4h30 de sommeil, c’est peu. La faute à sa Majesté féline qui a décidé que, puisqu’il avait dormi toute la journée, lui, il avait besoin de faire quelques vocalises et un peu de footing… sur mon ventre, le tout jusqu’à ce que je cède et finisse par me lever beaucoup trop tôt, renonçant à un éventuel rab’ de dodo devant l’insistance du minet chéri à me pourrir la nuit.
Mais, la journée qui m’attend étant particulièrement remplie, je puise dans mes réserves d’énergie, reboostée d’avance par le programme prévu, afin d’être en forme dès 11h00 devant la MS1 pour 7 WEEKS. Le trio français propose un rock à la fois lourd et groovy. Ça cogne dur, ça chante juste et ça bouge sévère. Tout ce qu’on aime pour se mettre en jambes dès le début de journée. Très bon set d’un groupe hors-norme qui mérite d’être revu sur une plus longue durée. A côté, sur la MS2, viennent s’installer les espagnols d’ANKOR, menés par leur pétillante vocaliste. Le groupe délivre un set hautement énergique avec leur metal alternatif, teinté pop rock. Si l’originalité n’est pas forcément au rendez-vous, il n’empêche que les Catalans emportent facilement l’adhésion d’un public qui s’amasse de plus en plus nombreux, tant leur sincérité est évidente. Un très bon moment festif et sans prise de tête. Beaucoup se sont déplacés pour assister à la prestation des Japonaises de LOVEBITES, toutes de blanc vêtues, réputées pour leur dextérité et leur heavy metal, classique mais fort bien exécuté. Les amateurs apprécient et réservent une belle ovation au quintette, mais je dois avouer que la voix haut perchée et monocorde de la vocaliste dans sa robe de mariée à froufrous a fini par me taper sur le système.
Sur la MS2, c’est au tour de WARGASM de faire le show. De show (chaud), il est bien question, tant Milkie Way, la blondinette chanteuse court-vêtue, s’expose à tout va à travers des attitudes sexualisées et des paroles sans aucune ambiguïté. L’électro punk du duo est cependant efficace pour se trémousser et s’amuser, mais c’est comme tous les excès : si l'on en prend trop, c’est mauvais pour la santé. On reste devant les Main Stages pour être placé au mieux pour WHILE SHE SLEEPS, mais avant cela, c’est au tour du power metal d’ORDEN OGAN qui a ses adeptes. Ça se laisse écouter plaisamment, même si on n’en prendrait pas tous les jours au petit-déjeuner. Avec des prestations en dents de scie, on ne sait jamais trop à quoi s’attendre avec WHILE SHE SLEEPS. Mais ayant une affection toute particulière pour le quintet de Sheffield, je ne veux absolument pas rater leur prestation. Bien m’en a pris car les musiciens sont dans une forme éclatante et ont mis les petits plats dans les grands pour leur premier passage sur une Main Stage, après avoir été cantonnés à la Warzone. Setlist équilibrée entre nouveaux morceaux ("Rainbows", "Self-Hell") et grands classiques ("Antisocial", "Silence Speaks"), occupation de tout l’espace scénique, un Loz Taylor (chant) particulièrement bondissant, un Sean Long (guitare) toujours aussi magistral avec sa six-cordes, et jets de flamme à tout-va, histoire de nous faire griller comme des saucisses au premier rang, et pour couronner le tout, un déferlement de crowdsurfers à la demande du vocaliste, qui a mis les gars de la sécu à rude épreuve. En résumé, un excellent concert de WHILE SHE SLEEPS, probablement le meilleur qu’il m’ait été donné de voir.
Quel dommage d’avoir calé les trop rares Australiens de KARNIVOOL sur la MS1 en plein milieu d’après-midi, alors que leur musique aurait mérité un horaire plus tardif pour avoir des conditions plus favorables. Leur set peine à décoller dans un premier temps, mais les spectateurs, peu nombreux au départ, ne tardent cependant pas à se regrouper devant la scène pour le rock progressif de haute qualité que propose les musiciens. Hélas, c’est à regret, après quelques chansons, que je laisse leur show derrière moi, mon instinct me suggérant de ne point m’attarder si je veux pouvoir me placer correctement pour KLONE que je ne veux absolument pas manquer. Appelons ça le sixième sens féminin, ou autre, j’ai été bien inspirée car l’Altar se remplit à une vitesse folle, à tel point que de nombreux spectateurs ne pourront pas assister au concert très attendu des Poitevins, tant la tente dégueule de monde par toutes ses ouvertures. En effet, le succès grandissant du groupe depuis les excellents « Le Grand Voyage » et « Meanwhile » justifie cette présence massive. On sait, lorsque l’on va voir un concert de KLONE, que l’on ne sera jamais déçu. Bénéficiant cette fois d’un meilleur créneau horaire que lors de leur passage en 2019, et surtout, sous une tente qui favorise l’intimité propice à sa musique émotionnelle, le groupe délivre une prestation exceptionnelle de bout en bout, servie par un son absolument parfait, où chaque instrument s’entend clairement. Pour la première fois depuis fort longtemps, le groupe accueille sur scène leur sixième membre, toujours présent en studio, le saxophoniste Matthieu Metzger. Et sa présence apporte un plus non négligeable, une dimension encore plus ouverte et organique à ce concert.
Démarrant le set sur le très beau "Night And Day", on se prend en pleine face le son de caisse claire claquant et la frappe vigoureuse du batteur Morgan Berthet. La musique du groupe présente plus de puissance en live que sur disque, Yann Ligner développant un chant et des phrasés plus rugueux qui donnent la chair de poule, Guillaume Bernard (guitare), Aldrick Guadagnino (guitare) et Enzo Alfano (basse) se chargeant des atmosphères en semi- apesanteur. Pour la toute première fois, KLONE interprète celle que je considère comme l’une des plus belles chansons de l’album « Meanwhile », à savoir la somptueuse "Blink Of An Eye" et sa ligne mélodique qui évoque une valse sensuelle, et quelle merveille ! Les larmes montent aux yeux instantanément, et ce sont des milliers de spectateurs qui s’envolent dans une autre dimension, en communion absolue avec la musique, avec le groupe. De ces instants de partage magiques, indescriptibles, qui font s’élever la passion de l’art au plus haut niveau. Tous reliés par ce je-ne-sais-quoi qui va puiser au fond de chaque être humain, qui va toucher la corde sensible de chacun. Et comme on va le voir plus tard, ce n’est que le début d’une belle série sous cette même tente, sur laquelle a dû souffler un vent porteur d’amour. Autre exclusivité, le groupe interprète "Interlaced", un inédit issu du prochain album, « The Unseen », annoncé pour le 8 novembre prochain. Ce sont les incontournables et superbes "Immersion" et "Yonder" qui finissent de nous emporter dans un tourbillon. L’ovation recueillie est à la hauteur de la qualité du concert que le groupe vient de délivrer, et tous les spectateurs sont unanimes pour dire que nous venons d’assister à un grand, un très grand concert de KLONE.
Impossible pour moi de quitter la place de choix au premier rang, au centre face à la scène pour les deux concerts à venir. Einar Solberg dans un premier temps doit investir l’Altar pour défendre son album solo, « 16 », paru l’an dernier. Le frontman de LEPROUS est accompagné pour ce faire des musiciens qui ont joué sur l’album, à savoir, Ben Levin à la guitare, Keli Guðjónsson à la batterie et Chris Baum au violon, entre autres. Fidèle à lui-même, il nous offre une prestation vocale de haute volée, intense et délicate, avec certains temps forts, comme "A Beautiful Life" et le final sur "The Glass Is Empty". Il est clair cependant que ce sont essentiellement les fans de son groupe principal qui se sont déplacés en nombre pour l’acclamer, et probablement quelques curieux, tant le registre abordé sur ses compositions fait figure d’OVNI. On est effectivement plus sur de la musique indé, expérimentale et orchestrale que sur le registre du prog rock habituel du vocaliste. Restent sa voix unique et son charisme qui font de cette prestation une réussite, même si elle est en complet décalage par rapport au reste de la programmation. Eh oui, c’est aussi cela le Hellfest.
Toujours bien calée contre la barrière et centrée face à la scène, j’attends de pied ferme l’autre groupe que je ne veux rater sous aucun prétexte. Absolument conquise par leurs albums, dont le dernier en date, « Exul », sorti en 2023, ainsi que par leur formidable concert à Petit Bain à Paris l’an dernier, je sais d’ores et déjà que ce concert sera épique. NE OBLIVISCARIS est un groupe de metal extrême progressif australien (ou plutôt devrais-je dire italo-franco-americano-australien : quatre nationalités différentes pour six membres !). C’est au son du génial single "Equus" que le groupe démarre son set. La clarté du son est époustouflante, sa puissance aussi. Il faut dire que Chris Edrich, le très bon ingénieur du son qui s’est aussi chargé du set d’Einar Solberg, est derrière la console : garantie qualité. Et c’est indispensable pour les compositions de NE OBLIVISCARIS qui recèlent de multiples subtilités, si l’on ne veut pas que cela se transforme en bouillie sonore. Le violon de Tim Charles est central, c’est l’élément qui apporte à la musique du groupe ce quelque chose d’incomparable que les autres n’ont pas. Sa voix aussi, claire, douce et mélodique, plutôt pop, qui contraste avec les growls profonds venus des entrailles de James Dorton, l’Américain de la troupe. Ce dernier, toujours en charge de remplacer Marc “Xen” Campbell, indisponible depuis plusieurs mois pour d’importantes raisons familiales, le fait en toute sincérité, générosité et humilité. Equilibre parfait entre ombre et lumière, à l’image de la musique du groupe. Derrière, ce sont quatre musiciens ultra talentueux qui déversent mélodies, vitesse et technicité ébouriffantes : l’Australien Matt Klavins et le Français Benjamin Baret aux guitares, l’Italien Martino Garattoni à la basse et le Français Kévin Paradis (BENIGHTED) à la batterie.
Joué pour la première fois lors de cette tournée des festivals européens, “Suspyre” prend toute son ampleur sur scène et son agressivité s’en trouve décuplée. Le groupe pioche aussi dans son passé pour nous offrir un bel aperçu de la richesse de sa musique avec "Intra Venus", "Devour Me, Colossus - Part I (Blackholes)" et son solo de basse jouissif qui se transforme en moment d’exaltation intense lorsque tous les instruments rentrent dans la danse avec le public qui clape des mains en rythme, pour finir sur l’incontournable "And Plague Flowers The Kaleidoscope" mené de main de maître par Tim Charles, frontman au charisme solaire, à l’énergie débordante et contagieuse et au sourire ravageur, qui utilise son violon de manière totalement innovante et anticonformiste. Après des remerciements enthousiastes et chaleureux, il descend dans la fosse au contact du public du premier rang (en clair, devant votre chroniqueuse) pour terminer le morceau, puis plonge dans la foule pour une petite séance de crowdsurfing, accompagné par un James Dorton ravi au sourire qui en dit long et qui lui aussi a besoin d’un petit bain, semble-t-il. Ovation explosive de la part du public conquis ! Entre la poésie et la délicatesse du violon, les rythmes trépidants et les blastbeats de la batterie, les soli de guitares à tomber, les mélodies inspirées, NE OBLIVISCARIS vient de délivrer, selon moi, l’un des deux meilleurs concerts de la journée. Et comme me le fera remarquer mon voisin de barrière (coucou à toi, Thomas de Rambouillet !), lorsque l’on sort de ce concert, on a des étoiles plein les yeux, en un mot comme en cent, on est heureux ! NE OBLIVISCARIS diffuse du bonheur à la pelle avec sa musique rayonnante et lumineuse, profonde et puissante, où la noirceur est présente mais ne dévore pas tout.
Après une telle intensité, on a besoin de se rafraîchir les idées, et le gosier, par la même occasion. On ne verra donc que la fin du très bon set de SATYRICON sous la Temple, et malgré le peu que l’on en a vu, on peut confirmer la belle qualité du black metal des Norvégiens, à la fois prenant, groovy et mélodique. Retour sous l’Altar pour d’autres artistes venus du Grand Nord : les Finlandais AMORPHIS, que je revois avec plaisir, presque neuf ans après leur prestation en première partie de NIGHTWISH en 2015 qui m’avait fait forte impression. Ultra mélodique grâce aux claviers proéminents, le death metal du groupe donne une irrépressible envie de se trémousser et on ne s'en prive pas, sous la tente qui ne désemplit plus depuis le début la journée. L’ambiance est festive et bienveillante et c’est beau à voir. Sous la Temple, juste à côté se prépare le concert d’EMPEROR qui va, pour ma part, passer à la trappe dans mon planning. L’amitié passe avant tout et quelques instants précieux avec un être cher, ça n’a pas de prix. La soirée se termine une fois de plus sous l’Altar, avec PAIN OF SALVATION. Malheureusement, les Suédois vont jouer de malchance, contrairement à tous les autres groupes s'étant produit sur cette même scène. Non seulement, ils arrivent sur scène avec 5 bonnes minutes de retard, mais en plus de cela, le guitariste et frontman, Daniel Gildenlöw, rencontre un gros problème en début de set avec sa guitare, qu’il est obligé d’abandonner pendant plusieurs minutes, avant de se faire dépanner par Enzo Alfano, bassiste de KLONE.
Démarrage foiré et bancal, mais le groupe saura se rattraper par la suite et finira par conquérir son public. Moment de grâce lorsque le batteur Leo Margarit prend le micro, mais aussi lorsque les claviers de Vikram Shankar (REDEMPTION, SILENT SKIES) nous enveloppent de douceur sur "On A Tuesday". Même si la tente est bien moins remplie que pour les groupes précédents, ce qui peut s’expliquer par l’heure tardive et la complexité de la musique du groupe, PAIN OF SALVATION a réussi à régaler ses amateurs et récolte de beaux applaudissements.
Clap de fin pour cette deuxième journée particulièrement chargée en émotions. Les étoiles brillent encore dans les yeux, le vent d’amour a bel et bien soufflé son air divin sur nos cœurs, et si le retour doit se faire à pieds jusqu’au parking au vu de la file d’attente interminable pour les navettes, peu importe, car l’air possède encore ses effluves de bonheur, comme dans un rêve éveillé.