Las Vegas, la cité de tous les excès où le dollar règne en maître. Totalement à l’opposé du spectre avec, apparemment, son lot de galères traversées, le quatuor (les frères Adrian Patrick au chant et Ryan Patrick à la guitare, Nick Bedrosian à la basse, ainsi que Joe Conner à la batterie) est bien placé pour dépeindre une société pleine d’artifices et de faux-semblants.
Onze morceaux (plus une reprise) de metal groovy, varié et réjouissant composent cet album, et l’on rentre immédiatement dans le vif du sujet avec "Full Disclosure" qui donne d’emblée la patate, avec son refrain catchy (mention particulière pour le flow d’Adrian Patrick, qui navigue entre phrasé rap, chant mélodique en voix claire et screams, le tout d’une manière particulièrement fluide), sa rythmique dansante et ses guitares diablement rock'n'roll. "Exit Wound" est tout aussi efficace, avec des relents punkisants et ses paroles autobiographiques qui traitent de santé mentale, comme l’avoue le chanteur : « I've dealt with depression and doubt for many years. To me, "Exit Wound" represents standing up, dusting the dirt off, and wearing my scars proudly. It is ok to not be ok ». (« J'ai été confronté à la dépression et au doute pendant de nombreuses années. Pour moi, "Exit Wound" représente le fait de se lever, d'épousseter la saleté et de porter fièrement mes cicatrices. C'est normal de ne pas aller bien. »).
"New Way To Hate" est heavy à souhait, alors que "Failure" et "Coffins" reprennent un rythme plus rapide et entraîinant. Avec ses chansons courtes et immédiates et son gros rock burné, on pense souvent à NICKELBACK, le côté égrillard en moins (et on ne s’en plaindra pas). En effet, OTHERWISE aborde des thèmes plus profonds (sans mauvais jeu de mots) que les Canadiens, fort portés sur leurs entrejambes et ceux de la gent féminine. Il faut dire que le groupe a roulé sa bosse et que les frangins dirigent une association (501c3 Life By Music) qui offre la possibilité aux enfants d’aborder la musique en fournissant des instruments par le biais d'un partenariat avec Gibson, et bien d’autres initiatives de ce genre, afin que l’étincelle magique de la musique s’allume dans le regard des petits.
"Hollywood Minute", avec son riff irrésistible, donne envie de se trémousser et "Gawdzillionaire" avec son refrain métissé et son pont assuré par le rappeur Ekoh, est une indéniable réussite, dont le final nous transporte abruptement dans un bar lounge à l’ambiance feutrée, avec ses paroles caustiques qui écornent joyeusement le mythe de l’American Dream : « Our wallets look like graveyards filled with dead presidents. In fraud we trust and we just obey » (« Nos portefeuilles ressemblent à des cimetières remplis de présidents morts Nous faisons confiance à la fraude et nous nous contentons d’obéir. »).
"La Familia" est, comme son titre l’indique, un hommage à la famille, aux proches, à ceux qui nous soutiennent et nous aiment au quotidien, quoi qu’il advienne. Avec un rythme bien speedé, un refrain mémorisable et un solo de guitare bien senti, c’est un régal. Puis, vient "Paradise", un autre très bon morceau, rugueux et agressif, avec la participation d’Heidi Shepherd des BUTCHER BABIES. Les deux voix se marient à merveille pour ce morceau coup de poing, sans aucun doute l’un des points forts de cet album. "Exorcism", quoiqu’un poil en dessous, reste très plaisant. La fin de l’album se révèle plus anecdotique avec "Camouflage", sympa mais pas indispensable, et la reprise de BLIND MELON, "No Rain", qui n’apporte rien de plus à la formule déjà bien rodée du quatuor.
« Gawdzillionaire » est un album réjouissant, spontané et frais, qui aborde des thèmes très actuels face aux angoisses que provoque le monde dans lequel nous vivons. OTHERWISE offre une dose de fun dans un univers sombre, histoire de ne pas se laisser envahir par la morosité ambiante, et voir la vie autrement. Et si la musique du groupe n’est peut-être pas très originale, elle est rudement bien faite et interprétée par des musiciens investis et sincères qui charment instantanément avec leur irréfutable capital sympathie.
