9 juin 2025, 18:30

VOLBEAT

Interview Kaspar Boye Larsen


VOLBEAT a sorti ce 6 juin son neuvième disque studio, « God Of Angels Trust », une production très variée qui revient aux sources de ce qui fait le groupe, et pour nous une parfaite occasion pour nous entretenir avec Kaspar Boye Larsen. Il nous donne sa perspective unique sur la création d’un album de VOLBEAT, nous parle de la tournée à venir du groupe danois, et révèle en exclusivité les prochaines étapes pour son groupe de crust punk, ANTI RITUAL !
 

J’étais très surpris d’apprendre que « God Of Angels Trust » a été écrit et enregistré en seulement cinq semaines. Comment était-ce de travailler aussi rapidement ?
Je pense que c’était parce que Michael (Poulsen, chant et guitare, ndlr) avait fait son projet death metal, donc il était un peu dans sa bulle en revenant après tout ça. Il voulait tout de suite se remettre à écrire, et quand il est dans cet état d'esprit, il produit beaucoup ! Donc ça a pris environ un mois et demi, pendant lequel on répétait deux fois par semaine. Et à chaque répétition, il y avait un nouveau morceau, et ça a rapidement commencé à s’accumuler. Nous pensions au départ avoir huit chansons sur l’album, mais il en a trouvé deux autres supplémentaires. Ce disque a donc été écrit en cinq ou six semaines, mais le studio nous a pris trois semaines de plus. J’ai trouvé que c’était rapide, et j’avais un peu de mal à différencier les morceaux, parce tout allait si vite et était écrit si rapidement !

Cela t’a un peu mis en difficulté par moments ?
Oui, surtout pour la raison que je viens d’évoquer. Par exemple, pour les titres des chansons. Généralement, on trouve des titres temporaires pour travailler puis, quand les paroles sont terminées, on ajoute les vrais titres, mais on ne se souvient pas tout de suite lequel est lequel. Quand on bosse aussi vite, cela devient un peu une longue et seule chanson ! J’ai eu un peu de mal avec ça. Ça va mieux maintenant (rire) ! Mais j’ai aussi eu quelques soucis en studio, car j’étais malade quand on y est entré. Je me sentais malade et j’avais en fait une forme de pneumonie dont j'ignorais l'existence. Durant la deuxième semaine, j’ai dû me rendre à l’hôpital et j’y ai été hospitalisé trois jours. Je ne me sentais pas bien en studio pour cette raison. Quand je suis sorti de l’hôpital, je suis retourné en studio enregistrer mes parties, mais ce n’était pas idéal.

Vous avez donc écrit dix morceaux et rien n’a été retiré à aucune étape ?
Non, rien. Ça a toujours été comme ça dans VOLBEAT, même avant que je n’arrive. Quand 13, 14 ou 15 chansons sont écrites, on enregistre tout… et tout sort. Rien ne se perd ! Il n’y a aucun morceau inédit où que ce soit. Quand Michael sort de sa phase d’écriture, on enregistre. On a donc dix chansons écrites rapidement, enregistrées rapidement, et c’est tout !

Et pourtant, vous ne perdez rien en profondeur, au contraire : cet album est probablement l'un des plus profonds que vous ayez sortis avec le groupe ! Michael y traite de sujets très personnels, mais évoque aussi l’état actuel du monde sur "Devils Are Awake", par exemple. Certains morceaux te touchent particulièrement ?
Eh bien, je pense que je m’identifie à toutes les paroles, parce que lui et moi avons la même histoire. Quand Michael chante sur ses enfants et sur son père, je m’y identifie totalement, car j’ai des enfants du même âge que les siens, et mon père est également décédé. Et, bien sûr, le monde d’aujourd’hui est très sombre. J’ai toujours été inconsciemment attiré vers les paroles et la musique sombres, donc je m’y identifie totalement. Peut-être même aujourd’hui, plus que jamais.

J’ai beaucoup aimé "Better Be Fueled Than Tamed", notamment grâce à ta ligne de basse sur ce morceau…
C’est une de mes préférées aussi, parce qu’elle est très fun à jouer ! Quand Michael a proposé cette chanson, avec les riffs, Jon (Larsen, batterie) a rajouté la batterie, et j’avais l’impression d’entendre une chanson rockabilly. Je me suis donc demandé ce que je jouerais si j'étais à la contrebasse. Et c’est comme ça que j’ai trouvé ces lignes. Je suis très content que tu les aies remarquées !

A vrai dire, je suis un grand fan de punk rock des années 90, donc j’ai tendance à beaucoup écouter les lignes de basse, et celle-ci m’y a un peu fait penser.
J’aime beaucoup cette comparaison. Bon, ce n’est pas aussi compliqué qu’une chanson de RANCID, mais ça ressemble un peu à DESCENDENTS, qui est un de mes groupes préférés.

Et est-ce que vous parvenez à ce genre de résultat en improvisant autour des morceaux, ou est-ce que Michael arrive avec tout déjà écrit ?
Eh bien, quand on entre en studio, tout est prêt. La guitare rythmique, la basse, la batterie et les lignes de chant sont prêtes à être enregistrées. Cette fois-ci, au début de l’été, je faisais des démos en enregistrant dans la salle de répétition, donc j’avais un peu plus le temps pour arranger mes lignes de basse. Je n’improvisais pas, et je ne copiais pas juste la guitare ; j’avais juste le temps de faire mon propre truc. Mais la seule chose qui ne soit pas totalement achevée quand on entre en studio, c’est la guitare lead bien sûr, et la plupart des parties de guitare mélodiques. Ce n’est pas improvisé, mais Michael essaie beaucoup de trucs, il crée toutes ces parties mélodiques, et soudain trouve ce qui fonctionne. Mais c’est la seule chose qui soit en quelque sorte improvisée ; tout le reste est plutôt gravé dans le marbre. Mes lignes de basse étaient donc complètement définies sur cet album. Cependant, quand on répète, tout le monde n’écoute pas la basse (rire) !  Ils étaient surpris quand j’ai commencé à enregistrer "Better Be Fueled Than Tamed" (rire) ! Je les voyais sur leurs téléphones, puis ils ont levé la tête et ont dit « oh, c’était ça que tu jouais » ! Mais ils ont aimé, donc voilà le résultat.

J’ai trouvé que sur cet album vous avez aussi dépassé des limites que vous vous étiez peut-être imposées par le passé. Et j’ai appris que Michael avait écrit en essayant de s’en fixer le moins possible. Est-ce que le fait de composer sans suivre de ligne directrice vous a permis quelque part de redécouvrir l’essence originelle de VOLBEAT ?
Je pense que c’était le but, surtout pour la première moitié des chansons que Michael a écrites. Il n'a pas vraiment réfléchi aux structures de chansons traditionnelles. Il voulait revenir à ça, notamment parce qu’il sortait de ce cycle avec ASINHELL, son groupe de death metal, qui est plutôt old school. Donc il était dans cet état d’esprit, et ne s'est pas trop préoccupé des structures, un peu comme sur les deux premiers albums de VOLBEAT. C’était davantage un enchaînement de riffs. Il se disait « on a un riff cool, jouons le plusieurs fois, puis mettons un autre riff cool, puis on reviendra à quelque chose d’autre ». Il ne réfléchissait pas trop aux couplets et aux refrains, à ce genre de structure. Je pense que c’était délibéré de revenir aux racines comme ça. On retrouve cette approche sur à peu près la moitié des morceaux, plus ou moins. Puis, nous sommes partis dans une direction où il voulait avoir un son un peu plus traditionnel, avec un refrain fort, parce qu’on s’est beaucoup développés depuis les débuts, où l’on joue ce qui, selon nous, sonne bien. Surtout dans le death metal, il n’y a pas de refrain ni de couplet, on joue ce qui nous plaît. On a tous nos racines dans le death metal et le metal extrême. Mais quand on réalise beaucoup d’albums et qu'on écrit autant de chansons, on évolue. On finit par trouver quelque chose de bien dans cette bonne vieille structure couplet/refrain. C’est juste deux manières différentes d’écrire, et je pense que sur cet album, nous avons les deux.


​Y a-t-il un moment où Michael est venu avec un titre qui vous a complètement surpris, Jon et toi ?
Oui, il y avait "Demonic Depression". Elle sonnait un peu différente quand il l’a présentée la première fois, elle était un peu plus "hard", avec de la double pédale et j’avais un peu peur. Je me suis dit « wow, c’est la première chanson et tu attaques par un morceau presque thrash ! » J’étais un peu surpris et nerveux : je me demandais si le reste de l’album serait comme ça. Mais ça n’a pas été le cas. La chanson a un peu changé, elle n’avait pas le refrain qu’elle a maintenant, et je pense qu’il y a dessus l'une de ses meilleures lignes de chant. Elle est juste parfaite ! Elle a un côté un peu années 80. Ça me rappelle un truc, mais je n’arrive pas à savoir lequel.

C’est probablement la chanson la plus heavy de VOLBEAT depuis un bon moment et elle parle de dépression, qui est un sujet universel, surtout actuellement, après la COVID.
Oui, je pense que d’une certaine manière, chacun peut s’y identifier. Peut-être pas en tant que maladie, mais tout le monde a un jour ou l’autre ces pensées noires dont on n’arrive pas à se débarrasser.

Par opposition, j’ai aussi été très surpris par "Time Will Heal", car il s‘agit d’une des chansons les plus porteuses d’espoir de votre discographie. Comment avez-vous travaillé dessus comparée, par exemple, à "By A Monster’s Hand" ?
C’était là aussi une chanson que Michael avait et qui était terminée quand il nous l’a présentée. Il y avait même déjà cette partie de guitare mélodique du début. Sur les albums précédents, Michael avait pour habitude de m’envoyer des démos de lui, chantant sur de la guitare, parfois acoustique, ou avec une boîte à rythmes, de manière très simple. Il n’a pas procédé comme ça sur cet album… à l’exception de ce morceau. C’est vraiment le maître de l’écriture pour ce genre de chanson un peu mélancolique, même si elle n’est pas sombre. A chaque fois qu’il fait ces lignes de guitare mélodiques, il y a un côté mélancolique derrière que j'adore ! J’adore cette chanson ! A vrai dire sur celle-ci, j’ai eu une approche très groupe de rock indé, un peu alternatif. Une partie de ces lignes de basse étaient construites un peu comme si je jouais dans les PIXIES ou DINOSAUR JR, ce genre-là. C’était fun !

Et la partie lead, avec le petit truc de guitare qui brille à travers le mix, fait un peu penser à un rayon de lumière au coeur de l’ombre. C’est ce que j’aime le plus dans cette chanson.
Oui ! Je pense qu’on parlait un peu du fait qu’on avait le COLDPLAY des débuts en tête sur cette chanson. Ce n’est pas une mauvaise chose pour nous, car on aime beaucoup COLDPLAY.

J’ai aussi vu les réactions à "In The Barn Of The Goat Giving Birth To Satan’s Spawn In A Dying World Of Doom" (j’arrive à le dire d’une traite sans antisèche, d’où sa remarque ci-dessous, ndlr)…
Oh, bien joué !

Merci ! Les fans ont l’air d’adorer ce passage (si vous avez entendu la chanson, vous savez lequel, ndlr), qui est très bizarre la première fois qu’on l’entend, mais qui est quasi addictif !
Oui, c’était étrange, car une grande partie de la chanson est plutôt traditionnelle, et on a même déjà fait des choses proches de l’intro, mais il y a quelque chose dans ce refrain… Ce n’est même pas un refrain, c’est le moment fort de la chanson. Il arrive super tard et c’est le titre de la chanson ! C’est très bizarre, mais je suis d’accord avec toi. Et c’est vraiment un morceau qu’on prend du plaisir à jouer. J’aime, car je peux un peu improviser dessus. Au début, il n’y a qu’un accord, donc tu peux te permettre ce que tu veux !

Quelle chanson de l’album correspondrait le mieux à ton humeur aujourd’hui ?
Tout de suite, je dirais que ce serait "Better Be Fueled Than Tamed". C’est plutôt joyeux au niveau du jeu, et c’est une chanson qui sent un peu la fête, les bons moments. Et c’est comme ça que je me sens tout de suite. Mais dans deux heures, quand je serai un peu fatigué et que je devrai coucher les enfants, ce sera une autre chanson, c’est certain (rire) !

Les parties guitare lead sur l’album sont interprétées par Flemming C Lund, qui a joué en tournée avec vous récemment après le départ de Rob Caggiano…
Il sera d’ailleurs aussi avec nous pour l’année qui vient, et peut-être la suivante !

Parfait ! Je me demandais justement s’il allait finir par rejoindre officiellement le groupe à un moment ou si vous alliez rester officiellement un power-trio ?
Eh bien, il l’est pour cette année. Il fait partie du groupe pour le moment, et personne ne sait de quoi l’avenir sera fait. On ne peut rien prédire, car tout est dingue en ce moment. Nous prévoyons les choses maximum un an à l'avance.

Vous tournez aux Etats-Unis et vous serez bientôt en Europe avec BUSH et WITCH FEVER. Que peut-on attendre de cette tournée ?
Vous pouvez prévoir un concert dans la grande tradition de VOLBEAT. Bien sûr, il y aura de nouveaux morceaux, mais on ne jouera pas que ça… même si on aimerait bien (rire) ! On souhaiterait aussi taper dans tous les autres morceaux, mais établir une setlist est difficile, et ça le devient encore plus à chaque sortie d’album, chacun de nous trois revendiquant ses préférés… Et il y en a que les gars ne veulent plus vraiment jouer, car ils les ont interprétés des milliers de fois. Composer une setlist est difficile. Il y aura de l'ancien, des classiques, et beaucoup de nouveaux morceaux aussi ! On travaille également sur la scénographie et tout ce qui s'y rapporte, car je crois que l’Europe profitera de quelque chose que les Etats-Unis et le Canada n'auront pas eu.

Au niveau des affiches, j’ai l’impression que vous mélangez pas mal le vintage et le moderne sur ce cycle. D’un côté, on a THREE DAYS GRACE, BUSH et HALESTORM, qui sont des groupes établis depuis longtemps, de l’autre WAGE WAR, WITCH FEVER et THE GHOST INSIDE, qui sont un peu plus récents. Est-ce un choix conscient de vous placer à cheval sur deux générations ?
A vrai dire, sur la tournée européenne, on devait avoir GEL aussi. J’étais un grand fan de ce groupe, et j’avais hâte de jouer avec eux, mais malheureusement ils se sont séparés. Je trouve que c’est vraiment bien d’avoir des styles différents. On avait tourné avec TEENAGE BOTTLE ROCKET, il y a quelques années, mais aussi avec NAPALM DEATH. Je me rappelle que quand j’allais en concerts et que je voyais cinq groupes de death metal ou de hardcore à la suite, je me disais que c'était quand même pas mal de varier un peu ! Et c’est aussi génial d’avoir des groupes plus jeunes. Nous sommes vieux et il faut qu’on s’inspire parfois de l’énergie de ces jeunes groupes.

Pour ma dernière question, j’aimerais te parler d’un autre projet. Tu as ressorti de la musique avec ANTI RITUAL en 2021 et en 2023, après des années de silence. Penses-tu que vous allez tourner avec ANTI-RITUAL dans les années qui viennent, quand ton agenda le permettra ?
Eh bien, on joue quelques concerts par-ci par-là, parfois même à l’international. Nous sommes allés en Allemagne et en Norvège. A vrai dire, nous venons d’enregistrer quatre nouveaux morceaux qui paraîtront en septembre, je crois, juste avant la tournée européenne. On va les sortir, puis jouer quelques concerts, mais j’espère vraiment que nous pourrons réaliser une vraie tournée avec un groupe !

On adorerait !
C’est fun, dans le groupe, ce sont de vieux potes et moi. Il faut qu'on se marre, car  jouer du grindcore et du crust punk, ce n’est pas quelque chose dont on peut vivre ! Ce serait super de partir sur la route jouer tout ça… Vous avez une scène grindcore en France ?

Ça se développe pas mal, quand on voit des groupes comme GUTALAX remplir des salles à Paris…
Oh OK ! Donc il y a en quelque sorte une scène grindcore chez vous ! Parfait ! Peut-être qu’on devrait envoyer des disques à des producteurs et au Hellfest, alors… Ce serait tellement sympa de jouer en France !

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