19 juin 2022, 23:59

HELLFEST OPEN AIR

@ Clisson (Jour 3)

Dimanche 19 juin, dernier jour de ce premier week-end du Hellfest. Un orage est tombé pendant la nuit, ce qui a rafraichi l’atmosphère. On respire enfin, et la journée promet d’être bien plus supportable. Ayant prévu un planning marathon, pas question de se faire avoir cette fois. Je fonce au parking très tôt, quitte à devoir errer un moment sur le Hell City Square, avant l’ouverture des portes. Et Ô joie, Ô bonheur ! Non seulement, je trouve une place disponible, et qui plus est, à l’entrée du parking, juste devant les navettes. Si j’avais su...


Petit tour sur le Metal Market pour trouver un souvenir de ce mémorable week-end, puis direction l’espace VIP où je croise un confrère. Entrevue chaleureuse et sympathique, avec l’indispensable petit selfie qui va bien, avant le premier concert du jour sur la Mainstage 2. Ce sera STENGAH, jeune groupe français de metal moderne, technique, progressif et extrême en même temps, qui a sorti depuis peu son premier album, « Soma Sema ». Le quintet lillois est dans une forme remarquable et envoie ses titres comme autant de déflagrations surpuissantes. Techniquement, les musiciens sont irréprochables, la batterie d’Eliott Williame claque comme une énorme baffe dans la gueule, mais la subtilité et la complexité de leurs compositions ne se résument pas à une prouesse technique. Les gars ont déjà l’assurance et la présence nécessaires pour s’imposer sur une telle scène. Prestation remarquable en tous points. On leur souhaite une belle et longue route. Sur la Mainstage 1 débarque ensuite DEADLY APPLES, le seul groupe québécois de cette programmation (et ça s’entend à travers l’impayable accent de l’attachant chanteur, Alex Martel !) pour un show de nu-metal/electro rock à la Marylin Manson, qui saura faire réagir très positivement le public présent, malgré les deux jours précédents dans les jambes. A la fin de leur prestation, les trois musiciens (en plus du chanteur, un batteur et un DJ) prennent longuement le temps de serrer les mains de toutes les personnes présentes au premier rang.


TEMPT est un groupe new-yorkais composé de jeunes gens qui semblent tout droit sortis des années 80, comme en témoigne l’improbable coupe « mulet » (ça existe encore, ce truc ?) du guitariste Harrison Marcello, et les tenues flashy des musiciens. Mais on ne peut nier qu’ils sont raccord avec leur musique, un heavy rock mélodique/classic hard rock à la VAN HALEN ou DEF LEPPARD, fort bien exécuté, dynamisant et plein de fraîcheur. On aura même droit à un « Bonsoir Hellfest » en tout début de matinée, de la part du chanteur, Zach Allen, sautant comme un cabri dans sa veste bleue satinée, souriant à s’en décrocher la mâchoire, mais, semble-t-il, un peu jet-laggé. Qu’importe, le quartet avec sa bonne humeur communicative et ses compositions sucrées comme un bonbon au caramel, donne une furieuse envie de se trémousser. D’autant plus lorsqu’il entame une reprise bien speedée du "We Will Rock You" de QUEEN. Un groupe qui a largement mérité sa place sur cette Mainstage 2, contrairement à STEEL PANTHER vu la veille...

Le moment est venu pour un footing matinal. Mon petit doigt me dit que la Warzone va être pleine comme un œuf pour le concert des Marseillais LANDMVRKS. Intuition on ne peut plus juste : elle commence à déborder de toutes parts, mais devenue experte dans l’art subtil du faufilage, je parviens à me placer à l’extrême droite de la barrière, afin d’avoir une vue sur la scène et l’écran géant. Concert exceptionnel que donne le groupe. L’une des plus grosses raclées du festival. Le son est parfait, les musiciens sont ultra professionnels, carrés, le chanteur, Florent "Flo" Salfati, impressionnant de puissance, maîtrise aussi bien sa voix claire que sa voix saturée, et leur metalcore est d’une efficacité redoutable. Alternant morceaux hyper bourrins et chansons plus mélodiques, la formation offre une set-list équilibrée. Le public ne s’y est pas trompé, transformant la Warzone en un champ de bataille, de la première seconde à la dernière de ce concert bien trop court. LANDMVRKS a plus que largement fait ses preuves et mérite une place bien plus haut sur l’affiche. L’ascension des Marseillais ne fait que commencer, c’est une certitude. Et nous nous ferons un plaisir de les revoir en ouverture du concert de BRING ME THE HORIZON à Lyon le 5 juillet prochain.


Après un tel show, on redescend le cœur léger vers les Mainstages, où l’on retrouve notre collègue HARD FORCE, Christophe Scottez, pour la fin du concert de SORTILEGE. N’étant absolument pas adepte du heavy traditionnel du groupe, autant lui laisser la joie de décrire lui-même ses impressions. Premier passage des Italiens LACUNA COIL au Hellfest, et c’est la Mainstage 1 qui accueille le groupe transalpin. Forts de leur excellent dernier album, « Black Anima », paru en 2019, et qu’ils n’ont guère pu défendre sur scène, les musiciens ont la rage d’en découdre. Cristina Scabbia et Andrea Ferro au chant sont dans une belle forme et se partagent les voix de manière équitable, en proposant un concert mêlant savamment anciens ("Our Truth", "Heaven’s A Lie", "Nothing Stands In Our Way"...) et nouveaux titres ("Venificium", "Layers Of Time", "Reckless"...), pour que les fans présents puissent en avoir pour tous les goûts. On aurait toutefois apprécié les excellents "Under The Surface" ou "Save Me" pour parfaire ce set.
BATTLE BEAST enchaine sur la Mainstage 2, et la recette power-metal mélodique du groupe, bien qu’un peu indigeste, se laisse écouter assez agréablement grâce à la voix surpuissante de leur chanteuse Noora Louhimo. Mais par contre, quelle mouche l’a piquée de vouloir revêtir un serre-tête "cornes de bélier" ainsi qu’un corset futuriste qui ne la met pas du tout en valeur et la fait paraître plus large que haute, malgré les 12 centimètres de talons aiguille ?  Arrivée trop tard sous la Temple blindée de monde (quel dommage qu’il n’y ait qu’un seul écran extérieur pour les tentes !) pour le concert de REGARDE LES HOMMES TOMBER, je décide fort judicieusement de me glisser sous l’Altar à côté, afin de me placer au mieux pour MONUMENTS prévu juste après. Cela me permet malgré tout d’entendre le concert des Nantais, à défaut de pouvoir le voir, même si j’apercevrai les gerbes de flammes à la fin du show. Enorme succès pour les Français avec leur post-black metal intense, immersif, sombre et froid. Une musique tellement prenante qu’elle pourrait faire vaciller l’esprit.


Les Britanniques MONUMENTS sont attendus de pied ferme sous une tente qui s’est progressivement remplie jusqu’à la gueule. Avec leur excellent quatrième et dernier album au compteur, « In Stasis » (chronique ici), le quatuor a fait très fort et les amateurs de djent et metal progressif sont nombreux à vouloir prendre leur dose de sensations fortes. Déboulant à cent à l’heure avec la géniale "Cardinal Red", MONUMENTS va, sans conteste, offrir la plus grosse branlée de tout le week-end. Maîtrise guitaristique parfaite et époustouflante de John Browne, le chant géré admirablement par Andy Cizek, musicalité et puissance de bout en bout. Sans oublier l’exceptionnel Mike Malyan, un batteur autant technique que groovy (et souriant) qui fout tout le monde sur le cul avec son jeu irrésistible. Adam Swan ayant eu la malchance de choper la COVID, il est remplacé à la basse par Werner Erkelens, qui ne démérite pas, bien au contraire. Le groupe ne laisse pas une seconde de répit au public et enchaîne les titres tous plus efficaces les uns que les autres ("Animus", "Regenerate", "Origin Of Escape", le sublime "Makeshift Harmony"...) pour finir de nous achever sur "I, The Creator". Dans la fosse, les circle-pits s’enchaînent, les slammers ont décidé de faire bosser les gars de la sécurité qui s’ennuyaient à mourir, selon leurs dires, et les refrains sont repris en chœur. Les quatre musiciens, d’une gentillesse et d’une humilité incroyables, n’en reviennent pas d’un tel accueil, et ne cessent de remercier chaleureusement les festivaliers qui ont transformé l’Altar en volcan en éruption. Seule déception : pourquoi diable n’avoir joué aucun morceau du magnifique avant-dernier album, « Phronesis » ? Une chanson aussi géniale que "Mirror Image", par exemple, aurait eu toute sa place dans ce concert. Pour les Parisiens, ne ratez pas le groupe le 5 août prochain au Backstage, avec en première partie, les Français THE DALI THUNDERING CONCEPT.
Après ce monumental concert de MONUMENTS, direction la Warzone pour le hardcore des Canadiens COUNTERPARTS. Sympathique, mais sans plus. Un manque évident d’originalité et cette impression persistante d’avoir déjà entendu ce son mille fois me font retourner vers les Mainstages où se déroule le concert de JINGER. Quelle présence, quelle voix, quel charisme cette Tatiana Shmayluk ! Mais quelle idée de ne passer sur les écrans géants qu’un arc-en-ciel de couleurs, jolies certes, mais on aurait préféré voir la prestation du groupe. On se consolera, de retour à la maison,  en regardant le concert filmé par Arte. Avant d’aller me placer sous la Temple pour BORKNAGAR, je passe voir rapidement sur la Hellstage PROPHETIC SCOURGE, groupe de death progressif interviewé la veille. Sa musique complexe et violente est bien accueillie par les spectateurs présents, et même si la scène est bien petite, le groupe a l’air de savourer le moment à fond. Pour ne pas me retrouver encore une fois coincée à l’extérieur, je repars rapidement sous la Temple.


La rareté des apparitions de BORKNAGAR en France font que la tente se remplit à vitesse grand V. Entre la noirceur du black metal, le côté progressif et aérien, puis les mélodies folk, les Norvégiens ont créé un genre unique. Trois chanteurs, trois voix différentes et cependant complémentaires pour un concert entre lumineuse apesanteur et sombre lourdeur. Le public est fasciné, hypnotisé, pendant toute la durée du set (et les gars de la sécurité vont encore se tourner les pouces). On part loin, très loin, dans des contrées que nul être vivant ne connait. L’âme se détache du corps, la magie opère. Il sera bien difficile de reprendre ses esprits, une fois le spectacle terminé. Les musiciens ne communiquent que très peu, afin de ne pas rompre le charme, mais on les sent fort émus de la réaction très positive du public. Après un tel concert, il devient nécessaire de faire une vraie pause pour se ressourcer, puis on retourne s’installer dans la Warzone pour WHILE SHE SLEEPS. Le dernier passage de la formation de Sheffield à Paris en 2019, juste avant la pandémie, nous avait particulièrement enchantés, aussi, c’est avec une excitation grandissante que nous attendons l’entrée du groupe sur scène. Carton plein pour les metalcoreux anglais qui offrent un large panel de leurs répertoire, avec en point d’orgue, quelques incontournables comme "Antisocial", "Four Walls", "You Are We", "The Guilty Party", et bien évidemment, "Silence Speaks". C’est la folie furieuse sur la Warzone qui ressemble à un chaudron en ébullition, entre circle-pits, pogos et slams. Un petit bémol, cependant : les voix de Lawrence "Loz" Taylor et Mat Welsh sont sous-mixées, quand la batterie d’Adam Savage prend le pas sur tous les autres instruments, ce qui rend le concert moins appréciable qu’il aurait dû l’être.


Pour assister à la fin du concert de KORN, on quitte la Warzone avant la fin de WHILE SHE SLEEPS, et on arrive au moment du solo de batterie de Ray Luzier. Parfait pour constater à quel point l’homme est doué. Après le dernier morceau, "Blind", on apprend que c’est l’anniversaire du guitariste Brian "Head" Welch, tout comme Mario Duplantier de GOJIRA, et, à la demande de Jonathan Davis, tout le site entame joyeusement le traditionnel « Happy Birthday ». Ensuite, direction la Valley pour PERTURBATOR et la curiosité de découvrir le projet de James Kent en live. La tente est déjà pleine à craquer et le son est puissant. On ressent les vibrations dans toutes les fibres du corps. On n’aperçoit pas grand-chose derrière l’épaisse fumée, seulement les lights façon boîte de nuit. La musique est hypnotique, proche de la transe, et effectivement, certains spectateurs se laissent embarquer. Mais le résultat est un peu répétitif et lassant sur la durée. Je m’échappe avant la fin pour aller m’installer sous la Temple à côté, afin d’être aux premières loges pour ALCEST et son blackgaze aérien et transcendant. Concert d’une beauté exceptionnelle, émouvant, poignant, ALCEST et son répertoire poétique est un choix parfait pour terminer ce week-end hors du temps. C’est tout naturellement que la set-list commence avec trois extraits du dernier album, « Spiritual Instinct » (Ah quel bonheur d'entendre "Sapphire" !), suivis de morceaux plus anciens, tels "Ecailles De Lune – Part 2", "Oiseaux De Proie", "Kodama". Neige, au chant et à la guitate, est magnifiquement soutenu par Winterhalter à la batterie, et ses habituels compagnons de route, Indria à la basse et Zéro à la guitare et au chant. Le son est bien équilibré, on distingue clairement tous les instruments et les harmonies vocales. Pas de pogo dans la fosse, les spectateurs se recueillent presque religieusement. On flotte dans un autre univers, et c’est magique. Le concert s’achève sur la superbe chanson qu’est "Délivrance", les trois musiciens s’éclipsent discrètement, laissant Neige, très ému, seul en scène pour la note finale.


Afin d’admirer un peu le set de GOJIRA, on se rapproche des Mainstages, qui sont prises d’assaut. Des lasers dessinent des figures artistiques dans le ciel de Clisson. Sur scène, les quatre Landais envoient parpaing après parpaing, avec évidemment, une prédominance de chansons issues de leur dernier méfait, « Fortitude ». Cela dit, ils n’hésitent pas à piocher dans presque toute leur discographie pour satisfaire tout le monde. Le son est d’une pureté incroyable, le light-show met en valeur les morceaux de la plus belle des manières. Que dire sur GOJIRA qui n’ait point été déjà dit et redit ? On admire le talent, l’abnégation et le parcours de ce groupe qui a su, au fil des années, s’imposer comme un véritable fer de lance de la scène metal internationale, aux côtés des dinosaures du genre. Et ce n’est pas rien pour un groupe français, compte tenu que notre musique de prédilection est si peu (et si mal) représentée dans les médias généralistes !


La tête pleine de rêves et les yeux brillants comme des lucioles, on repart tranquillement vers les navettes. Pas au bout de mes peines, la file interminable des festivaliers poireautant bien sagement m’incite à repartir en marchant vers le parking, si je ne veux pas dormir sur place. Haut les cœurs ! Au point où j’en suis, je ne suis plus à un kilomètre près... mais cela ne m’empêchera pas de me maudire intérieurement de m’être garée à l’entrée du parking, soit à l’opposé du site, ce qui m’oblige à traverser encore une fois le satané parking en question. En rampant sur les moignons. Départ tôt le lendemain matin, avec un GPS rebelle qui décide de me faire visiter les campagnes Vendéenne et Poitevine par la nationale, comme pendant les années 40. Charmant et bucolique, mais le détour me coûtera deux heures de temps, et il faudra en tout dix interminables heures de voiture pour rejoindre l’Occitanie. Cependant, tout cela n’est rien comparé à l’immense joie d’avoir participé à cette quinzième édition, d’avoir engrangé une importante dose de concerts, rencontré des personnes extraordinaires et fait de si belles découvertes musicales. A l’année prochaine, Clisson •

Jour 1 - Jour 2
 

Blogger : Sly Escapist
Au sujet de l'auteur
Sly Escapist
Sly Escapist est comme les chats : elle a neuf vies. Malgré le fait d’avoir été élevée dans un milieu très éloigné du monde artistique, elle a réussi à se forger sa propre culture, entre pop, metal et théâtre. Effectivement, ses études littéraires l’ont poussée à s’investir pendant 13 ans dans l’apprentissage du métier de comédienne, alors qu’en parallèle, elle développait ses connaissances musicales avec des groupes tels que METALLICA, ALICE IN CHAINS, SCORPIONS, SOUNDGARDEN, PEARL JAM, FAITH NO MORE, SUICIDAL TENDENCIES, GUNS N’ROSES, CRADLE OF FILTH, et plus récemment, NIGHTWISH, TREMONTI, STONE SOUR, TRIVIUM, KILLSWITCH ENGAGE, ALTER BRIDGE, PARKWAY DRIVE, LEPROUS, SOEN, et tant d’autres. Forcée d’abandonner son métier de comédienne pour des activités plus «rentables», elle devient tour à tour vendeuse, pâtissière, responsable d’accueil, vendeuse-livreuse puis assistante commerciale. Début 2016, elle a l’opportunité de rejoindre l’équipe de HARD FORCE, lui permettant enfin de relier ses deux passions : l’amour des notes et celui des mots. Insatiable curieuse, elle ne cesse d’élargir ses connaissances musicales, s’intéressant à toutes sortes de styles différents, du metalcore au metal moderne, en passant par le metal symphonique, le rock, le disco-rock, le thrash et le prog. Le seul maître-mot qui compte pour elle étant l’émotion, elle considère que la musique n’a pas de barrière.
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