
Une nouvelle année commence. Il est donc temps de nous la souhaiter musicalement riche et de vous révéler les albums qui m'ont marqué en 2024. Pour rappel, mon critère de sélection est que l’écoute d’un album doit s’intégrer dans une boucle qui entretient mon addiction positive. Avec 23 albums, autant dire que cette année a largement dépassé mes attentes ! J’en remercie particulièrement les artistes qui en sont les auteurs et en particulier les deux premiers que j’ai adorés plus que tout. Ces deux albums sont tristes et lumineux, porteurs de résilience et de puissance. Leur force, c’est aussi de démontrer qu’être féministe ne nécessite pas nécessairement de militer et revendiquer, il suffit souvent d’être soit même et de simplement l’exprimer avec son coeur pour susciter l’adhésion et le respect. Le reste est regroupé par catégorie sans critère de préférence.
MELANKHOLIA : « In Darkness Through The Light »
Après s’être révélée au monde entier au côté de GOJIRA, Marina Viotti réalise avec cet album la prouesse de mettre en perspective l’universalité de la musique à travers les siècles et les étiquettes derrière lesquelles nous essayons vainement de la catégoriser. Certes, il ne s’agit ici que de reprises, mais réinterprétées avec intelligence. Cet album alterne des morceaux du compositeur et luthiste anglais John Dowland (1563-1626) avec d'autres, plus contemporains, de Neil Young, U2, METALLICA, Lana Del Rey, NINE INCH NAILS et Björk. Pour ce faire, elle s’est entourée du luthiste Vincent Flückiger et du multi-instrumentiste, ingénieur du son et producteur Fred Chappuis, deux musiciens issus comme elle de l’univers rock, punk et metal. Ensemble, ils proposent une réinterprétation baroque et gothique dans laquelle Marina plonge dans les heures sombres de sa vie pour en ressortir plus forte et rayonnante que jamais. Un album mélancolique qui s’inscrit dans la lignée de l’esprit gothique insufflé voici trois décennies par THE 3RD AND THE MORTAL, qui avec Kari Rueslåtten, lui apporta une nouvelle dimension en y mettant la femme au premier plan. Un album acoustique qui ne manque pas non plus de faire écho au dernier album d’Anneke van Giersbergen, « The Darkest Skies Are The Brightest » (2021).
BLUES PILLS : « Birthday »
Avec ce quatrième album, BLUES PILLS impose un nouveau slogan : "Féminité, Maternité et Rock'n'Roll". Du début à la fin, vous serez happé, incapable de vous libérer de l’emprise de cette œuvre qui agît comme le chant des sirènes. Par chance, la voix d’Elin n’est en rien celle qui vous entraîne dans les abysses, mais plus celle d’une femme épanouie qui clame haut et fort au monde entier sa joie de vivre. Pas une note de cet album n’est dissonante. La musique est d’une rare efficacité au service d'un chant magnifique dont la perfection est telle qu’au fil des écoutes on se demande comment une telle perfection est possible. La prestation du groupe au Hellfest rappelle celle de THE GATHERING qui, voici trois décennies, avait enflammé avec Anneke van Giersbergen la scène du Dynamo Open Air d'Eindhoven, après la sortie retentissante de l’album « Mandylion » (1995).
Dans la catégorie de ceux pour lesquels le temps m’a manqué pour en écrire les chroniques, mais que je vous recommande vivement et que j'espère continuer à suivre avec enthousiasme, il y a quatre jeunes groupes. UNCUT tout d'abord, qui s'est transformé en « Space Cowboys » pour s’envoler aux commandes d’un aéronef aux couleurs de son premier album. Devenu explorateur, c’est avec succès que ce groupe vous fait découvrir de nouveaux espaces, jusqu'ici inconnus, dans la constellation du blues-rock des années 70. Vient ensuite un ancien tribute-band d’ALICE IN CHAINS totalement libéré de son passé. SEEDS OF MARY dévoile avec amour et sincérité sa nouvelle identité. « Love » est un album riche d’une multitude d’influences subtilement agencées. Venu d’outre-atlantique, il était difficile de passer à côté de THE GEORGIA THUNDERBOLTS qui nous a séduit lors de son passage au Raismes Fest et que nous avions interviewé. Avec « Rise Above It All », le quintet fait honneur au rock sudiste dont il est l’héritier, en lui insufflant une bonne dose de jeunesse. Pour terminer cette partie, DEVASTATOR renouvelle avec beaucoup de talent le speed thrash metal des années 80 avec son second album « Conjurers Of Cruelty ».
Dans la catégorie nostalgie, c'est THE RODS qui a retenu mon attention et renvoie les plus âgés d’entre nous au début des années 80. Après une séparation en 1986, il est réapparu avec un album en 2011 (« Vengeance »). En ce début d’année 2024, le groupe de David Feinstein (cousin de Ronnie James Dio avec lequel il joua dans ELF) frappe très fort avec « Rattle The Cage ».
S’il ne s’est écoulé que sept ans depuis « Sacred », un nouvel album de THE OBSESSED est toujours un événement pour ceux qui ont découvert le groupe au début des années 80 ou 90 et l’apprécie. « Gilded Sorrow » confirme que la formation est une sorte de totem dont la rareté en fait un joyau d’une grande valeur.
Dans la catégorie révélations il y a tout d’abord deux groupes que je suis depuis plusieurs albums et qui jusqu’ici ne m’avaient pas convaincu. Et bien, en 2024, c’est chose faite pour CALIGULA'S HORSE avec « Charcoal Grace » et THE PINEAPPLE THIEF avec « It Leads To This ». Deux albums incontournables pour les amoureux de la scène rock progressif. Viennent ensuite les suisses MONKEY3 qui avec « Welcome To The Machine » délivrent un album de stoner monumental. Nouveau venu dans l’univers du black metal, JORDSJUK délivre un premier EP « Råtner på Rot » qui fait revivre avec force le son originel du genre.
Dans la catégorie "valeurs sûres", LOCOMUERTE a tenu toutes ses promesses avec un exceptionnel « Parano Booster ». Lorsque KLONE a annoncé « The Unseen » comme un album d’anciennes idées non retenues, on ne pouvait légitimement pas savoir à quoi s’attendre. Toutefois, conscient qu’un tel album serait d’une part une tache dans sa discographie et d’une autre un manque de respect pour les fans qui se le procureraient, KLONE a su faire preuve de professionnalisme et d'inspiration pour transformer ces chutes de studio d'une fort belle manière.
Dans la catégorie "artistes féminines", on retrouve des groupes qui montrent que les femmes sont incontournables dans notre univers musical et qu’elles savent surtout s’imposer avec talent en parfaite osmose avec leurs camarades masculins. C’est ce que présente HABITANTS qui était de retour avec le superbe « Alma » prouvant qu’avec son line-up on ne peut plus stable et soudé, ce projet n’était pas juste celui des frères Rutten pour renouer avec la musique, mais bien de proposer une nouvelle approche du genre shoegaze.
DJIIN propose, quant à lui, deux facettes qui s’opposent tout en étant indissociables l’une de l’autre, comme les deux côtés d’un miroir. Fait de métaphores et de poésie, « Mirrors » renvoie des images fortes qui illustrent des thématiques telles que le handicap, la maladie, la psychose, les violences misogynes, la vanité ou encore la mort.
Accompagné une fois de plus du duo de producteurs John Cornfield (MUSE, SUPERGRASS, Ben Howard, Robert Plant...) et Paul Reeve (producteur vocal de Matt Bellamy) LESOIR a réalisé « Push Back The Horizon », un sixième album très réussi.
Enfin, DRIVE BY WIRE réussit avec brio la livraison de « Time Horizon », premier chapitre d’une nouvelle ère très prometteuse avec l’arrivée derrière les fûts de Ingmar Regeling.
Et pour finir, il y a aussi la catégorie des grosses pointures avec :
OPETH : « The Last Will And Testament »
THE DEAD DAISIES : « Light ‘Em Up »
Bruce Dickinson : « The Mandrake Project »
JUDAS PRIEST : « Invincible Shield »