"Gothic" fut un traumatisme, "Draconian Times" un baume à l'âme, "Host" un air frais salvateur et ce "Tragic Idol" (produit par Jens Bogren) à l'artwork (enfin) magnifiquement emballé (inspirée pommade due au très prolixe Valnoir), élixir de jeunesse.
Gothic Doom Death Metal aux dessous dentelés (électro) pop, cette sombre cathédrale (l'autre, celle de Lee Dorrian, semble vouée à la ruine en attendant un ultime album), mêle avec maestria mélancolie et mélodie, metal racé et ambiances crépusculaires, album dépouillé, humble mais retrouvant au plus près le caractère intrinsèque de ce que doit être PARADISE LOST, une entité lunaire ("Solitary One" ou "Crucify" pour ne pas démentir mes propos), un monstre habité par d'abyssaux tourments, magnifiquement mis en son et relief par des musiciens au sommet de leur art.
La magique paire fait encore référence, Nick Holmes (chant) et Greg Mackintosh (guitares) illuminent de leur emprise créatrice sans limite de superbes morceaux aériens, tutoyant souvent les ténèbres ("Fear Of Impeding Hell" est en cela majestueux), carrés, soyeux et troublants.
Anachroniques dans la fabrication ( PARADISE LOST a plus finalement à voir quand on y réfléchit bien avec DEPECHE MODE qu'avec n'importe quel BRING ME TO THE HORIZON), ces artisans du metal forgé avec passion prouvent que l'on a l'âge de son coeur et de son âme et dans ce cas, ces fiers bretteurs demeurent toujours de sacrés adolescents frondeurs, et follement encore et toujours libres, maître-mot siamois de la véritable création artistique (peux- tu écouter et subir la vidéo de ce "Honesty In Death" sans fondre en larmes ? Souviens-toi de "Faith Divides Us...").
Bien sur, le tempo peut se faire plus lourd et menaçant, et "Theories From Another World" qui pourrait illustrer la bande originale d'un "28 jours plus tard" tient bien au corps.
Greg, délesté des doutes/barrages qui pouvaient l'habiter (sa créature extrême VALLENFYRE libéra le surplus électrique), retrouve ici chair, muscles bandés, et punch ("To The Darkness", autre single en puissance).
Section rythmique au diapason, peaux caressées par les fougueuses et justes baguettes du petit nouveau Adrian Erlandsson (AT THE GATES, CRADLE OF FILTH...), propulsent sans peine cet aimable ouvrage comme meilleure réalisation du groupe du Yorkshire depuis le culte "Draconian Times" (1995).
Là où demeureront comme éternels challengers les MY DYING BRIDE ou autres ANATHEMA (qui, certes, en ce moment font de réels efforts pour exister enfin en ligue 1), s'érige comme unique leader d'une scène somme toute moribonde qui n'arrive pas à se détacher de sa glue "underground-à-tout-prix" l'affolante réussite d'un groupe innovateur et inspiré, qui depuis 1990 n'a eu de cesse que d'offrir (au téméraire auditeur qui osait sortir des sentiers métalliques trop souvent ultra-balisés), en raclant au plus profond de sa moelle et de son âme la meilleure des musiques.
Que ces sacrifices (car sacrifices il y a dans une vie de musicien) et sacerdoce soient ici remerciés.
Magnifiques idoles.