10 mai 2020, 10:00

UN JOUR, UN ALBUM

• TWISTED SISTER : "Stay Hungry"


Le 10 mai 1984, TWISTED SISTER sortait « Stay Hungry ». L'idée n'est pas d'en faire la chronique mais de rappeler quelques faits ou anecdotes que vous ignoriez peut-être sur le troisième album des New Yorkais qui fête aujourd'hui son 36e anniversaire… 
 

• « You Can't Stop Rock 'n' Roll », deuxième album de TWISTED SISTER sorti en 1983, avait en quelque sorte pavé la voie en attirant de plus en plus de “S.M.F.” (Sick Motherfuckers), surnom donné à leurs fans par les New Yorkais. Qui, pour les remercier de leur soutien, ont d'ailleurs écrit un morceau qui porte leur nom sur leur troisième réalisation, « Stay Hungry », qui lui succède un an plus tard. Album de la consécration, il dépassera les 3 millions de ventes outre-Atlantique. Il contient en effet les deux plus gros hits/classiques/hymnes de leur carrière : “We're Not Gonna Take It” et “I Wanna Rock”.

• A l'époque, beaucoup considèrent TWISTED SISTER comme un nouveau venu. Alors que, même si le chanteur Dee Snider est arrivé en 1976, le groupe a été fondé trois ans plus tôt par le guitariste (qui est également leur manager) Jay Jay French et a écumé tous les clubs de l'Etat de New York. Mais les cinq hommes, qui se sont fait claquer le porte au nez par toutes les maisons de disques qu'ils ont démarchées, ont dû attendre 1982 pour qu'Atlantic les signe.

• Même si cela n'a pas une grande résonance pour nous, Français, le père dans la vidéo de “We're Not Gonna Take It” est basé sur Douglas Neidermeyer, un personnage de la comédie American Collège (National Lampoon's Animal House en V.O.) réalisée par John Landis (qui signera dans la foulée Les Blues Brothers et Le Loup-garou de Londres, respect éternel) et sorti en 1978. C'est d'ailleurs Mark Metcalf, l'acteur qui l'incarnait au cinéma, qui reprendra son rôle. C'est peut-être un détail pour vous mais pour Dee Snider, gamin de Long Island que ses goûts musicaux et sa vision du monde plaçaient en marge de la majorité des jeunes de son âge, ça veut dire beaucoup…

• MTV n'apprécie guère le clip pour la bonne raison qu'il commence par un long clash entre un père et son fils qui veut faire du rock avant que ne débute la chanson à proprement parler. Mais compte tenu du succès qu'il va remporter, les décideurs se remettront leur opinion derrière l'oreille pour la fumer plus tard.


• Dee Snider, Jay Jay French, Eddie “Fingers” Ojeda, Mark “The Animal” Mendoza et A.J. Pero – chanteur, guitariste rythmique, soliste, bassiste et batteur – proposeront toutefois une version plus courte du clip…
 


• En août, l'album dépasse les 500 000 ventes sur le territoire américain et atteint donc le statut de disque d'or. Mais ce sont des médailles d'or – clin d'œil aux Jeux Olympiques qui se sont tenus un peu plus tôt à Los Angeles – que se verront remettre les musiciens par Mark Metcalf, déguisé en Douglas Neidermeyer. La cérémonie a lieu sur la scène du Nassau Coliseum à Long Island, berceau de TS, où le groupe ouvre pour DIO. 

• La vidéo de “I Wanna Rock”,  le second single, apparaît comme la suite  de ‘We're Not Gonna Take It” et passera pendant de longues semaines en heavy rotation sur MTV. Les fans apprécient le côté outrancier et humoristique des clips mais les opposants au groupe et à ce qu'il véhicule (on va y venir) pointent du doigt sa violence. Qui n'est pourtant guère différente de celle des dessins animés ou de Tex Avery… Mais le choc des générations et la critique concernant l'éducation ne plaisent pas à tout le monde et choquent profondément les bien-pensants.
 


• En 1984, METALLICA assure la première partie de la tournée européenne de TWISTED SISTER. En 2011, à l'occasion d'une interview avec Powerline, Dee Snider racontera qu'il n'avait jamais vu les Californiens jouer, compte tenu qu'il s'échauffait avant sa prestation et quittait la salle dès la fin du concert de TS. Jusqu'au jour où, en Hollande, il arrive dans la salle et voit une affiche avec le logo METALLICA en gros et celui de son groupe en petit… « J'ai dit au tour manager que puisque, à l'évidence, c'était eux que le public venait voir, ils joueraient en tête d'affiche. » D'abord dubitatifs, les thrashers saisissent finalement l'opportunité et Snider et Mendoza suivent leur prestation depuis le côté de la scène. Verdict du grand blond – à l'époque : « Ils en veulent mais ça ne marchera jamais. Ils sont beaucoup trop heavy pour toucher le grand public (rires) ! ». Sa boule de cristal était vraisemblablement très embuée…

• Troisième single de « Stay Hungry », la ballade “The Price” ne connaîtra pas le succès escompté, même si elle grimpera quand même à la 19e place des charts US. Sans doute les S.M.F. n'étaient-ils pas vraiment prêts à voir qu'un cœur battait sous le maquillage ?
 


• 1985 voit la création du PMRC – Parents Music Resource Center – de sinistre mémoire. Un groupe de pression américain, fondé par quatre épouses de politiciens, surnommées les Washington Wives, qui entend avertir les parents des dangers encourus par leurs chères têtes blondes qui, au détour d'un album, peuvent tomber sur des textes parlant de sexe, de drogue, d'alcool, de violence, voire de satanisme. Et qui même, parfois, peuvent contenir des messages subliminaux (que l'on cherche encore). Pour éviter que les jeunes ne deviennent des dépravés, alcooliques et junkies de surcroît, voire adorateurs du Malin, est créé un sticker, “Parental Advisory Explicit Lyrics”, qui sera désormais apposé sur les albums incriminés, tous styles musicaux confondus, qui abordent un ou plusieurs de ces sujets. Ou qui se contentent d'employer des mots comme “fuck”… Ce qui les rendra encore plus désirables aux yeux de nombreux jeunes.
Le PMRC publie d'ailleurs une liste, baptisée “The Filthy 15” (les 15 dégueulasses), dans laquelle apparaissent, côté hard rock et assimilés : JUDAS PRIEST (“Eat Me Alive” - sexe), MÖTLEY CRÜE (“Bastard” - violence), AC/DC (“Let Me Put My Love Into You” - sexe), TWISTED SISTER (“We're Not Gonna Take It” - violence), W.A.S.P. (“Animal (I Fuck Like A Beast)” - sexe), DEF LEPPARD (“High 'n Dry” - alcool), MERCYFUL FATE (“Into The Coven” - satanisme), BLACK SABBATH (“Trashed” - alcool) et VENOM (“Possessed” - satanisme).
Face au PMRC, mais tellement moins écouté, les Parents For Rock and Rap, un organisme créé en 1987 par Mary, la mère de Tom Morello, futur guitariste de RAGE AGAINST THE MACHINE, AUDIOSLAVE et PROPHETS OF RAGE, militera au contraire pour la liberté d'expression de la musique tout en luttant contre la censure. 
 


 

• En septembre 1985, Frank Zappa, Dee Snider et John Denver témoignent devant le Comité sénatorial des Etats-Unis sur le Commerce, les Sciences et les Transports en tant que représentants de ce qui est alors qualifié de “porn rock”. Oui, quand même… Cette détestation donnera un os à ronger (sans clin d'œil particulier à la pochette de « Stay Hungry ») au chanteur qui, en tant que porte-parole, est directement dans la ligne de mire du PMRC.

•  En 1998 sortira Strangeland, un film horrifique dont le scénario, basé sur la quatrième plage de l'album, “Horror-Terria (The Beginning)”, composée de “Captain Howdy” et “Street Justice”, a été écrit et coproduit par Snider. Qui interprète d'ailleurs l'impressionnant Captain Howdy/Carleton Hendricks, un sadique adepte de modifications corporelles qui choisit ses victimes sur Internet et les torture longuement. On notera au passage la présence à l'affiche de Robert “Freddy Krueger” Englund.
Dix ans après l'annonce officielle du split de TWISTED SISTER, les musiciens se retrouveront pour enregistrer un morceau, “Heroes Are Hard To Find”, pour la B.O. 100 % metal du film.
 


• En 2004, le groupe reformé, qui n'aimait pas la production originale de « Stay Hungry », le réenregistrera en prenant au passage les choses en main. Rebaptisé « Still Hungry », il contient sept titres bonus.

• Cinq ans plus tard, les New Yorkais se lanceront dans une tournée au cours de laquelle ils interpréteront pour la première fois l'intégralité de l'album. Avec, au passage, des chansons qui n'avaient jamais été jouées en live, comme ‘Don't Let Me Down” et “Street Justice”. Parallèlement sera commercialisée une édition spécial 25e anniversaire.

•  Pendant sa campagne présidentielle en 2015, Donald Trump utilise “We're Not Gonna Take It” (qui signifie “On ne va pas supporter ça”) pendant sa campagne présidentielle. Dee, qui a participé à “Celebrity Apprentice”, une émission télévisée animée par Trump, et qui, grâce au fils de ce dernier, a pu collecter 50 000 dollars pour le St. Jude's Children Hospital, lui est en quelque sorte redevable. Il lui donne donc dans un premier temps le feu vert pour l'utiliser, avant de revenir finalement sur sa décision. « Ce n'était pas un soutien de ma part, expliquera-t-il à Billboard en mai 2016. Nous avons tous des amis qui n'ont pas les mêmes opinions politiques que nous mais avec qui nous pouvons partir en vacances. Mais j'ai été obligé de lui demander d'arrêter de l'utiliser. “Je n'avais pas conscience de ce que tu allais représenter : le mur, interdire les Musulmans. Je ne peux pas soutenir ce genre de choses”, lui ai-je dit. Il m'a répondu OK et l'a fait. Fin de l'histoire. »
N'empêche que voir Trump et sa famille en compagnie de Snider chanter à gorge déployée “We're Not Gonna Take It”, c'est… surprenant…
 


Discographie
Under The Blade (1982)
You Can't Stop Rock 'n' Roll (1983)
Stay Hungry (1984)
Come Out And Play (1985)
Love Is For Suckers (1987)
Still Hungry (2004)
 


Un jour, Un Album
Blogger : Laurence Faure
Au sujet de l'auteur
Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
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