8 octobre 2018, 15:04

ULTRA VOMIT

• Interview Manard : UV de A à Z – Part 1/2


2018, c'est l'année de la consécration pour ULTRA VOMIT. Détenteurs haut la main du plus grand nombre de concerts donnés dans l'Hexagone pour un groupe d'obédience metal, les Nantais ont certes un lourd bilan carbone (ouh !) mais c’est juste parce qu’ils veulent absolument porter la bonne parole dans les moindres recoins du pays (ahh !). Alors que les quatre zamis s'apprêtent à donner un concert à l’Olympia qui affiche complet depuis juillet, Manard, le batteur, nous a prouvé qu’il connaissait l’alphabet sur le bout des doigts avec ce A à Z ULTRA VOMIT en deux parties. Du coup, pour commencer, c’est un A à M…


A… comme Anthracte, un morceau de présentation sur « Panzer Surprise ! »
Ça fait longtemps qu’en concert, on présente les musiciens avec des musiques un peu marrantes, comme celle de “Motus” sur la tournée “Objectif : Thunes”. On avait ce riff qu’on faisait tourner en balance depuis quelques années sans trop savoir quoi en faire. Et on s’est dit que ça serait excellent de présenter les membres du groupe, chose qui ne se fait jamais sur album.
C’était l’occasion de caser des blagues un peu relous, notamment cette fameuse engueulade à la fin. On a trouvé le nom en dernier. On était partis sur l’idée qu’un morceau égale un logo ou un nom de groupe détourné et comme c’était au milieu de l’album et que ça faisait une espèce de pause, j’ai pensé à ANTHRAX. Du coup, l’entracte s’est transformée en “Anthracte”.

B… comme Bausson, Matthieu Bausson, bassiste farfadet
Matthieu est arrivé fin 2014. Les gens l’ont découvert en 2015 quand on a fait une dizaine de dates pour le mettre un peu dans le bain. Quand Jacou, notre précédent bassiste, a déménagé à Lille, on s’est dit que ça allait être difficile de continuer avec lui. Mais on a un peu laissé traîner parce qu’on n’avait pas d’actualité et quand Rage Tour, notre tourneur, nous a proposé ces concerts, il a fallu trouver quelqu’un.
A l’époque, je jouais avec Andréas (NDJ, moitié du duo poil à gratter Andréas & Nicolas) dans RAGE AGAINST THE PEPPERS, un groupe de reprises de RAGE AGAINST THE MACHINE et RED HOT CHILI PEPPERS, présenté à la sauce combat de boxe, et Matthieu nous a rejoints. Je le connaissais donc mais il a quand même auditionné pour ULTRA VOMIT. Il jouait aux doigts et il a fallu qu’il se mette au médiator mais il a assimilé tout ça très vite. Cette mini-tournée nous a non seulement remis sur les rails mais elle nous a aussi permis de voir que le public était toujours présent, ce qui nous a bien motivés.
Matthieu a 12 ou 13 ans de moins que moi, il est arrivé au moment où le groupe s’est mis à bien marcher. Il est un peu tout fou, il nous fait bien marrer et il y a une bonne osmose avec lui. Ce qui n’enlève rien aux autres. Gru, un de nos anciens bassistes, est devenu notre lighteux.
 


© Christian Ballard - HARD FORCE

 

C… comme “Calojira”. Vous êtes plus Calogero, dont vous avez adapté “Face contre terre” à la sauce metal, ou GOJIRA ?
GOJIRA, largement ! Calogero, on ne déteste pas, on ne connaît pas du tout le gars, juste deux-trois chansons qui passent à la radio. GOJIRA par contre, on les connaît depuis très longtemps, ce sont des mecs adorables. On les a recroisés cet été au festival Heavy Montréal où l'on jouait nous aussi. C’était le meilleur concert que j’ai vu d’eux, j’ai pris une claque monumentale ! C’est le plus grand groupe français de metal de tous les temps, ils ont enfoncé toutes les portes à l’international. Et les mecs restent humbles, passionnés.
Ils ont beaucoup apprécié “Calojira”. On le jouait déjà en live en 2012, dans une version plus courte. A l’époque, on a fait un festival ensemble et ils sont venus nous dire qu’ils étaient morts de rire et très honorés de cette parodie. Quand « Panzer Surprise ! » est sorti, ils ont partagé le titre sur leur page. Et on a repartagé leur partage parce qu’ils avaient marqué que c’était une version parodique de “Vacuity” et nous, on a marqué que “Vacuity” était une version sérieuse de “Calojira”.
 

« On jouait déjà “Calojira” en live en 2012, dans une version plus courte. A l’époque, on a fait un festival avec GOJIRA et ils sont venus nous nous dire qu’ils étaient morts de rire et très honorés de cette parodie. » – Manard


D… comme discographie
Notre premier album, c’est « M. Patate » (2004). On était dans la période brutale d’ULTRA VOMIT qui a commencé avec la démo « Kebabized At Birth » et fini avec « M. Patate », sur lequel on a réenregistré plusieurs morceaux de la démo. A l’époque, Fetus (le chanteur/guitariste) n’écoutait que des groupes de grind gore et moi aussi un petit peu, même si j’ai toujours été plus branché heavy.
Il y a eu ensuite « Objectif : Thunes » (2008), pour lequel on a tourné jusqu’en 2012. En tournée, c’est difficile d’avoir des idées ou de composer. Et puis après, tout le monde s’est consacré à ses projets. Fetus a fait Andréas & Nicolas et sorti deux albums (« Super Chansons » et « Singes du futur » en 2010 et 2014), Flockos avait JUSTIN(E), son groupe punk-rock à côté, moi j’ai sorti deux albums de heavy, un avec ERA NOVA, un groupe nantais (avec Andréas, « Children Of Alcyone », 2010), l’autre avec OPERADYSE (« Pandemonium », 2013), un groupe de metal symphonique basé à Montpellier où je suis parti m’installer quelques années. Je suis assez fier des deux.
Il faut reconnaître qu’à l’époque, ULTRA VOMIT n’avait pas beaucoup d’inspiration. On était tellement satisfaits d’« Objectif : Thunes » qu’on pensait avoir tout dit et qu’on ne pourrait que se répéter. Comme on commençait à avoir un peu de succès, on s’est dit qu’on allait peut-être ouvrir la voie à d’autres groupes français qui auraient envie, eux aussi, de faire des parodies. Mais en fait, non. Par la suite, on s’est donc dit qu’on avait sans doute la place pour refaire autre chose. Le fait est que l'on est très très longs à composer – pas musicalement, les riffs viennent assez facilement en répét’, mais il nous faut du temps pour laisser mûrir les concepts. Et puis il y a eu « Panzer Surprise ! » qui est sorti en avril 2017.
 


E… comme “Evier metal”, deuxième vidéo de « Panzer Surprise ! »… en costumes et bonnets de nuit
On ne voulait pas que ça suive les paroles et voir quelqu’un pisser dans un lavabo. Andréas, qui a pris les rênes niveau direction artistique, est parti sur l’idée d’un court-métrage. On s’est mis autour d’une table et chacun a proposé des tas d’idées, avec de nombreux clins d’œil à des films. On aurait bien aimé être tout petits, comme dans Chérie, j’ai rétréci les gosses, mais ça aurait été compliqué…
La fin avec Fetus en “homme parfait” et l’homme à tête de chien ? C’est un clin d’œil à David Lynch et à son univers what the fuck ? Andréas et Nicolas sont bien fans, ils avaient d’ailleurs fait une mini web-série, “Bonsoir monsieur !!!!”. Beaucoup ont cru que la fin annonçait le prochain clip et ont pensé que parce qu’il y avait un mec à tête de chien, ça serait “Un Chien géant”. Eh bien non ! Et ça nous a permis aussi de caler le nom de tous ceux qui ont participé au tournage.

F… comme Fetus, Nicolas Patra pour l’état civil, chanteur/guitariste roi
Fetus, c’est un peu le grand patron. C’est son groupe, c'est lui le leader, celui qui crée un peu toutes les petites pépites. Et nous, on est là avec lui pour polir tout ça. Fetus est nettement moins metal que moi. Il a eu sa petite période gore grind et metal extrême qui a dû durer trois ou quatre ans mais c’est surtout un grand fan de NIRVANA, des BEATLES et de Michael Jackson (NDJ : pour retrouver les 10 albums qui ont changé sa vie, cliquez ici). Là-dessus, on se retrouve mais ça n’est pas un métalleux dans le même sens que moi. Je connais et écoute un peu tous les styles, lui, nettement moins.
Je pense qu’ULTRA VOMIT, c’est le résultat de nos influences variées qui ne sont pas que metal. Cela apporte un peu de diversité et le fait qu’il ait une optique extérieure est intéressant car c'est sans doute ça qui fait aussi que l'on touche également un public qui n'est pas fan de metal. Si l'on devait établir un top metal du groupe, je serais le plus branché par le genre ; Flockos, qui adore le punk-rock mais aime METALLICA, arriverait en deux ; Fetus en trois et Matthieu, qui est plus rock et découvre le metal avec nous, en quatre.
 


© Fred Moocher - HARD FORCE


F… comme Flockos, de son vrai nom Fabien Le Floch, soliste nain à crête
Quand on a perdu notre bassiste, Chris, on a cherché dans notre proche entourage qui pourrait le remplacer. A l’époque, Fabien était guitariste dans NO TALENT NOR COMMENT avec qui on avait fait une paire de concerts dans la région nantaise. On avait remarqué qu’il avait un bon niveau à la gratte et qu’il avait un peu le même délire que nous. Mais il nous fallait un bassiste.
A l’époque, on était en trio et quand on lui a proposé le poste, il a accepté. On a fait des concerts sous cette formation et quand on a enregistré « Objectif : Thunes », il a fait la basse mais également pas mal de parties de gratte, des petits arrangements de guitare solo qu’il a proposés. Ça enrichissait vraiment la musique, alors comme c'était impossible de rendre ça en live à trois, on a décidé d’avoir deux guitares et de prendre un quatrième membre à la basse. Ça s’est fait naturellement.
 


© Raphaël Lobejon - HARD FORCE


G… comme grind et gore
Deux styles qui ont joué un rôle très important aux débuts d’ULTRA VOMIT. Et qu’on n’a pas totalement laissé tomber puisqu’il y a des petites réminiscences sur « Panzer Surprise ! », comme “La Ch’nille” ou la dernière version de “La Bouillie” qui n’a pas de riffs, c’est du noise. Fetus a eu une époque où il était à fond dans le grind gore mais au bout d’un moment, il s’est un peu lassé et s’est mis à autre chose.
On en écoute encore de temps en temps et on est plutôt fiers de ce que l’on a fait à l’époque. Quand on s’est rencontrés, on avait des goûts musicaux différents, lui très gore grind donc, moi plus heavy et c’est plutôt sur le reste que l’on s’est entendus, les films d’horreur, les comiques… On passait des soirées à regarder des films gore. Je suis resté à fond dans les films d’horreur mais j’aime le cinéma en général.

H… comme Hellfest. ULTRA VOMIT sera-t-il à l’affiche en 2019 ?
Participer au Hellfest, c’est une grande fierté. On y a joué en 2008, en 2017 et cette année, on a participé au warm-up. Un plaisir même si c’était un peu dur physiquement. Treize dates en treize jours, c’est compliqué. Je ne sais pas comment faisait MAIDEN dans les années 80. Enfin si, j’ai ma petite idée (sourire)… Si tu remontes plus loin, on a même participé au Furyfest (qu’on pourrait considérer comme “l’ancêtre” du Hellfest, NDJ) en 2005. On connaît un peu Ben Barbaud qu’on croisait sur la scène nantaise depuis longtemps, il y a un respect mutuel, on s’apprécie et ce qu’il a fait, c’est complètement incroyable.
Le Hellfest, c’est le meilleur festival que je connaisse, en tant que festivalier ou musicien, et je ne suis apparemment pas le seul à le penser. J’ai commencé à écouter du metal en 1994 et à l’époque, il n’y avait rien en France. A 20 ans, pour voir un festival, j’allais en Allemagne au Wacken. Je ne comprends pas ceux qui critiquent le Hellfest. Ils n’ont pas dû connaître l’époque où il n’y avait rien chez nous. Il faut qu’ils gardent à l’esprit, même s’ils considèrent que c’est devenu trop grand public, que grâce à l’effet Hellfest, il y a des tas de petits festivals metal qui se son créés : le Motocultor, l’Extreme Fest, le Sylak…
Il y a des rumeurs selon lesquelles on y jouerait en 2019, suite à une interview qu’a donnée Fetus au warm-up. Mais attention, des fois, il dit des choses (sourire)… Ben Barbaud a expliqué dans plusieurs interviews que ça n’est jamais simple de caler des groupes. Nous, on marche beaucoup en France mais les groupes internationaux ne nous connaissent pas du tout. Et certains peuvent ne pas comprendre pourquoi on jouerait après eux… On verra.
 


© Christian Ballard - HARD FORCE


I… comme Les Inconnus
Les Inconnus, c’est le must. Ça faisait partie de nos influences communes, à Fetus et à moi, quand on a fait connaissance. Pour moi, c’est ce qui a été fait de mieux en matière de parodie en France, je les place au-dessus des Nuls que j’adore. “La Télé des Inconnus”, c’était incroyable. La plupart de leurs sketchs ont super bien vieilli et ça me fait toujours autant marrer. Les parodies musicales qu’ils ont faites nous ont beaucoup influencés. Ce côté : “C’est une parodie, mais on la fait le mieux possible”, tu sens qu’il y avait beaucoup de travail derrière.
 

« Pour “Kammthaar”, on a dépassé le budget et on était même prêts à s’endetter personnellement pour faire ce clip. Au final, on a bien fait, c’était un pari qui s’est révélé gagnant. » – Manard


J comme “Judas Prost”, extrait de « M. Patate », votre premier clip
A l’époque, c’était le système D, des bouts de ficelle, des bouts de carton sur une AX. Aujourd’hui, si ça se trouve, on aurait réussi à louer une Formule 1, si tant est que ça se loue… J’en garde un super souvenir. Finalement, plus tu es ambitieux et tu as de moyens, plus tu as la pression et du coup, le plaisir est un peu moindre. Le tournage de “Kammthaar” et d’“Evier metal”, ça n’était pas le bagne, c’était cool, mais pas autant que quand tu arrives et que tu ne sais pas ce que tu vas faire. Parce que tu n’as pas de budget, pas de deadline. Tu improvises pas mal, tu te marres… La vidéo de “Judas Prost”, c’était l’insouciance.
Notre regret, c’est de ne pas avoir fait plus de clips. Pour « Objectif : Thunes », on n’a tourné que “Je collectionne les canards vivants” qui est cool mais ce n’est pas exactement ce qu’on aurait voulu en produit final. On était tenus par les limites budgétaires.

K… comme “Kammthaar”, première vidéo de « Panzer Surprise ! » aux presque 2,8 millions de vues…
Pour “Kammthaar”, on a dépassé le budget et on était même prêts à s’endetter personnellement pour faire ce clip. Au final, on a bien fait, c’était un pari qui s’est révélé gagnant. On avait déjà un peu explosé le budget pour enregistrer « Panzer Surprise ! », alors quand on a annoncé qu’on voulait faire un clip avec un camion de malade, on nous a dit qu’il fallait qu’on se calme. Et au final, “Evier métal”, c’est le triple de “Kammthaar” au niveau du budget. Des pros ont été surpris parce qu’ils pensaient que “Kaamthaar” avait été budgétisé à des dizaines de milliers d’euros alors qu’il n’en a même pas coûté 10 000.
 


L… comme votre meilleur souvenir live
Le Hellfest 2017. Il n’y a pas grand-chose qui peut rivaliser avec ça. Voir une telle masse humaine devant nous alors que l’on n’était pas du tout préparés à ça, c’était… incroyable. On nous a dit qu’il y avait à peu près 35 000 personnes. Tu as l’impression d’être GUNS N’ ROSES le temps d’un concert. J’ai beaucoup stressé, j’ai tremblé pendant tout le set. J’ai très mal joué, trop rapidement et quand le concert a été terminé, il a fallu que je m’asseye. J’ai eu la nausée pendant 20 minutes au moins… Une espèce de bulle de stress. C’est dommage parce que ça m’a enlevé un peu de plaisir.
En 2008, on avait aussi joué sur la Mainstage en tant que groupe d’ouverture, à peu près au même horaire, mais il y avait 7 ou 8 000 personnes et c’était déjà un gros gros concert.

M… comme Manard, de son vrai nom Emmanuel (comme un soleil) Colombier, batteur émérite à “voix de merde”
J’essaie aussi d’être chanteur mais c’est pas gagné (sourire). J’ai commencé la batterie à 14 ans mais le problème, c’est qu’hormis les deux premières années où j’étais chez mes parents et où j’avais la batterie dans ma chambre, je n’ai jamais eu mon instrument à disposition. Ça explique parfois mes hésitations en live ou mes erreurs, je n’ai jamais vraiment travaillé.
C’est un regret mais je ne peux pas y faire grand-chose, même si je suis quand même satisfait de mon niveau. Je suis loin des super batteurs qui ont leur kit chez eux et peuvent en jouer tous les jours plusieurs heures. Mais ça ne m’empêche pas de dormir la nuit, hein. Justement, je suis en train de déménager dans une maison et on a le projet d’avoir une salle de musique.
 


© Christian Ballard - HARD FORCE


Pour lire la suite : UV de A à Z - Part 2/2

Blogger : Laurence Faure
Au sujet de l'auteur
Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
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