13 novembre 2021, 8:00

LE JOUR OÙ...

Joe Satriani devient guitariste de tournée de Mick Jagger, le chanteur des ROLLING STONES


En 1988, le chanteur des ROLLING STONES est à la recherche de musiciens pour se lancer dans sa première tournée solo. Joe Satriani se présente à l'audition…


Un an plus tôt, Mick Jagger a sorti son deuxième album, « Primitive Cool ». L'idée, c'est de prouver qu'il peut pleinement exister en tant qu'artiste solo, ses relations avec le guitariste Keith Richards, son frère ennemi au sein des STONES, s'étant considérablement dégradées quand le chanteur a refusé de partir en tournée pour promouvoir « Dirty Work » (1986), dix-huitième réalisation des Britanniques. Il veut en effet se concentrer sur l'enregistrement du successeur de son premier essai en solitaire, « She's The Boss » (1985), qui a reçu un bel accueil de la part des critiques et du public. Jeff Beck s'étant chargé de toutes les parties de guitares en studio, reste donc à lui trouver un "successeur" digne de ce nom pour le live, terrain de prédilection du frontman, qui part à New York pour auditionner ceux qui l'accompagneront sur scène.

A l'époque, Joe Satriani, guitariste virtuose de son état, a deux disques à son actif, dont le second, « Surfing With The Alien » (1987), n'a pas encore assis sa réputation en dehors du cercle des connaisseurs et des adeptes d'albums instrumentaux. Du propre aveu de Satch, sa tournée est un fiasco. Il perd en moyenne 8 000 dollars par semaine, son label, Relativity, n'a pas les reins assez solides pour éponger et il est en train de s'endetter dangereusement. Alors quand, début janvier 1988, il apprend de la bouche de Bill Graham, célèbre promoteur et producteur de concerts américain, que le chanteur des ROLLING STONES est en ville et qu'après avoir auditionné une cinquantaine de guitaristes, il est toujours à la recherche d'un soliste, il décide de tenter le coup. 

Le reste du line-up n'est pas là non plus pour amuser la galerie puisque l'on retrouve Doug Wimbish (futur LIVING COLOUR) à la basse, Simon Phillips (JUDAS PRIEST, MICHAEL SCHENKER GROUP, TOTO) à la batterie et Jimmy Ripp (Jerry Lee Lewis) à la guitare, ainsi que des choristes et un claviériste. « C'est bon, tu es engagé » lui annonce son nouveau boss à l'issue de l'audition. Sur un petit nuage (sans doute volait-il dans un rêve bleu ?), l'Américain voit non seulement ses problèmes financiers s'envoler d'un claquement de doigts, mais comprend qu'il dispose d'un tremplin exceptionnel pour promouvoir sa carrière solo.
 

A peine est-il engagé que Joe Satriani propose à Mick Jagger de venir taper le bœuf avec son groupe dans un petit club. Le chanteur des STONES accepte aussitôt...


Et, avant même de réaliser qu'il parle à une icône du rock dont il vient tout juste de faire la connaissance, il lui lance : « Je joue avec mon groupe au Bottom Line Club (NDJ : un petit club de Manhattan) dans deux jours. Ça te dirait de venir taper le bœuf avec nous ? ». « Pas de problème. A quelle heure ? » lui répond Jagger le plus simplement du monde. C'est donc un Joe extatique (on le serait à moins) qui retrouve ses musiciens à qui il annonce deux nouvelles – une mauvaise et une bonne. La première, c'est que du coup, la tournée, qui prenait l'eau de toute façon, est annulée. La seconde, c'est que le légendaire chanteur britannique va les rejoindre sur scène pour une reprise de "Red House" de Jimi Hendrix.

« Quand il est arrivé, le public est devenu fou » racontait-il en janvier dernier à BBC Radio alors qu'il assurait la promo de « Shapeshifting », son 17e et dernier album studio en date, sorti en 2020. « C'est la première fois que je découvrais en direct la puissance de son magnétisme ainsi que son talent pour communiquer musicalement parlant avec tous les gens présents. Quel que soit le public qu'il a en face de lui, Mick lui ouvre son âme de musicien. La scène du Bottom Line Club est minuscule et il l'a parcourue en courant comme un gosse qui s'éclate. Je n'avais jamais vu personne qui voulait à ce point que le public passe un bon moment. »

C'est ainsi que Joe Satriani, qui n'avait jusque-là que quelques concerts à son actif avec ses musiciens, se retrouve directement plongé dans le grand bain, le temps des 29 dates du “Primitive Cool Tour” qui visitera uniquement le Japon, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et l'Indonésie. Certains murmurent que Mick Jagger n'aurait pas eu le “courage” d'affronter son pays natal, l'Europe et les USA, quand d'autres affirment qu'il n'était là que pour préparer le terrain pour la venue des STONES au Japon, qui y feront leurs débuts en 1990 après s'être vu refuser leur visa en 1973 pour une sombre histoire de drogues… Dès le premier des 8 concerts au Pays du Soleil-Levant, le guitariste découvre le plaisir, si ce n'est d'être une célébrité, du moins d'en accompagner une, avec tous les avantages que cela comporte en termes d'accueil et de confort. 
 


Trente-trois ans plus tard, le New-Yorkais ne tarit pas d'éloges sur celui qui lui a véritablement mis le pied à l'étrier, rappelant, encore et toujours, l'humour, la simplicité et l'humilité du chanteur qui a toujours fait en sorte que chacun des musiciens se sente à l'aise et non pas comme un simple exécutant au service d'une superstar. Certains pourraient en prendre de la graine… « Ne t’en fais pas. Joue comme tu le sens, sois toi-même » lui avait d'ailleurs dit Jagger le jour de l'audition. « C'est Mick qui m'a appris comment être un artiste solo. Jusque-là, j'étais un peu dépassé, reconnaissait ​Satch en 2013 à l'occasion d'un entretien avec le San Diego Union TribuneIl m'a accordé une place pour faire un solo au milieu du concert parce qu'il savait que pour ma carrière personnelle, j'avais besoin d'attirer le plus possible l'attention sur moi et que l'occasion ne se représenterait peut-être jamais. Il a dit à son équipe : "Donnez à Joe tout ce dont il a besoin". Il m'a même alloué une pièce privée pour que je puisse répondre à des interviews. » 1988 est l'année de la consécration pour le guitariste qui passera ainsi de l'obscurité à un article dans le sacro-saint Rolling Stone, et de moins de 200 places de concerts vendues par soir (son groupe et lui donnaient alors deux shows quotidiens) à des salles de 4 ou 5 000 places sur sa tournée suivante. 

Ici à Tokyo, avec "Honky Tonk Women" des STONES. Sachant que rapidement, le répertoire des légendes britanniques constituera 80 % de la setlist de Mick Jagger qui ne jouera finalement que six morceaux de ses deux albums solo...


Le 19 octobre, Mick Jagger donne un concert "secret" au Corner Hotel à Melbourne sous le nom de THE BROTHERS OF SODOM, histoire de s’échauffer avant de sillonner l'Australie. Enfin, secret… jusqu'à ce qu'un animateur radio ne vende la mèche. Ici, on voit le groupe interpréter une reprise de "Little Red Rooster" de Willie Dixon. A noter qu'un DVD difficile à trouver, « Deep Down Under », filmé à Melbourne le 15 octobre et à Richmond le 19, est sorti en 2005. 


Un petit "Foxy Lady", filmé le 15 octobre 1988 à Melbourne ? Il suffit de demander… Attention, petit décalage entre l'image et le son.


​A l'issue de la tournée, Jagger, dont l'album n'a connu qu'un succès d'estime, réintègrera finalement les STONES, tandis que Joe Satriani, qui a été adoubé et qui bénéficie désormais d'un statut qu'il n'avait pas l'année précédente, s'en retournera, lui, à sa carrière solo. Et bénéficiera de l'intérêt que méritent sa virtuosité et sa capacité à écrire de vrais morceaux non chantés que peuvent apprécier tout autant guitaristes que profanes. « Surfing With The Alien » dépassera le million de copies écoulées aux USA, ce qui en fera l'album instrumental le plus vendu depuis « Wired » de Jeff Beck en 1976…

Cinq ans plus tard, Satch rejoindra DEEP PURPLE en tant que remplaçant de son héros, Ritchie Blackmore, comme on vous le racontait ici.
 

​​Le Jour où...
Dave Lombardo et Joey Jordison ont remplacé Lars Ulrich
Joey Jordison s'est fait virer de SLIPKNOT
ACCEPT a enregistré un inédit d'AC/DC
RUN-DMC a remis AEROSMITH en selle
Lemmy et Mikkey Dee se sont engueulés sur scène
Brian Johnson a trouvé sa voix
Ritchie Blackmore a détruit tout son matos sur scène
Rob Halford remplace R.J. Dio chez BLACK SABBATH
Steve Vai devient le guitariste du Diable
Jim Carrey invite CANNIBAL CORPSE dans son film
Suicidal Tendencies apparaît dans la série "Deux Flics à Miami"
Jason Newsted quitte METALLICA
Satriani remplace Blackmore chez Deep Purple
J
ames LaBrie de DREAM THEATER s'est vu proposer la place de chanteur d'IRON MAIDEN

Blogger : Laurence Faure
Au sujet de l'auteur
Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
Ses autres publications
Cookies et autres traceurs

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de Cookies ou autres traceurs pour mémoriser vos recherches ou pour réaliser des statistiques de visites.
En savoir plus sur les cookies : mentions légales

OK